Pas moins de deux ans ont été nécessaires au groupe pour concocter cet album, fortement attendu par ses fans, depuis leur précédente production "The
Fatal Kiss" (2009). Le style propre au groupe reste identifiable autant que l'ambiance musicale dans laquelle il inscrit son empreinte vocale. C'est dans ce contexte global que le quartet allemand de Métal Symphonique nous gratifie ici d'un opus énergique et généreux de plus de 65 minutes dans lesquelles s'inscrivent pas moins de 15 titres, dont 3 bonus, et non des moindres. Remarquons au passage que le line-up du groupe est resté inchangé, et ce, depuis le début de leur aventure, qui a démarré en 2005. Ainsi, on y retrouve la charismatique chanteuse coréenne Ji-In Cho, le guitariste Chris Siemons, le bassiste Frank Stumvoll et le batteur S.C. Kuschnerus dans un album solide techniquement, cette fois encore dans un style typiquement
Metal Symphonique mais se nourrissant également d'influences Pop/Rock sur certains titres. On mentionnera aussi une forte présence des chœurs, assurés par le groupe lui-même d'ailleurs, et qui contribuent à conférer à l'ensemble beaucoup de profondeur.
On y reconnaît bien la patte de velours de Ji-In, que ce soit au chant, avec sa voix relativement douce, à la tonalité un tantinet acidulée, sans délivrer de réelle puissance mais souvent pleine de nuances, ou au piano, instrument sur lequel ses doigts glissent allègrement et avec brio.
Cet album nous révèle un combo qui, au fil du temps, a progressé tant au niveau de la qualité de ses compositions, des arrangements que des textes et des parties vocales qui, ici, se conjuguent à merveille. De ce conséquent travail de studio en ressort un opus finement ciselé, instrumentalement convaincant et à la structure orchestrale parfois complexe, le tout distillé avec la délicate empreinte vocale de leur talentueuse et inconditionnelle interprète.
Globalement, le groupe signe là un opus assurément dynamique et de bonne facture duquel émanent quelques pépites, une kyrielle de morceaux tout à fait dignes d'intérêt et quelques titres un peu en-deçà de ces compositions. Sans être inintéressants pour autant, loin s'en faut, ces dernières ont moins retenu mon attention.
Bien que différents autant de par leur teneur rythmique qu'atmosphérique, quatre titres-phares me semblent se détacher. J'ai retenu : "
Live To
Fight Another Day" ; "Victoria" ; "(How can something so good)
Hurt So Bad" et "
The Eye Collector".
Le premier démarre par une douce introduction avant de nous immerger rapidement dans une rythmique typiquement Métal Symphonique, lourde et entraînante à la fois, sur laquelle vient se greffer la voix cristalline de Ji-In. Les couplets comme les refrains sont taillés à la perfection, à l'instar d'une légère et très belle mélodie d'inspiration Pop. Quelques breaks et même un brillant solo de guitare viennent compléter le tableau de ce titre "tubesque" et addictif à souhait.
Dans un registre plus Rock, on retrouve avec plaisir l'immense chanteuse de métal
Doro Pesch en duo avec Ji-In sur l'imposant "Victoria". Sur fond d'orchestration puissante et sous l'impulsion d'une rythmique enjouée, leurs lignes vocales se complètent véritablement, entre la voix rauque et puissante de
Doro et celle de Ji-In toute en finesse et en nuance. La ligne mélodique, de son côté, ne faiblit pas et les refrains catchy nous incitent à les suivre dans leurs prestations. Dommage cependant qu'en conclusion de ce titre la chute soit aussi brutale! C'est dire qu'on aurait aimé plus de finition, comme une belle dégressivité instrumentale, par exemple, en fin de titre.
Sur un plan plus atmosphérique, "(How can something so good)
Hurt So Bad" est un modèle de ballade où la voix de Ji-In sait nous émouvoir sur chaque note qu'elle délivre avec toute la sensualité de son timbre pastel. Les premiers accords de guitare acoustique, tout en douceur, nous orientent vers une agréable mélodie à laquelle concourent les magnifiques refrains. La richesse des harmonies est renforcée par les chœurs venant se greffer à l'ensemble à mi-morceau. On en ressort conquis par tant de qualités vocales et instrumentales déployées.
Que dire de l'étrange et paradoxal "
The Eye Collector", sinon qu'il se plait à cultiver les contrastes sur une piste de plus de 11 minutes? L'ouverture marque par ses saccades rythmiques, ses notes de guitare torturées, son climat atmosphérique perturbé. Sur le plan vocal, ce sont les trois musiciens du groupe qui interviennent successivement en début de morceau. Dans cette phase, peu ou pas de réelle mélodie se dégage. C'est alors que se fait entendre avec délice une douce voix féminine comme miraculeusement venue des cieux. La chanteuse fait ensuite place à la musicienne de talent qu'elle est pour nous offrir une variation de Beethoven au piano (Sonate n°14, Op.27, No2) à couper le souffle! La guitare prend alors le relai, comme pour contraster encore avec les passages précédents, à laquelle se superposent les choeurs dans un ensemble harmonieux. La rythmique accélère alors la cadence avant de céder le pas aux dernières notes classiques de Beethoven. Une véritable fresque musicale que nous propose là le combo!
