Maudits (FRA-1)

 

Le post metal de Maudits s'exprime sans tapage, de manière quasi-exclusivement instrumentale, entouré de mystère, à l'image de son emblème, un trèfle à quatre feuilles amputé. Après un split EP avec Saar en 2021, et il y a un an un deuxième LP "Précipice" aussi lourd qu'éthéré, le groupe revient avec son troisième et nouvel album "In Situ", à paraître chez Klonosphère le 7 novembre 2025. J'ai pu leur poser quelques questions pour tenter de lever le voile.
(propos recueillis par JeanEdernDesecrator)

 

AU DELA DU PRECIPICE

JeanEdernDesecrator (Spirit Of Metal): Votre précédent album "Précipice" remonte à l'an dernier ; et voici déjà "In Situ" douze mois plus tard. Que s'est-il passé pour vous entre temps ?
MAUDITS - Olivier (guitares et effets) :
Beaucoup de choses ! On a eu l'opportunité de faire pas mal de dates pour défendre "Précipice" ! En premier lieu, une mini tournée Franco / belge en compagnie des frangins de PARLOR puis d'autres beaux concerts en ouverture de Godspeed you! Black Emperor ou encore Klone. L'album a été très bien reçu et on continue de faire grandir le projet en travaillant avec envie. 
On adore créer et on ne s'arrête jamais de composer. “In Situ” devait être à la base un gros EP qui a finalement naturellement muté en album, car comme d'habitude, on s'est laissé emporté par la passion,  haha ! 

 

JeD (SOM): Vous avez officiellement intégré un nouveau membre, Raphaël Verguin au violoncelle ; il avait déjà participé à l'album précédent. Pouvez -vous nous dire comment cela s'est fait ?
Maudits :
Raphael joue plus exactement avec nous depuis notre deuxième sortie "Angle mort", et jusqu'à "Précipice" il a toujours été crédité comme musicien de session. Au fur et à mesure de nos collaborations, il a pris grâce à son talent et la pertinence de ses arrangements /idées, une importance capitale dans la construction de notre matière musicale . Le moment de "valider" concrètement cet investissement et tout ce qu'il apporte, en lui proposant de figurer sur les photos promotionnelles d’”In situ” s'est donc naturellement imposé à nous. Et humainement c'est un gars en or, passionné et sans ego mal placé, ce qui est rare de nos jours. L'avoir avec nous est une chance. 
En revanche, nous ne jouons en live avec lui qu'à titre exceptionnel, et essentiellement sur le format duo /trio acoustique qui sied bien mieux à son instrument. Il n'est pas exclu que l'on fasse des concerts en configuration électrique un jour en sa compagnie si l'occasion se présente, mais c'est logistiquement compliqué à organiser. Donc nous verrons selon les opportunités ! 

 


UNE FACETTE PLUS URBAINE

 

JeD (SOM): "In Situ" montre une facette plus urbaine de Maudits : est-ce un concept ou un cadre pour ce nouvel album ?
Maudits :
Oui l’approche visuelle est différente cette fois-ci, par volonté de changement mais aussi parce que ce thème urbain était plus proche du concept musical, et il reflète la manière dont à été conçu cet album. “In Situ" est une locution latine qui se traduit comme "sur place", qui désigne une opération ou un phénomène observé à l'endroit où il se déroule, sans le prélever ni le déplacer. 
Les morceaux (excepté "Fall Over" datant des sessions de "Précipice") ont été composés et enregistrés / arrangés très spontanément et dans la foulée, donc d'une certaine manière : “In Situ”! L'approche a naturellement été plus organique et “terre à terre” et nous voulions aussi traduire cela visuellement. Le meilleur exemple est l'interlude acoustique éponyme. Je tenais vraiment à l'enregistrer en live et en extérieur, one shot, avec juste des micros posés devant la guitare acoustique, le violoncelle, en gardant les bruits environnants. Il illustre parfaitement l'approche de cet album, le lâcher-prise et la volonté de laisser naturellement couler la musique sans la filtrer avec notre besoin de contrôle, et nos peurs de mal faire. le concept de l'artwork avec ce trèfle qui continue de vivre au milieu d'une ville abandonnée, où la végétation reprend progressivement ses droits nous paraissait parfaitement adapté. 


