Cradle Of Filth+Ne Obliviscaris+Benighted Soul

the Wednesday 28 October 2015, Le Cabaret Sauvage, Paris

Deux jours avant Samhain, Paris accueille une fois de plus les vampires du Suffolk dans une salle inhabituelle (le Cabaret Sauvage est, autant que je sache, beaucoup plus connu pour ses soirées Reggae/Dub) mais dont le style convient bien à leur image : intérieur entièrement en bois rappellant un vieux pub anglo-jamaïcain, et deux squelettes cornus crucifiés de chaque côté de la scène. Les accompagnent les australiens (et un français) de Ne Obliviscaris et les français de Benighted Soul. ces derniers bénéficient d'un excellente initiative mise enplace par les anglais : Cradle Of Filth a en effet lancé un appel à candidature afin d'avoir en première partie de leur tournée européenne un talent local par pays traversé, sélectionné en personne par le groupe. Intéressé pour découvrir les lorrains, je les rate malheureusement par une conjonction particulièrement négative de divers problèmes de la RATP sur plusieurs lignes de métro à la fois... Shit happens, mais quand même...

Ne Obliviscaris

Je débarque donc en plein milieu du set des australiens, et la première constatation est que le public est plutôt clairsemé mais très réactif. ne connaissant pas du tout la musique de Ne Obliviscaris, je découvre donc un mélange de divers styles de Metal Extrême (Death, Black et Melodeath), saupoudré d'une grosse dose de Progressif et accompagné d'un violon. Techniquement, le groupe est parfaitement au point et est aidé par un bon son (on entend parfaitement la basse). Si le style ne me parle pas plus que çà, force est de reconnaître que le groupe sait très bien tenir une scène et allumer le public, lequel ne se fait pas prier pour déclencher pogos et headbanging en chaîne. Cet accueil semble plaire au groupe, qui ne se fait pas prier pour en rajouter. Au final, Ne Obliviscaris quitte la scène en conquérant : à revoir dans de meilleures circonstances (ils méritent clairement de passer en tête d'affiche la prochaine fois), et dans mon cas une bonne découverte.

Cradle Of Filth

Cradle Of Filth est un groupe atypique en ce qui concerne le live, en ce que je ne les ai jamais vu concrétiser entièrement tous les espoirs scéniques que leurs albums promettaient. Et pourtant, je les ai vu assez souvent et à chaque fois dans des conditions très différentes (en tête d'affiche, en tournée commune, en festival, en salles de tailles très variables...) et le résultat est chaque fois le même : en général, c'est assez décevant. Plusieurs raisons peuvent expliquer cela, mais j'en reviens toujours à ma favorite : voilà un groupe qui mériterait réellement une image en adéquation avec sa musique (quelque chose de décadent et d'edwardien, par exemple), qui bénéficierait énormément de matérialiser cette imagerie sur scène avec un décorum adéquat (comme avait pu le faire Therion sur la tournée Gothic Kabbalah, ou comme le font Watain ou Behemoth) mais qui préfère jouer la carte du "direct dans ta face". Pas forcément une mauvaise idée (la discographie de Cradle Of Filth regorge de morceaux assez agressifs et dépouillés qui se prêtent bien à ce genre d'exercice), mais à ce moment-là mieux vaut que le père Dani abandonne son costume de prêtre satanique qui donne à chaque fois l'impression qu'il sort d'une séance de JDR Grandeur Nature.

Et puis, évidemment, un groupe ne peut pas être mauvais ou décevant sur scène en permanence. Il va bien arriver un moment où il va nous faire un concert dont le chroniqueur va ressortir satisfait, où il va reconnaître objectivement que là c'était parfait. Pour Cradle Of Filth et pour moi, ce fût ce soir-là.

Dans un entretien récent avec lui, Dani Filth m'avait confié que la tournée réserverait quelques surprises, notamment avec des morceaux qui n'avaient été que très peu joués, certains depuis très longtemps. J'avoue que j'étais resté perplexe, tant la setlist de la récente tournée avec Behemoth (en 2014, donc vraiment pas loin) avait compensé la relative platitude scénique par des choix audacieux en terme de chansons (Summer Dying Fast, The Principle Of Evil Made Flesh, A Dream Of Wolves In The Snow, Beneath The Howling Stars, Haunted Shores et Born In A Burial Gown... Si ce n'était pas du caviar, ça y ressemblait en tout cas drôlement).

J'ai été donc très surpris, et le public (qui s'est bien étoffé depuis mon arrivée, et est l'un des plus éclectiques qu'il m'ait été donné de voir dans ce genre de concerts : bikers, coreux, true blackeux, hardos à l'ancienne en veste patchée, princesses gothiques aussi bien européennes que loligoths japonisantes, même quelques hipsters et avec une tranche d'âge allant de 20 à 50 ans sans problèmes) aussi vu le rugissement assez énorme qui l'a accueilli, d'entendre l'intro Humana Inspired To Nightmare (tirée de Dusk... And Her Embrace), complète avec bruit de pluie et de porte qui grince. Les musiciens montent sur scène et, chose curieuse, si Dani Filth est vêtu du même costume cornu (avec bâton) de prêtre satanique qu'en 2014, il lui va mieux ici : doit on mettre cela sur le compte de la taille de la salle ? Plus petit que le Bataclan, le Cabaret Sauvage permet au public d'être d'être plus proche du groupe et de communier plus facilement avec ses idoles, facilitant le contact et la mise en place d'une certaine ambiance.

