A la simple vue de la pochette, on se dit « tiens, en voilà qui nous refont le coup de
Led Zeppelin avec Physical Graffiti ». En effet, rappelez-vous ce visuel en façade d’immeuble permettant d’apercevoir à chaque embrasure de fenêtre une photo différente selon que l’on introduisait une des deux faces de la pochette intérieure. Moins évident à faire désormais à l’ère du numérique.
En attendant, au siècle dernier, en l’an de guerre 1987,
Zoetrope s’en fiche et nous propose une pochette à trous, bien plus larges et donc un poil plus fragile, qui subira inexorablement les affres du temps. A la différence du Grand Dirigeable, les 4 gars de Chicago préfèrent rendre un vibrant hommage à quelques gloires locales comme John Dillinger, Charles « Pretty Boy » Floyd, Al Capone, George «
Machine Gun » Kelly et George « Baby Face »
Nelson. Une bonne rasade de textes imprégnés de la période des gangsters et de la prohibition et «
A Life of Crime » sera mis en boite entre février et mars 1987 au Music
Grinder d’Hollywood sous la houlette du fameux
Randy Burns (
Megadeth,
Nuclear Assault).
Cet exil en Californie pour enregistrer l’album étonne, tant l’histoire de
Zoetrope, prononcez ETROP s’il vous plait, se confond avec la ville de l’Illinois. Un beau jour de 1976, ça ne nous rajeunit pas, une bande d’adolescents boutonneux composée de Barry Stern (RIP), batteur/chanteur, Kevin Michael Rasofsky, guitariste, et Calvin « Willis » Humphrey, bassiste, créent
Zoetrope pour le fun et histoire de jouer des covers des groupes de l’époque. Alors que Ken Black hérite du poste de second guitariste, le groupe se lance dans la composition d’un répertoire qui mélange les influences punk de la côte Est et d’autres plus
Metal.
Zoetrope devient coutumier de la scène hardcore punk et partage l’affiche des bars et des salles underground de Chicago. Après avoir autoproduit dès
1980 une première démo, suivie de deux autres en 1983 et 1985, Combat Records signe enfin le groupe. Leur premier LP «
Amnesty » vit le jour en 1985 avant ce « déménagement » temporaire dans la Cité des Anges pour travailler sur les 9 titres de Hardcore Street
Metal de cette seconde galette. Malgré les crédits sur la pochette, toutes les parties de guitare ont bien été enregistrées par Ken Black ainsi que le chant de « Unbridled
Energy », avant son retour précipité à Chicago pour soigner son addiction à des substances interdites. Son remplaçant n’est autre que Louis Svitek que l’on connaitra plus tard pour sa participation au sein du M.O.D de Billy Milano.
Hardcore Street
Metal, c’est quoi ça, me direz-vous ?
Il suffit de poser les oreilles sur quelques titres pour se rendre compte que la partie Hardcore Street véhicule une dose d’énergie brute incroyable. Prenez le « Unbridled
Energy » et vous comprendrez. Une pure bombe de Hardcore transpercée d’une ligne de basse vertigineuse, d’un quasi blast de batterie et d’un riffing proche de la vitesse du son avec des vocaux qui seraient chopés au premier radar du coin. Pleine face, direct dans les conduits auditifs, ça rase tout sur son passage et basta. L’effet euphorisant se poursuit sur le divin « Prohibition », bâti de la même manière sur un rythme affolant de double grosse-caisse et de trépignement de basse. Barry Stern (RIP), de retour derrière le micro et baguettes en mains, conte le quotidien des trafiquants d’alcool pendant que le riffing en rucher d’abeille bat la mesure. Kevin et Ken donnent une teinte
Metal à leurs soli sur ce titre bref mais intense.
La démonstration continue sur «
Hard to
Survive » boosté par le refrain s’il en était encore besoin. Bien que la rythmique soit rapide, elle décuple sur le simple mot «
Survive » pour atteindre une overdose de décibels et de distorsion, dans la veine d’un
Nuclear Assault des grands jours.
Le rythme Hardcore baisse à peine pour la partie Street
Metal.
« Detention » ouvre les hostilités sur un riffing post-punk et une section basse/batterie d’où émerge le très efficace afro-américain Calvin Humphrey, aussi précis qu’un pacemaker. Chapeau bas aussi à Barry Stern (RIP) qui balance des vocaux audibles et assez clairs tout en cognant et double-pédalant sur son kit de batterie. Les deux tontons flingueurs remettent le couvert sur « Promiscuity » et son riffing nerveux et presque brutal, qui s’emballe en fin de morceau. Saluons les soli de la paire Ken Black et Kevin Michael qui se lancent dans un exercice de shred appliqué. « Pickpocket » parvient à mêler deux rythmiques qui se complètent avec d’un côté basse et guitare dans un duo metal et de l’autre le lead de guitare plus speed couplé à un coup de start donné par le futé batteur. Ajoutez un solo tout en finesse et le cachet du titre apparait.
On garde la pure partie
Metal pour la fin avec trois petits bijoux.
« Seeking Asylum » reprend les recettes d’un bon titre des Canadiens d’
Exciter. Sur un up-tempo porté par la double grosse-caisse en appui, le riff de guitare accordé un ton en dessous permet à Barry Stern (RIP) d’envoyer des vocaux guerriers et un refrain à la mélodie envoutante. Mention excellente à l’échange de soli des deux gâchettes qui ont soudainement retiré leurs attributs hardcore pour mettre cuir et clous bien en évidence.
La palme de la rythmique à la
Twisted Sister revient sans photo finish à « NASA » et sa basse au son étouffé de tronçonneuse. La batterie en contretemps se fracasse sur le riff de métallurgistes de Ken et Kevin, tout en apportant une dose de musicalité enivrante.
« Company man » aborde aussi les rivages du heavy-metal en souquant ferme sur une ligne de basse vigoureuse et un riffing lourd et agressif. Quel refrain « Work all day, you think all night, ain't gonna sign my life away, and there ain't no one as dumb as you, the company man » que martèle le regretté batteur/chanteur, crinière au vent.
Trente-cinq minutes de plaisir pour ce second album de
Zoetrope alors que 1987 vit exploser le phénomène glam rock avec Guns n’Roses en tête de gondole.
Cet album est l’ultime témoignage sonore de la formation d’origine qui se disloquera peu après le départ forcé de Ken Black. Au final, ce groupe n’aura pas été épargné par le destin comme le prouvera la mort stupide de son fondateur Barry Stern un jour de 2005.
Live fast, die young. Une vraie vie de hors-la-loi et de trompe-la-mort. Respect messieurs !
Didier – Décembre 2013
Your home was bombed
Your men all dead
Nothing left alive inside
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