JeD (SOM): Je trouve que votre musique est très évocatrice, elle appelle des images, des visions... par exemple "Précipice" me donnait l'impression d'un voyage seul dans une nature luxuriante et menaçante, loin de la civilisation. Qu'est-ce que vous voulez créer lorsque composez, qu'est-ce qui vous inspire ?
Maudits :
Nos idées naissent de différentes manières. Cela peut partir d'un son, d'un rythme, d'un arpège ou d'une mélodie qui nous plaît, et qui sert de rampe de lancement à la construction d’un morceau complet. On est inspiré par notre état et nos envies du moment, et on cherche juste à créer la musique qu'on a envie d'entendre, sans filtres, cadre préconçu ou obligation structurelle. C'est pour cela qu'on se retrouve régulièrement avec des plages dépassant les 9/10 minutes haha! 
Effectivement ce type de musique crée des images mentales qui sont différentes pour chacun, et on tente avec nos propres sensations de l'illustrer avec nos artworks. 


JeD (SOM): Comment s'est passé le processus d'enregistrement ? J'ai vu dans les crédits que cela s'est fait dans plusieurs lieux et il y a des musiciens additionnels ...
Maudits :
En effet ce fut un sacré bordel pour notre producteur Frédéric Gervais de tout centraliser car les sources étaient multiples, et aucun instrument n'a été enregistré au même endroit haha 
Pour la faire courte et le plus clair possible :
- Les guitares ont été enregistrées en Normandie chez notre 2ème ingé son/arrangeur Emmanuel Rousseau qui s'est également occupé des claviers dans son studio. 
- La basse en Belgique chez Paul Minetto notre ingé live
- La batterie sur trois sessions différentes par Thomas Dupuis à Reims (sauf pour Fall over dont les prises batterie/ basse datait dès sessions de précipice fin 2022)
-Le Violoncelle brut directement à domicile par Raphael puis traité post production. 
-Et enfin les guests chant Olivier Lacroix (“Carré d'as” et Mayline Gautié ( “Roads”), ainsi que les guitares /basses de Yan Desti et Boris Patchinsky (Parlor /Saar) ont tous été enregistrés dans des studios différents. 
Les choses se sont faites comme cela car nous avons fait avec les créneaux disponibles de nos collaborateurs, et vu que tout le monde habite dans des régions différentes c'était beaucoup plus simple logistiquement. 
On tire notre chapeau à Frédéric Gervais qui à réussi brillamment à rendre tout cela cohérent ! 

 

 

 

JeD (SOM): L'artwork de "In Situ" illustre vraiment bien votre album, je trouve. Il marque une cassure par rapport aux précédents, ce n'est plus Dehn Sora qui l'a réalisé, mais Guillaume Ringaud...
Maudits :
Oui tout à fait, comme dit plus haut ça marque une volonté de changement de notre part . Le travail de Dehn Sora est incroyable et il restera toujours un proche du groupe, mais il était moins disponible au moment où nous nous sommes attelés aux visuels. Le choix de Guillaume s'est fait naturellement car nous avions déjà travaillé avec lui pour le Split avec Saar. C'est un jeune gars très doué, efficace et on adore son boulot. Son style convenait parfaitement avec ce qu'on avait en tête et on est enchanté par le résultat. Il a sa patte bien à lui et c'est ce qu'on recherche chez un artiste. Nous lui avons juste donné le concept de base, Raphael notre Violoncelliste nous a d'ailleurs beaucoup aidé à faire le tri dans les idées, et Guillaume a laissé parler son inspiration. 

