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Qui a dit que les black-metalleux étaient des gens intolérants et intégristes ? Intégristes du métal peut-être mais surement pas intolérants, Nirnaeth en est le parfait exemple. Fidèle au métal old-school, ce gang lillois vient de sortir une toute première démo au style direct et incisif. Un black-metal douloureux qui fait la part belle à une armada de riffs qui sonnent comme autant de cutters se plantant dans votre épiderme. J’en ai profité pour arranger cette interview avec le guitariste Mutill et le vocaliste Zigouille en décembre 2004. On y découvre un groupe qui a des choses à dire et qui ne s’en prive pas.
>Salut, même si votre nom commence pas mal à circuler
dans le nord, je pense que peu de monde vous connaît réellement.
Pourrais-tu nous présenter Nirnaeth grâce à un historique
du groupe ?
M: A la base Malaria et moi même voulions former un groupe plus extrême
que celui dans lequel nous officions jusqu’alors (Colleen). En janvier
2002 Yamaël, suite à une petite annonce, nous a rejoint pour se
poster derrière les fûts. S’en est suivi une année
et demie de répétitions intensives avant l’arrivée
de Zigouille au chant. En janvier 2004 nous avons donné notre premier
concert ; nous en avons effectué depuis une dizaine. Les gens qualifient
notre style de black/death-metal.
>Enfin, votre première démo a vu le jour. Tu peux
nous présenter les 4 titres qui composent "Nothing But Ashes"
? Pensez-vous avoir atteint le but que vous vous étiez fixé avant
d’entrer en studio ?
M: Tous nos morceaux – et pas uniquement ceux de la demo - sont connectés,
ils suivent une trame logique. Vous trouverez les paroles du groupe sur notre
site www.nirnaeth.com. Le premier morceau s’intitule "A Pentagram
Of Flesh". Il est assez rapide, réellement agressif. Celui-ci correspond
au moment où le personnage central, après avoir connu quelques
visitations de la part de sa victime/amante, accompli une sorte de rituel qu’elle
lui dicte, afin de lui donner corps à nouveau et pouvoir lui servir de
guide. S’en suit "In Morte Vita" : les paroles ont été
écrites à partir d’autres paroles offertes par une personne
extérieure au groupe. Il s’agit alors de la prise de conscience
du pouvoir donné par la transsubstantiation réalisée ici
grâce à l’absorption de chair. J’y développe
différents concepts comme le fait que chaque mort soit une note inscrite
sur la portée de l’oubli… "Black Horde" est un
titre un peu à part. Composé il y a très longtemps, il
est une sorte d’hommage à la scène black-metal. Textuellement
il évoque l’état d’esprit du personnage central. Un
titre simple, direct et efficace. La démo se conclue par le titre éponyme
"Nothing But Ashes". C’est un constat sur notre société
et sur la crédulité humaine en général, mêlé
à une expérience assez traumatisante et très douloureuse
qui m’est arrivée il y a quelques années. Le morceau est
articulé de façon assez intéressante je pense. Il représente
les derniers instants de vie du personnage, traversant donc différents
états d’esprit, et comporte même en son sein un hommage à
peine voilé à un de mes groupes favoris : Black Sabbath. Nous
sommes assez satisfaits du résultat compte tenu des circonstances du
mixage, qui devait initialement avoir lieu dans un studio pour finalement se
faire chez moi. Nous aurions juste nettement préféré la
sortir au mois de mars/avril comme nous l’imaginions alors.
>La production est très underground. Pourtant c’est
au Lb Lab que vous l’avez enregistrée. Que s’est-il passé
?
M: En fait du LB lab nous n’avons utilisé que les locaux : l’ingé-son
qui nous a enregistré en mars l’a fait avec son propre matos, puis
devait mixer le tout dans le stu
dio. Malheureusement il y a eu quelques complications,
et nous avons mis du temps avant de pouvoir remettre la main sur les bandes.
Le mixage s’est finalement effectué chez moi. "Nothing But
Ashes" n’a donc plus aucun rapport avec le LBlab, si ce n’est
que c’est là-bas qu’a eu lieu l’enregistrement, dans
une des salles de répèt que nous fréquentons régulièrement.
D’ailleurs on tient à saluer tout le monde du LB, et en particulier
Gus !
>Votre black-metal sonne old-school, crade et malsain. Quelles sont
vos influences ? Moi je vous rapprocherais plutôt d’un groupe comme
Enthroned mais alors avec un coté plus heavy-metal (le riff de "In
Morte Vita" notamment) ?
M: C’est vrai qu’Enthroned fait partie de ces groupes qu’on
adore et qui pratiquent un black-metal intègre ; il nous arrive d’ailleurs
d’en faire une reprise, le terrible "Throne to Purgatory". Quant
au côté plus heavy il est indiscutable : je suis un grand fan de
Judas Priest, Iron Maiden, King Diamond, etc... Tout cela se ressent bien évidemment
dans les compositions mais aussi dans la manière de jouer. Chaque membre
de Nirnaeth est fan de "vrai" métal.
>La voix de Zigouille a un impact énorme sur votre black-metal.
J’aimerais savoir où il puise sa rage, ce qu’il ressent lorsqu’il
crache sa haine par l’intermédiaire de son micro ?
Z: Arg… merci. Il me suffit de prendre le micro, d’entendre un larsen
et c’est la boucherie. Ressentir cette musique et pouvoir l’interpréter
t’incite à donner tes tripes ou celles de quelqu’un d’autre.
C’est tellement jouissif d’assener des paroles comme un furieux,
si le public est réceptif, il n’est rien qui puisse plus me transcender,
à part une femme. Notre but étant d’inspirer le chaos total
et la déchéance il nous est facile de laisser libre court à
nos pulsions ; pour ma part je fais du métal pour instaurer une ère
de débauche où le vice serait loi. Alors, la rage vient.
