Dans le milieu du metal, il y a les groupes qui se prennent au sérieux et véhiculent des attitudes graves (on pense notamment à tout le jeu de scène associé à l'univers black metal ou funeral doom par exemple) en phase avec la musique qu'ils pratiquent. Et puis il y a les déconneurs qui entretiennent volontairement une image légère.
Destrage fait incontestablement partie du second lot. Formé en 2002, le quintet italien décroche un contrat avec
Metal Blade après son second album "
The King Is Fat'N'Old" (2010).
Ce troisième opus voit donc le jour en 2014 affublé d'un titre pour le moins décalé ("Are You Kidding Me ? No.") et d'un artwork encore plus délirant, exploitant presque à outrance la tendance psyché (généralement plus affectionnée par les groupes de Stoner) avec sa calligraphie exagérée et ces spires entourant un œil qui nous fixe de manière stoïque. L'artwork est globalement réussi mais entre ça et le titre, on est pas des plus rassurés sur les nouvelles orientations du groupe.
Destrage évoluait jusque là dans un modern metal à la base death mélo, mâtiné d'une coloration thrash. On retrouve la plupart de ces éléments sur ce nouvel album : des riffs thrashy simples mais accrocheurs ("Purania","Waterpark Bachelorette"), des breakdowns en veux-tu en voilà ("
Destroy Create Transform Sublimate") et la traditionnelle alternance des chants offerte par Paolo Colavolpe. Le frontman milanais assure en effet ce scream acéré (voire parfois un peu criard) sur les parties les plus enlevées, un growl épais sur les passages les plus groovy et un chant clair qui en rebutera surement plus d'un par son aspect post-punk us à la Sum41, qui donne ici un aspect "happy metal" parfois trop poussé.
Sur cet album, les lombards semblent par ailleurs avoir poussé un petit peu plus du côté de l'expérimental pour accentuer davantage leur tendance barrée. On retrouve ici énormément de riffs dissonants ("G.O.D." ou "(Obedience)") qui font un peu penser à
The Dillinger Escape Plan, de changements de rythme ("Host, Rifles & Coke"), l'apogée étant atteinte sur son morceau-titre final de plus de 7 minutes, avec ses cuivres donnant un côté "cirque vintage" des plus déroutants.
Outre le fait que je ne sois pas féru de ces délires en tout genre, il faut reconnaître que l'enchaînement de titres aux orientations complètement opposées (la ballade "Where The Things Have No Colour" et la presque punk "Waterpark Bachelorette") couplé à cette dimension expérimentale, fait perdre pas mal de cohérence au disque et rend l'écoute d'un trait (cinquante minutes) un peu compliquée. Dans une veine assez similaire, les voisins piémontais de
5 Star Grave avaient réussi à bien mieux s'en tirer sur leur premier disque.
Enfin, une chose est sure c'est que cet album de
Destrage ne laissera pas indifférents ses auditeurs : entre ceux qui apprécieront grandement (voire crieront peut-être au génie) et ceux à qui cet album donnera la nausée, il y a un juste milieu. Pour moi, "Are You Kidding Me ? No." est un album honnête qu'il fera bon ressortir de temps en temps. A vous de tenter l'expérience pour vous rendre compte par vous-mêmes.
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