Une seconde salve de 6 titres intéressants par bien des aspects peut être relevée, parmi lesquels on compte : "As I Slowly
Bleed" ; "Fly Away With Me" ; "
Eyes Of a
Stranger" ; "Turn The World Around" ; "
Liberatio 2011" et "Come
Hell or High Water".
Les trois premiers dépassent le cadre strict du
Metal pour aller en partie vaquer sur les terres du Rock. "As I Slowly
Bleed" capte l'attention, à la fois par son rythme plein d'entrain et par la beauté de ses refrains amplifiés par l'omniprésence des chœurs, même si la ligne mélodique aurait pu être mieux assise encore. Sur une mouture "guitaristique" proprement
Metal, la batterie se fait légère, à l'image d'une fine structure acoustique Pop. De son côté, "Fly Away With Me" joue également la carte de la mixité stylistique. Les guitares saturées se conjuguent à une alerte rythmique Rock pour nous plonger au cœur d'un morceau aux qualités mélodiques, vocales et techniques irréprochables. Les harmonies auraient cependant pu être enrichies encore un peu plus pour faire partie des morceaux dominants de l'opus. "
Eyes Of a
Stranger" s'inscrit lui aussi parmi les titres mixtes. Si l'ambiance de fond reste fondamentalement propre au
Metal Symphonique, le rythme s'inspire clairement du Rock. Ce morceau aux couplets et refrains plutôt bien ciselés se cale sur la puissance des chœurs pour susciter l'adhésion. Si l'exercice de style séduit, la ligne mélodique reste toutefois un poil trop linéaire pour pousser à l'addiction.
Quant à "Turn The World Around", il se place dans une lignée
Metal Symphonique avérée. Délivrant de solides couplets et de jolis refrains, ménageant également un break au sein d'une imposante orchestration pour mieux repartir ensuite, ce morceau ne tarit pas de qualités mélodiques non plus. Il lui manque peut-être un petit supplément d'âme pour se hisser parmi les tops de l'opus.
Enfin, on retrouve "
Liberatio 2011", titre éponyme repris de leur premier album
"
Liberatio" (2005) et réactualisé. Il s'agit d'une belle ballade, à la rythmique dépouillée et à laquelle répond une grande richesse des harmonies habilement servies par la chaude voix de Ji-In. Dans un même mouvement "Come
Hell or High Water" sonne comme un bel hymne de clôture de l'album. Cependant, ces deux titres auraient pu bénéficier encore de davantage de coloration mélodique pour convaincre.
Parmi les titres qui peinent un peu plus à se hisser au rang des morceaux dominants, on trouve, par exemple : "
Messiah" qui est le morceau d'ouverture de l'album. Il s'agit d'un titre
Metal Symphonique classique, au tempo rapide et avec une présence non sans intérêt des chœurs. Toutefois, la mélodicité proposée demeure mal assurée et sa structure instrumentale trop linéaire pour nous embarquer tout de go dans le vaisseau amiral de l'extase. Même remarque pour "You Killed Me". Pourtant rythmiquement entraînant et plutôt bien chanté, que ce soit par Ji-In ou par les chœurs, cette fois, la mélodie est loin d'être catchy et l'ennui peut finir par guetter! On retiendra encore dans cette catégorie de morceaux : "Get
The Hell Out Of My Way 2011". Ce titre réarrangé émane lui aussi de leur premier album plus haut évoqué. Ce puissant morceau offre également de beaux refrains, interprétés avec justesse et délicatesse. Malgré ces qualités, on se retrouve un peu désemparé d'un point de vue harmonique pur. Du coup, d'après moi, on n'accroche pas nécessairement à l'instrumentation et la concentration d'écoute peut alors s'envoler!
Les titres qui me sont apparus les moins aboutis sont : "Thanks For
Nothing" et "Higher". Le premier utilise le tapping de manière intéressante mais quelle platitude mélodique! Trop peu de modulations pour recueillir l'adhésion! Pour le second titre, malgré une intro piano/guitare soignée, les refrains ratent leur cible autant que la structure harmonique d'ensemble. De plus, trop d'approximations techniques émaillent ce morceau et nous laissent finalement sur le carreau.
Au final, on a le sentiment d'écouter un album d'envergure d'un groupe qui a su faire mûrir son projet. L'agrément d'écoute que procurent la plupart des titres de cet opus témoigne d'un bel effort de production de la part du combo. A défaut de nous offrir la perle rare, le groupe parvient néanmoins à nous séduire sur de nombreux titres, et même à nous happer littéralement, par quelques traits de génie, sur quelques-uns d'entre-eux. Un album qui devrait à la fois satisfaire les exigences des fans du groupe, intéresser les amateurs de
Metal Symphonique et constituer une jolie découverte pour les autres!
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