Liste des groupes Doom Sludge Hangman's Chair Banlieue Triste

Il est toujours difficile de juger un album qui a mobilisé l'énergie, la passion et le temps de tant de personnes. Entre la composition, l'écriture, les répétitions, l'enregistrement et le mixage d'un CD, il faut beaucoup de respect et aussi de reconnaissance à chaque partie prenante pour apprécier le travail. Mais il faut aussi beaucoup d'humilité pour juger le travail des autres. Serions-nous capable de nous arracher avec autant de conviction, de ténacité, de passion que ces artistes ? Serions nous simplement capable d'écrire de la musique voire du courage pour la partager ? J'en suis incapable et c'est pourquoi j'ai du mal à critiquer le travail des autres, surtout dans un domaine artistique aussi difficile que la musique. C'est pourquoi je ne commenterai pas les 4 derniers Gojira...

Donc Hangman's chair... Groupe français, ce qui veut dire déjà pour moi une attention particulière, un a priori positif mais aussi une plus grande sévérité dans le jugement de l'oeuvre écoutée. Surtout quand on s'attaque à un groupe de Doom (désolé je n'ai pas trouvé le sludge). "Banlieue Triste" quoi de mieux qu'un titre si déprimant pour un album de doom. Raccord les gars. 10 titres avec une intro instrumentale et une conclusion sous forme de "spoken word". Plutôt anecdotique, le décor est planté. En revanche, les 8 autres titres, quelle baffe ! Une créativité à son acmé, des instrumentistes sans failles pour des compositions magnifiques, des morceaux à la fois longs mais surtout passionnants. Toutes les références sont présentes et dans le désordre : Nine Inch Nail, Candlemass, Korn, les compositeurs de BOF (Zimmer, Hemsey), Def Leppard from '90 (écouter la guitare de "négative male child"), Type O Negative (sans le côté suicidaire) et j'en passe. Une rythmique pesante avec une basse lourde et puissante ainsi qu'une batterie implacable qui martèle chaque thème en vous saisissant à la gorge, une guitare tantôt lumineuse, tantôt dépressive. Une production mettant en lumière chaque instrument, ce qui nous permet de profiter aussi des samples qui apportent indéniablement une couleur supplémentaire à l'oeuvre.

Alors que la musique est majoritairement triste (ce n'est pas moi qui le dit, c'est dans le titre), il y a toujours une lueur qui nous laisse entrevoir un moment moins sombre, voire parfois un avenir possible, je pense notamment aux deux instrumentaux ("Tara" parfait mix entre la basse du thème de twin peaks et le "closer" de NIN, et "Sidi Bel Abbes"), lorsque la rythmique si lourde laisse la place aux guitares. L'album est bien équilibré avec autant de chansons autour de 6 minutes que des pavés au delà des 8 minutes, judicieusement placés dans le CD. Comme quoi, le tracklisting est fondamental dans la digestion et l'appréciation d'une oeuvre aussi longue (on parle de 1H07 de musique tout de même). En effet il faut pouvoir développer ses ambitions sans perdre l'auditeur dans des méandres ennuyeux (oui je parle bien des derniers Metallica, Iron Maiden et Dream Theater). Par exemple, il m'a fallu 2 écoutes pour m'apercevoir que "touch the razor" est un seul même morceau, coupé en deux, grand moment à l'ambiance si versatile durant les 11 minutes de son développement. Bref j'adore cet album tellement créatif et touchant. Vous aimerez toutes les chansons car le groupe réalise aussi l'exploit d'éviter les redites ! Pas un thème ne ressemble au suivant comme si les compositeurs avaient mis toute leur hargne et tout leur génie et que du coup il n'est pas nécessaire d'en rajouter. Et ils ont raison car le discours peut tenir en 4 ou en 12 minutes pour passer ensuite à autre chose et cela est salutaire.

Alors pourquoi seulement 14 ? Et bien car il s'agit d'une moyenne. Toute la partie musicale ou instrumentale mérite au moins 18. Mais on arrive à l'énorme point faible que je regrette énormément. Ce n'est pas l'intro inutile ou le spoken word dont on pourrait se passer (un renvoi dans le livret aurait suffit mais cela ne remet pas en cause la Création). Non ce qui me bloque c'est le mixage de la voix. Je le trouve absolument saboté (d'où le titre, bien trouvé non ?). En effet, j'ai l'impression que le chanteur enregistre dans la pièce d'à côté sauf que le Groupe est à Los Angeles et le chanteur à Paris. Et pourtant, on sent que le chanteur aurait tellement d'émotion à partager, il a une voix magnifique, qui s'associe tellement bien avec la noirceur de la musique, la rendant lumineuse, rien que les passages (audibles) de "sleep juice" me font penser au "Knocking on the heaven's door" de Gun's N Roses, pas moins. Personnellement, cela m’indiffère si les français ont recherché l'esprit du tout premier Hellhammer ou Candlemass. Nous sommes en 2018 et je cherche une production actuelle, ce qui est le cas pour la musique. J'aurai mis 4/5 points de mieux sans cette faute de goût.

Si vous faîtes abstraction du mixage de la voix, et si vous aimez le style (si vous êtes un speed kid ou un death metalleux, passer votre chemin), vous allez adorer cette créature, qui reste tellement attachante. Etant sévère, je compte sur vous pour surnoter l'album et lui permettre de remonter sa moyenne. J'en suis navré mais c'est au-dessus de mes forces et de mes convictions

Dommage, vraiment dommage....