Le fameux troisième album, celui qui fait chavirer les cœurs, celui qui dit si le groupe peut tenir le coup. Bon nombre de formations ont eu les yeux plus gros que le ventre, ont cru tout dévaster mais se sont ramassées ou bien ont changé de style progressivement ou radicalement. Ainsi, j’appréhendai cette troisième mouture des petits prodiges de
Veil Of Maya. Un premier album discret mais résolument destructeur, montrant le style et le potentiel des Américains malgré une production médiocre, avec un son grésilleux et tutti quanti… Deuxième galette,
The Common Man's Collapse : la révélation. À travers une prod’ de malade, le groupe a su exploser grâce à des compositions influencées par
Meshuggah et
Cynic tout en y apportant son propre style. Voici donc désormais l’énigmatique
[id].
Onze titres, vingt-neuf minutes, trois minutes en moyenne pour chaque morceau, une intro et deux interludes ; vous ne vous sentirez arnaqués que si vous vous souciez du nombre de titres/minutes/et patati et patata. Si au contraire, vous n’êtes ici que pour écouter de la musique, fermez les yeux et plongez dans l’univers de
Veil Of Maya. Car la structure de l’album, le sens de l’organisation et du timing,
Veil Of Maya s’en contrefiche. Le groupe privilégie la musique avant tout. Ainsi, on ne perçoit pas réellement une réelle tracklist durant ces 30 minutes, mais plutôt une transposition sonore, un nouveau voyage. Vous avez vu marqué ‘progressif’ ? Vous vous attendiez à de longues chansons de 6 minutes ? Passez votre chemin,
Veil Of Maya n’a que faire de s’ennuyer et de vous ennuyer avec des morceaux sans fin. Ils vont directement à l’essentiel tout en structurant chacun de leurs titres de façon logique et gracieuse.
Une introduction des plus progressives démarre pour nous chauffer, ou plutôt pour nous amener dans l’univers d’
[id] : une mélodie, une seule, suivie de très près par une saccade qui devient un doublé s’agrémentant d’un sweeping… Ça monte, ça monte et soudain nous voilà entrés dans "Unbreakable". Du VoM tout craché que cette chanson qui démarre sur les chapeaux de roues. Sonorités stridentes, déstructurées, courtes et puissantes. Les riffs et autres saccades dévastatrices s’enchainent et s’entremêlent. Mention spéciale à Sam Applebaum qui se régale à nous balancer des breaks et des parties techniques sur quasiment chaque plan ; un batteur à suivre donc. La chanson est donc fracassante, indéniablement, début d’un trip résonnant ahurissant.
Alors quelles différences entre
The Common Man's Collapse et ce nouvel opus ? Avant tout beaucoup plus technique, moins mélodieux, avec un peu moins de chant et plus de parties complexes. On pourrait donc reprocher au groupe d’être un tout petit peu trop parti dans une succession officieuse de
Meshuggah, un peu trop appuyée par des sonorités indissociables au groupe suédois. Bonus ou malus ? Pour les puristes, ceux qui ne jurent que par l’originalité etc. : malus bien sûr. Ils crieront même au plagiat. Pour les autres, pas un bonus non plus, juste un léger manque de personnalité qui faisait le charme de l’album précédent. Mais comme je l’ai dit,
Veil Of Maya a préféré le trip musical plutôt qu’un album à tubes, aussi techniques soient-ils.
Ainsi, les morceaux de
[id] sont nettement moins reconnaissables, ou plutôt mémorables. Car tout le monde reconnait indubitablement les débuts de "Mark the Lines", "
Crawl Back" ou encore le magnifique "Entry
Level Exit Wounds". Ici, le manque de mélodie concrète (j’entends par là une mélodie simple et pas créée à partir de riffs déstructurés) fait qu’on a du mal à réellement identifier
Veil Of Maya. Mais que l’on se rassure, le chant de Brandon n’a pas bronché : il est toujours aussi énergique, toujours aussi brutal, bien que je trouve ses nouveaux screams moins puissants comparés au guttural de son chant death. Face à la beauté des riffs, il faut admettre que le chant est surtout présent pour agrémenter les morceaux d’une voix, celle-ci n’étant pas vraiment indispensable.
Pour le reste de l'album, c’est toujours du lourd, le groupe enchainant un passage en quatre parties tout simplement magique. En effet, le double diptyque "
Martyrs"/"
Resistance" et "
Circle/Mowgli" est d’une puissance à toute épreuve. Placé judicieusement en plein milieu de la galette, le morceau central est précédé d’une sorte d’intro pourtant bien distincte ("
Martyrs"). Très proche d’
Obscura, le titre "
Resistance" apporte son petit lot de nouveauté pour le groupe, peut-être pas assez exploitée par ailleurs, qui ajoute du piquant aux compositions. On pense également à leur potes de
Born Of Osiris dans la deuxième moitié du titre, notamment grâce à cette nappe électronique en fond, mêlant saccades disgracieuses et mélodie enchanteresse. S’en suit donc le nouvel interlude "
Circle" suivi de près par le monstrueux "Mowgli" et le génial "Namaste" que les fans ont pu écouter en guise d’amuse-gueule. ? Et ça continue encore et encore... ? jusqu'à la dernière piste, qui se termine brutalement pour laisser encore une fois bouche-bée.
Au final,
[id] remplit des promesses que le groupe n’a jamais faites mais assure dans sa forme. Les morceaux se différencient tous mais s’enchainent telle une seule et même composition. Un album résolument à part pour le groupe, une tuerie de métal puissant, technique et mélodieux, prouvant définitivement que
Veil Of Maya est le digne successeur de
Meshuggah.
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