L'intro à peine achevée, et c'est le classique Heaven Torn Asunder qui démarre. Remise au goût du jour sur la tournée Darkly, Darkly Venus Aversa en 2011 mais rangée au placard depuis, voilà pourtant un morceau d'ouverture de concert qui ne démérite pourtant pas. Mais le plus intéressant reste le groupe. Si Dani Filth reste égal à lui-même, alternant voix de basses et cris de harpie (que l'on aime ou non, j'estime que son timbre de voix si particulier est l'un des atouts majeurs de Cradle Of Filth et l'une des raisons qui me font apprécier le groupe), c'est clairement du côté des musiciens que se cache la meilleur surprise. Car oui, pour la première fois depuis 1998, je vois sur scène Cradle Of Filth agissant comme un vrai groupe et non pas comme un simple soutien à la carrière solo de Dani. Le duo Ashok (dont le travail dans Root a beaucoup fait pour raviver mon intérêt envers les anglais)/Rick Shaw fait plus que des étincelles, il allume des incendies. Les deux guitaristes alternent les solos, savent se mettre en avant quand Dani fait des pauses, occupent l'espace sans jamais le squatter (ils se permettent plus d'une fois de laisser le devant de la scène au bassiste Daniel Firth, qui ne se prive pas de ce plaisir) et communiquent régulièrement avec le public.

Lequel ne se gène pas pour répondre d'une manière que je ne me serais jamais attendu à voir à un concert de Cradle Of Filth : pogos violents, circle pits spontanés, nombreux slams et reprise de paroles en choeur avec Dani... Le chroniqueur a beau être un poil blasé, il lui faut reconnaître d'être impressionné de voir le public être à ce point en phase avec l'univers des anglais. Qui plus est, cet enthousiasme est foutrement communicatif et on se laisse entraîner rapidement par l'ambiance générale. Et c'est pareil sur scène, puisque l'on voit les musiciens souriants, communicatifs et clairement contents d'être là et de voir le résultat obtenu par leurs interprétation.

Après 1h10 de morceaux alternant vieux classiques dépoussiérés (Lord Abortion, Queen Of Winter, Throned) et titres issus du récent Hammer Of The Witches (Blackest Magick In Practice, Right Wing Of The Garden Triptych), Cradle Of Filth quitte la scène. mais ce n'est, évidemment, que pour mieux revenir pour un rappel qui se verra gratifié d'un titre supplémentaire par rapport à la setlist prévue (The Forest Whispers My Name, dans une interprétation plus proche de celle de The Principle Of Evil Made Flesh que de celle de Vempire) pour remercier le public : 45 minutes supplémentaires, quasiment un second concert à l'intérieur du concert, et où à aucun moment le groupe ne perd le Nord. Quand le véritable final de la soirée arrive, ça tourne presque à la bagarre dans le public pour récupérer une setlist ou un médiator, preuve que les anglais ont balayés tous les doutes que l'on pouvait avoir en début de soirée.

Je n'y croyais plus depuis longtemps, et pourtant ils l'ont fait : Cradle Of Filth a donné un excellent concert, du genre qui donne envie de les revoir sur scène et qui réveille à nouveau l'intérêt que l'on pouvait avoir envers eux. Il est indéniable que le départ de Paul Allender et l'arrivée officielle de Shaw et Ashok ont donné un nouveau souffle aux anglais, et c'est clairement le meilleur line-up que j'ai vu au groupe sur scène depuis la tournée Midian : puisse-t-il rester stable encore quelques années, que le groupe puisse nous offrir d'autres bons concerts comme celui-ci.


 

SETLIST CRADLE OF FILTH

(Intro) Humana Inspired To Nightmare

Heaven Torn Asunder

Cruelty Brought Thee Orchids

Blackest Magick In Practice

Lord Abortion

Right Wing Of The Garden Triptych

Malice Through The Looking Glass

Deflowering The Maidenhead, Displeasuring The Goddess

Queen Of Winter, Throned


 

RAPPEL

(Intro) Walpurgis Eve

Yours Immortally...

Nymphetamine (Fix)

The Twisted Nails Of Faith

Her Ghost In The Fog

The Forest Whispers My Name

(Outro) Blooding The Hounds Of Hell

 


3 Comments

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LeLoupArctique - 01 November 2015: Merci pour ce compte-rendu ! Dommage que tu aies loupé Benighted Soul, je les avais vus il y a un an, j'avais adoré.
Lloigor - 02 November 2015: Bon report, ce fut pour ma part la première fois que je les voyait, et c'était énorme !!!! Malgré le fait que la séance de dédicace avant concert était une GRROOSSE blague, le concert était parfait. Seul bémol, l'emplacement de la salle, de nuit et sans aucun éclairage, c'était pas évident
SiegfriedVX - 07 November 2015: Très bon report , comme toi bien qu'étant fan de Cradle , j'ai longtemps arrêté d'espérer les voir donner une bonne prestation en live. Après avoir vu les Stream du Hellfest et du Wacken , je me suis remis à y croire et je me suis décidé pour retenter le coup. Pas déçu du voyage , c'était énorme à tout point de vue. Et bien d'accord quand à ce line-up tout simplement magistral , on sent qu'ils se font tous plaisir sur scène.
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