Tout droit venue d'Autralie, une œuvre nouvelle se dessine dans le paysage luxuriant du metal symphonique à chant féminin actuel. Une de plus, me direz-vous ? Et vous auriez raison. L'histoire tendrait-elle donc à se répéter pour la énième fois à l'aune de cette fraîche production ? A la lumière d'un regard porté sur le projet insufflé par ce trio en provenance de Sidney, nous verrons ce qu'il en est précisément et s'il a pu se distinguer de ses homologues stylistiques.
Oberon nous entraîne dans son sillage à l'instar de cet EP auto-produit de dix-huit minutes sur lesquelles évoluent pas plus de quatre titres. A l'instar de l'artwork de la pochette, plutôt sobre dans sa palette graphique et dans son concept, on comprend que la petite galette vise à la sincérité du fond et à l'harmonie des formes, c'est-à-dire, à l'authenticité de son message délivré. Aussi, la chanteuse à la voix limpide Lisbeth Rowe, la claviériste Natalia
Rosenfeld et Lachlan Blackwood, aux guitares et à la programmation ont uni leurs forces dans ce dessein. Le combo nous offre ainsi un metal symphonique incluant de belles lignes mélodiques, quelques éléments techniques bien disséminés, une cohésion instrumentale sans failles. Enfin, la diversification rythmique qui s'y déploie est à l'image de l'inspiration des compositions et de la finesse d'écriture des paroles.
Le plus énergique moment de la rondelle s'avère immersif par sa rythmique quasi magnétique. C'est précisément par là que commence le premier coup de pinceau de l'album. Ainsi, l'entame «
Fallen World », typiquement metal symphonique avec des effets d'orchestration octroyés par des arrangements de bonne facture, est dans cette veine. Ce titre magmatique vrombit au rythme d'un tapping rageur, de riffs incisifs et d'une entraînante et inlassable cadence. De leur côté, les couplets sont agréablement mis en relief par les claires envolées, non lyriques, de Lisbeth, dans la lignée d'
Apparition. Quant aux refrains, ils se révèlent incitatifs à l'adhésion, notamment par le chemin harmonique habilement gravé. Enfin, un pont instrumental aux sonorités synthétiques s'installe avant que l'interprète ne reprenne de plus belle le flambeau sur le refrain, le titre finissant en apothéose. On comprend dès lors que l'accueil de l'auditeur s'effectue déjà sous les meilleurs auspices.
Dans une lignée mélodique accessible, certains moments pleins d'allant n'ont pas manqué à l'appel. A commencer par l'affriolant « The Bitter
Decay », calibré tel un hit, avec ses couplets délicatement colorés et ses refrains catchy. On reste dans l'esprit d'
Apparition, notamment sur le plan vocal, toujours calé sur d'aériennes inflexions octroyées par la belle. On ne lache pas la ligne mélodique d'un pouce sur cette piste qu'on aurait aimée un poil moins brève. De son côté, «
Ghost Waltz » nous invite avec des gouttes de notes au piano, mais densifie progressivement son univers symphonique et rythmique. On accélère donc le pas, mais sans y perdre en qualité mélodique, sur les couplets comme sur les refrains. On ne reste pas non plus insensible aux caresses du timbre angélique de la déesse, non sans rappeler
Arven cette fois, contribuant à magnifier chaque note de cette partition de sa suave présence. Difficile d'échapper à l'impact atmosphérique de ce titre aux arpèges bien sculptés, où virevoltent des séries de notes au piano, finissant au son cajoleur d'une boîte à musique.
Des espaces rythmiques plus feutrés ont aussi été pensés et mis en exergue. Une fondante ballade nous est ainsi proposée sur «
The End of All Things », où l'éveil instrumental s'effectue en douceur. Un piano/voix sculpte les mots bleus de cet instant fragile. On perçoit alors le coffre vocal générant des séries de notes finement ciselées de bout en bout de cette pièce d'orfèvre. En outre, une cadence réfrénée nous permet de suivre les pénétrantes ondulations de la sirène tout le long de la sereine plage. Un break survient comme pour mieux réenclencher la lumière mélodique du refrain qui s'ensuit. Moment de félicité aux nuances de tonalité avérées et finissant sous l'impulsion de fines perles de pluie au piano. C'est dire que cet instant ouaté joue avec nos émotions pour mieux les capturer.
Au final, ce projet séduit par ses ambiances symphoniques et mélodiques invitantes, ses magnétiques accords, une onde sirénienne apte à nous faire frissonner. Il n'est cependant pas novateur dans son principe d'émission, ce schéma artistique ayant déjà été exploité par d'autres formations, comme
Apparition,
Arven,
Forever Slave ou
Angelical Tears. On aurait aussi pu souhaiter davantage d'audace, par des soli de guitare, quasi inexistants ici, par des joutes oratoires, des complémentarités vocales, avec ou sans choeurs, par exemple. Sans réelle prise de risques, ni originalité dans le concept, l'opus risque de ne pas requérir l'attention d'un auditorat aussi élargi que souhaité. Par ailleurs, si les arrangements ne sont pas à mettre en cause, ni les enchaînements, par contre les finitions et le mixage devront encore faire preuve de davantage de discernement pour nous impacter plus largement.
Cela dit, les amateurs de metal symphonique mélodique à chant féminin y trouveront de quoi satisfaire quelques aspirations du moment. A condition de ne pas succomber à la tentation de la comparaison avec des groupes plus aguerris dans cet exercice, on pourra se laisser transporter par ces quelques minutes aptes à l'éveil d'authentiques plaisirs. D'ailleurs, on ne quitte pas aisément le fil de l'écoute de la rondelle, et on se surprend à remettre le couvert.
On comprend que nos acolytes ont cette capacité d'enivrer nos sens pour nous transporter loin des contingences matérielles. Ainsi, malgré quelques imperfections de production émaillant ce premier projet, la sauce prend. Animé d'une ambition d'évolution accolée à son oeuvre, le groupe pourrait à terme proposer un album full length, où il s'y exprimerait plus largement. On attend donc la suite du programme non sans une certaine impatience...
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