>Personnellement je trouve qu’afficher son satanisme comme
une preuve de rébellion est plutôt futile. Autant dans des pays
de l’ex-bloc de l’Est ou en Amérique du Sud, ces endroits
où la religion a gardé un rôle immense dans la société,
ça peut être réellement subversif. Autant chez nous, dans
les pays d’Europe occidentale où la religion n’a plus le
poids qu’elle avait dans le passé, ça me parait obsolète.
Que réponds tu à ceux qui pensent comme moi ?
M: Je ne sais pas si on peut réellement dire que Nirnaeth affiche son
satanisme. Nous ne sommes pas un groupe à la Dark Funeral où vénérer
satan est le thème central de chaque morceau. Certes nous avons une imagerie
qui s’y rapporte mais ce n’est pas là notre motivation :
on ne fait pas de musique pour véhiculer un quelconque message ou faire
du prosélytisme, mais bien pour la musique elle même, dans une
démarche purement esthétique, en y incluant notre propre vision
des choses et notre propre façon de les ressentir. Evidemment il y a
toujours un message qui transparaît, volontairement ou non, mais il n’est
pas notre fin. Il est juste le fruit de nos frustrations, de notre colère,
bref de nos sentiments. Quant au poids de la religion je pense qu’il est
toujours présent, sous une forme plus perverse parce qu’indirecte.
Et c’est même peut être pire, cela signifie que des comportements
induits par des croyances deviennent "normaux"… Je me qualifie
moi-même d’athée militant et combat chaque jour toute idée
de dieu, de superstition.
>Déjà lorsque j’avais reçu une de vos
cassettes de répétitions, j’avais trouvé que vous
pourriez tiré avantage d’un second guitariste (notamment sur le
début de "Nothing But Ashes"). Ça n’est toujours
pas à l’ordre du jour ?
M: Non. Nous tenons à garder le caract&
egrave;re brut, avec une formation
métal classique : une basse, une batterie, une gratte, une voix et rock
n’ roll. Pas d’artifices ni de fioritures.
>Récemment vous avez joué à Paris avec notamment
Vorkreist. Ça a été une bonne expérience ?
M: Notre avis sur la question est mitigé. L’organisation était
impeccable, les groupes vraiment bons, mais nous n’avons pas retrouvé
l’ambiance des concerts réalisés jusqu’alors où
l’entente entre les groupes a toujours été excellente. Quant
au public si lorsqu’on jouait il avait l’air d’apprécier,
de mauvaises critiques à notre égard sont apparues par la suite…
Je dirais donc qu’il nous faut y retourner jouer le plus rapidement possible
pour bien leur expliquer qui on est !
>L’image subversive et provocante que véhicule le black-metal
n’est-elle pas un désavantage lorsqu’il s’agit de trouver
des endroits pour jouer ? Mis à part l’asso Whispering Wolves qui
vous a trouvé pas mal de dates dans le Nord, ça ne parait pas
évident de trouver des endroits pour jouer ?
M: C’est vrai qu’il devient de plus en plus difficile de trouver
des endroits où jouer, heureusement que certaines assos se cassent le
cul pour en organiser. Faire une musique extrême et par la même
non populaire donne lieu à des complications, de par la méconnaissance
du style et les décibels que ce dernier engendre... Ça limite
le choix. De plus il n’existe plus de petites salles dédiées
aux concerts, le plus souvent nous sommes amenés à jouer dans
des bars spécialisés dans le rock ou le métal.
>Vos projets actuels, quels sont-ils ?
M: Nos projets sont les mêmes qu’au début : notre objectif
a toujours été de faire un max de concerts avec un max de groupes
et de sortir des albums de qualité, pour lesquels nous avons déjà
pas mal de matériel. Pour cela un label nous serait de grande utilité
et nous sommes à l’heure actuelle en train d’étudier
des propositions. Nous sommes constamment à la recherche de dates.
>Ton avis sur la scène black-metal française ? Que
penses-tu des branleurs qui prônent le fascisme et le néo-nazisme
en dogme idéologique ?
M: Je pense que notre scène se porte plutôt bien ! Il existe de
nombreux groupes de qualité en France et qui en plus proposent tous quelque
chose de différent. Me viennent à l’esprit des groupes comme
Otargos, Anorexia Nervosa, Malleus Maleficarum, Temple of Baal, etc... Rien
que dans notre région sévissent d’excellents groupes comme
Fera, Gokstad, Ancêtres, Excruciate 666… En plus se sont des mecs
sincères et vraiment sympas ! Quant aux groupes de NSBM, c’est
un phénomène que je ne comprend pas. A mon avis la musique (comme
toute forme d’art) doit être pure, sans démarche commerciale,
sans contrainte, sans censure, totalement libre. Chercher à faire de
l’art uniquement dans le but de propager une idée quelle qu’elle
soit est faire fausse route. Je ne dis pas que créer et tenir un discours
sont incompatibles, l’art est aussi une forme d’expression et tout
artiste véhicule un message. Je dis juste que cela ne doit pas être
le sens premier de la création. Il ne fallait pas être musicien
mais politicien ou journaliste ! Le fait qu’une tendance idéologique
cherche à s’approprier une forme d’expression me paraît
insensé car l’art est universel. De plus prôner un régime
totalitaire est l’antithèse de mes convictions : j’en appelle
sans cesse au libre arbitre, à l’éveil de l’individu
englué dans une masse amorphe…
>Merci pour tes réponses, je te laisse le mot de la fin…
M: Merci à toi pour l’interview, total support In Extremis ! Venez
aux concerts, achetez des cd, buvez de la bière et soutenez notre putain
de scène underground!











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