Trois ans déjà que le combo néerlandais n'avait réinvesti les studios depuis son introductif et friable EP « A
Requiem of Shadows ». Le temps pour nos acolytes de fouler quelques planches de la scène metal locale (Maddogs Metalfest (Groesbeek), Black Market Tour (Arnhem), Vetrar
Draugurinn+Treurwilg+Egeria (Arnhem) en 2018 ; Occultfest (Hoogeveen) en 2019...) et d'affûter leurs armes pour espérer tenir en respect les
Beyond The Black,
Elvellon,
Sleeping Romance et autres
Metalwings et
Walk In Darkness. Aussi, nous reviennent-ils munis d'un second EP répondant au nom de «
As Night Falls » ; une laconique auto-production où cinq pistes inédites s'enchaînent sur un ruban auditif de 25 minutes. Cette nouvelle offrande pourra-t-elle faire fi de leurs erreurs de jeunesse et, surtout, sera-t-elle de nature à leur autoriser l'accès au rang de valeur montante d'un registre metal toujours aussi couru par ses pairs ?
Créé à Arnhem en 2013 par la frontwoman
Nicole de Ruiter, le groupe a subi quelques remaniements conformément à l'évolution artistique et technique du projet. Aujourd'hui, aux côtés de
Nicole, continuent d'oeuvrer Max Vijgen, aux claviers, et Maurice Schepers, aux guitares ; le bassiste Erik Willems ayant été remplacé par Joris Janssen, et le batteur Valentijn Veldhoen, par Wouter Coolen, lui-même substitué, pour l'occasion, par Matthijs Quaars (
Spoil Engine), ce dernier assurant, par ailleurs, le mastering, le mixage et l'enregistrement des lignes de chant et de batterie du présent opus. Ce faisant, à l'instar de son aîné, le menu méfait ne déplore que de rares sonorités résiduelles et le mixage apparaît désormais plus équilibré et les arrangements de meilleure facture. Une mise en musique quasi optimale susceptible d'asseoir la rondelle sur de solides assises.
Aussi, effeuille-t-on une proposition rock'n'metal symphonique gothique et progressive, à la fois pulsionnelle, aérienne, voluptueuse, un poil plus éthérée que sa devancière, où les choeurs sont mis à l'honneur, nous faisant alors davantage penser à
The Gathering,
Autumn, Vetrar
Draugurinn,
After Forever qu'à
Nightwish,
Delain ou
Amberian Dawn. Une évolution stylistique qui a pour corollaire une atmosphère moins lumineuse, une mélodicité toute de nuances vêtue, des séries d'accords aux enchaînements bien assurés et moins immédiatement accessibles. Il semble que l'on soit désormais entré dans une autre dimension, du moins au cœur d'un paysage de notes aussi enveloppant qu'éclectique, auquel le combo ne nous avait pas encore accoutumés...
Une fois encore, nos compères révèlent leur capacité naturelle à générer ces harmoniques qui longtemps resteront gravés dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon. A commencer par leurs espaces d'expression les plus incisifs. Ainsi, à mi-chemin entre
The Gathering et
After Forever, l'up tempo symphonique gothique « A
Night at the
Mansion » n'a de cesse de nous asséner ses riffs acérés adossés à une rythmique invariablement frondeuse. Dans ce champ de turbulences, où s'insèrent d'insoupçonnés arpèges d'un orgue d'église, déambulent les cristallines inflexions de la sirène, alors judicieusement combinées aux choeurs qui, peu à peu, tendent à prendre l'ascendant. A la fois offensif et engageant, recelant un refrain immersif à souhait et de sidérantes montées en puissance du corps orchestral, ce tubesque manifeste ne manque ni d'allant ni de panache, nous poussant alors une remise du couvert aussitôt la note ultime envolée.
Quand il ralentit un tantinet le rythme de ses frappes, le collectif batave trouve à nouveau les clés pour nous rallier à sa cause. Ainsi, voguant sur un infiltrant cheminement d'harmoniques, et en dépit d'une mélodicité un proie à quelques linéarités, le mid tempo progressif d'obédience gothique «
What Lies Beneath » ne ratera pas sa cible. Dans la veine d'
Autumn et Vetrar
Draugurinn, cet effort aux riffs émoussés, aux sonorités à la fois abyssales et éthérées, ouvre peu à peu ses ailes, nous faisant alors flirter avec un monde onirique peuplé d'angéliques créatures, où dansent les claires volutes de la déesse en communion avec son escorte de choeurs. Dans cette mouvance s'inscrit « Shattered Mirrors », où la doucereuse entame se voit soudain relayée par des riffs grésillants et balayée par ses puissantes et sèches frappes de fûts. Et ce, pour une traversée aux séries d'accords sécurisées, enjolivée par les limpides modulations de la belle, la ritournelle s'achevant crescendo.
Lorsqu'ils nous mènent en d'intimistes contrées, nos acolytes nous livrent leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre «
Dawn Breaks », ballade atmosphérique progressive dans la lignée de
The Gathering, recelant une mélodicité certes convenue mais aux multiples nuances, somme toute agréable à défaut de s'avérer imparable. Voguant sur de soyeuses nappes synthétiques et octroyant un bref mais vibrant solo de guitare, l'instant privilégié se dote également d'enchaînements couplets/refrains de bon aloi, aptes à nous faire quitter le plancher des vaches pour de célestes rivages. A la maîtresse de cérémonie eu égard à ses câlinantes oscillations et ses choeurs en faction de contribuer à rendre le moment tamisé plus savoureux encore.
Le combo a, par ailleurs, orienté ses efforts vers les vastes espaces opératico-progressifs, redoutable exercice de style s'il en est, souvent appelé de leurs vœux par moult de leurs homologues. Aussi se verra-t-on décontenancé tant par les enchaînements de portées que par les ténébreux couplets jaillissant des entrailles de « The Rise of the
Fallen Queen ». Sur près de 7 minutes, cette épique, chaotique et énigmatique pièce en actes abonde en coups de théâtre, se plaisant alors à nous bousculer, parfois. Le tortueux propos ira jusqu'à de nous égarer, le tracé mélodique imposé s'avérant aussi peu oscillant que complexe, voire déroutant. Bref, une fresque pour le moins intrigante, à l'architecture solide et à la technicité éprouvée, mais peu propice à une rapide assimilation. A réserver à un tympan averti.
Envolés les tâtonnants débuts du combo néerlandais, nos acolytes nous livrent désormais une rondelle plus complexe et évanescente mais aussi plus efficace et diversifiée que sa devancière. Jouissant d'une production d'ensemble difficile à prendre en défaut et témoignant d'une palette plus étoffée en matière d'exercices de style, la galette laisse également entrevoir des prestations vocales plus aguerries de la part de la frontwoman ainsi qu'une judicieuse apparition des choeurs, contribuant précisément à densifier le corps oratoire de leur présence.
En dépit d'un potentiel technique aujourd'hui plus habilement exploité, l'opus peine pourtant à atteindre ses louables et légitimes objectifs. Concédant l'une ou l'autre linéarité mélodique et quelques longueurs, rarement la fibre émotionnelle ne se trouve affectée. Aussi, si les qualités de l'album nous invitent à le parcourir d'une seule traite, celui-ci ne nous poussera pas forcément à une remise en selle aussitôt descendus de notre monture. Néanmoins, eu égard à l'évolution de leur projet et aux progrès réalisés, cet effort pourrait dès lors placer nos compères parmi les espoirs de ce registre metal. Affaire à suivre...
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