Dans le sillon de son éclosion aussi triomphante que fulgurante, l’école italienne du Heavy
Power Metal entraînera, en cette fin des années 90, bon nombre de groupes sur le front d’une bataille pour laquelle peu seront réellement parés. Extirpant de la fange d’un underground transalpin bien plus de combattants ennuyeux que réellement captivants, davantage d’intelligents inspirés que de réels créatifs fascinants, ses victoires grandioses devaient augurer les affres les plus douloureuses d’une guerre perdue d’avance. En effet, avec le temps, seul les plus valeureux resteront vaillants, prêts à continuer cette lutte meurtrière. Et dans un souffle désespéré, ils tenteront de donner, à un mouvement en pleine débâcle, l’allant d’un nouvel élan salutaire. Mais aujourd’hui, plus que jamais, les temps bénis épiques, au médiévalisme de rigueur, semblent quelque peu révolus. Dans ce désastre artistique d’une scène en pleine évolution, l’époque trouble est donc aux changements.
Après un album, certes, très sympathique (
Emperor of the Black Runes) mais stigmatisant tous les stéréotypes les plus, désormais, éculés et les plus, immédiatement, désapprouvés, du genre,
Domine n’a d’autre choix que celui d’un périlleux assaut désespérés, l’épée à la main, s’il veut survivre. Mais celui qui fut l'un des plus ardent défenseur de ce
Power au traditionalisme étouffant est aculé. Il doit sortir du bois, mais avec de nouvelles armes.
L’aspect le plus immédiatement hérité du conservatisme à l’italienne, avec ses ruées véloces de titres aux rythmes rapides, ses classiques refrains fédérateurs et ses claviers soulignant les ambiances héroïques de guitares aux riffs simples mais acérés sur lesquelles s’époumone un chanteur aux aigus et aux trémolos particulièrement ultramontains, est évidement présent sur des morceaux, certes, attachant mais terriblement convenues (Tempest Calling, I Stand Alone, Sky Rider).
Toutefois c’est incontestablement sur ceux où le groupe aura su s’aventurer vers des contrés plus mystérieusement nouvelles, pour lui, que l’œuvre se révèle véritablement. Ainsi un aspect très progressif, aux parfums très seventies délicieux, se dégage d’excellents titres tels que The
Lady of Shalott ou
Ancient Spirit Rising. Dans la construction subtile de pistes où s’enchaînent diverses parties passionnantes,
Domine nous y offre l’expression la plus réussie d’un talent jusqu’alors inattendu. Sur un titre abouti tel que Another Time, Another Place, Another Space, au refrain superbe et au piano émouvant, on atteint même une sublime excellence défendue avec la sincérité admirable de la simplicité évidente et efficace. Il convient cependant d’insister sur l’aspect très « seventies », et plutôt Rock, de cette facette progressive, tant elle s’apparente peu aux caractéristiques contemporaines de ce que, aujourd’hui, on qualifie, de manière parfois galvaudé et aléatoire, de « progressif ».
Ajoutons que souvent décrié pour ces chants aux aigus extrêmes agaçants, Adolfo "Morby" Morbiducci, réussis ici notoirement à en user plus parcimonieusement.
Cet
Ancient Spirit Rising est donc une œuvre charnière qui ne convaincra pas nécessairement tous le monde. Pourtant elle s’inscrit dans la volonté estimable d’une évolution plus que nécessaire. Avec nombres de vertus, elle parvient cependant à ne pas condamner définitivement
Domine, même si il apparaît plus qu’incertain que cet opus puisse déterrer le groupe de l’abysse underground dans lequel il se trouve depuis toujours. A suivre.
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