Il nous a fallut 3 ans d’attente après la sortie de leur si prometteur EP «
Ruines Humaines », pour que
Amesoeurs nous propose enfin, quelques mois avant sa triste séparation, cet opus atypique, nous transportant pendant près d’une heure d'écoute dans leur sombre univers, à la traversée d’une ère malade dans laquelle architecture fantomatique et foule grégaire anonyme se marient au son des plaintes machinales d’une atmosphère industrielle et psychédélique.
Nous avons devant nos yeux une pochette qui décline à ravir un paysage des plus atmosphériques. Quelques silhouettes d’immeubles, happées au sein d’un halo mystérieux, font corps dans un paysage sombre et apocalyptique, laissant place au bas de l’image à la timide signature du quatuor.
Le disque entame à peine son premier tour, que le son éthéré et insidieux d’une machine inaugure par son soupir plaintif le morceau « Gas in Veins ». Un riff répétitif, minimaliste et mélodieux, se morfond progressivement à une cacophonie de guitares à distorsions menées par une batterie de plus en plus cinglante et astringente. L’auditeur croule peu à peu sous le poids de l’atmosphère, laissant entendre les quelques dires confus d’un homme perdu au sein de ce méandre pathologique.
Au fil de l’écoute, nous croyons lever les yeux afin d’y capter une quelconque lueur d’espoir, mais l’ambiance pathologique et inhabitée des morceaux nous cloue au sol. La voix d’Audrey Sylvain reflète indéniablement, par sa lassitude et sa sincérité, le côté dépourvu brodé tout au long de l’album. Les bruits grinçants de ferraille, machinaux et redondants, se décuplent au son d’une batterie frénétique accompagnée par les riffs décisifs des guitares à distorsions.
La voix de Neige, présente sur certains morceaux tels que « Recueillement », ou bien « Aux Crépuscules de Nos Rêves », englobe l’atmosphère dans ses cris froids et déchirants, tout en effectuant un contraste avec les mélodies à la fois planantes et disgracieuses. Ainsi, certaines pauses musicales sont intelligemment enchevêtrées, proposant quelques notes éclairées, accompagnées par un chant féminin planant. Certains morceaux, indéniablement ancrés dans un registre Post-Rock, permettent de verser un peu d’eau dans le cocktail, tout en évoluant vers un Shoegaze électrifiant. De ça et là, les soupirs désenchantés des mélodies s’imposent en une sorte d’ode méditative. On pense au morceau «
Trouble », placé stratégiquement au centre de l’album, faisant planer sur nos têtes quelques notes de piano telles de gros nuages menaçants, avant de nos brusquer par un psychédélique « I
XIII V XIX XV V XXI XVIII XIX – IX XIX – IV V I IV ».
Les paroles sont relativement simples à comprendre au fil de l’écoute en ce qui concerne le chant clair d’Audrey, et refléchissent une vision misanthropique et critique de cette société urbaine malade, victime de sa propre population, insignifiante et déshumanisée.
Nous finissons l’écoute de cet opus en beauté, avec « Au Crépuscule de nos Rêves », mené de façon virtuose par les accompagnements musicaux, qui se déclinent face-à-face avec les cris désemparées de Neige. Après cette longue écoute de plus de 10 minutes, le morceau se tait finalement au sein d’une masse industrielle démente, concluant l’album de façon très psychédélique, tout en ayant étayé jusqu’au bout nos oreilles de mélomanes à travers de merveilleux passages mélodieux.
Regroupant quatre grandes silhouettes du Black avant-gardiste,
Amesoeurs a réussi haut-la-main à faire de cet album un incontournable du genre. Ce chef-d’œuvre ne s’écoute pas, il se savoure dans la noirceur de notre âme, empoisonnée irrémédiablement au sein d’une ère malade, dans laquelle ses villes tapissent leur aura tout en laissant le ciel illuminer nos têtes par des rayons d’espoir…
En tout cas pour moi un beau 20/20, seul chose qui me chagrine c'est la fin de troubles qui me cassent vraiment les oreilles
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