 

EXPERIENCES ET OUVERTURE


JeD (SOM): Vous étiez exclusivement un projet instrumental jusque-là, il me semble. Sur ce nouvel album, il y a du chant sur deux titres, avec Mayline Gautier et l'Amiral Dacruz. Comment s'est déroulée l'expérience ?
Maudits :
 Oui en effet, à l'exception d'un spoken word sur l'ep “Angle mort” et d'une collaboration vidéo avec les copains de Nord (https://youtu.be/Mdf-ChTLaNg?si=EdCZ5OHoTORb2gRV) nous n'avions pas encore de plages véritablement chanté sur nos albums. 
Pour ces deux chansons , la mise en place des collab’ s'est faite très vite, et à uniquement été motivée par l'envie de collaborer avec ces deux brillants artistes que sont Mayline et l'Amiral (Olivier Lacroix d'Erlen Meyer / Novembre). Pas de stratégie commerciale ou autre derrière, juste l'amour de la musique. 
Concernant “Carré d'as” le point de départ est lié au fait que Chris (batterie) et moi même sommes d'énormes fans d'Erlen Meyer et de Novembre, deux projets totalement différents et de notre point de vue tellement géniaux... La voix d'Olivier et ses textes nous ont totalement happés dès le départ, plus particulièrement sur Novembre du fait de l'originalité de la démarche artistique, avec ce de slam/rap très sombre truffé d'ambiances quasi black metal. Son niveau d'écriture est hors du commun, et son flow traînant et hanté correspondait parfaitement à ce que l'on imaginait pour "Carré d'as" et nous lui avons simplement demandé s'il était intéressé par un guest sur ce morceau.Tout a été fait à distance, Olivier a trouvé le thème, écrit les paroles et fait ses prises de son côté chez un de ses collaborateurs. A l'arrivée c'est pour nous l'un des morceaux les plus forts d'"In Situ". Nous en avons d'ailleurs fait un clip qui est paru juste avant la sortie officielle de l'album (le 7 novembre dernier). À titre personnel, je n'aurais jamais imaginé produire un morceau avec du chant rappé en français, et je suis heureux d'avoir dépassé ce préjugé grâce au talent et à la pertinence d'Olivier!
Concernant “Roads” c'est la compagne de notre violoncelliste Raphael, Mayline (Lun) qui l'a interprété et nous sommes plus qu’enchantés par sa prestation et le résultat final ! Comme pour Olivier tout à été fluide et efficace, elle a fait ses prises chez elle et nous avons également travaillé à distance. 


JeD (SOM) : Il y a une reprise de Portishead sur "In Situ", pourquoi ce choix ?
Maudits :
Portishead est un groupe important dans mon parcours musical et "Roads" est juste un morceau magnifique. Avec Chris, le batteur, nous l'avions déjà repris avec notre formation précédente, et avons eu récemment l'occasion de l'interpréter avec Maudits lors de concerts en formation duo / trio, en invitant des chanteuses différentes à chaque fois, dont Mayline comme dit juste avant. Son grain de voix à la fois doux et très puissant correspondait parfaitement à ce qu'on avait en tête ! 
L'idée était, tout en respectant l'intention du morceau, d'en faire notre propre version, sans aucune prétention ou volonté de dépasser l'original... Juste lui rendre hommage en se faisant plaisir. 

 

 

JeD (SOM): Quelle est selon vous l'essence de Maudits, ce qui définit le groupe, sa raison d'être ?
Maudits :
C'est avant tout le plaisir de pratiquer l'art musical qui est indispensable à nos vies. C'est à la fois un éxutoire et un objectif collectif de faire grandir ce projet artistiquement. On le fait avant tout pour nous, mais le fait que Maudits puisse toucher ne serait-ce qu’une petite niche de passionnés, est un honneur et une grande satisfaction.

 

JeD (SOM): Vous êtes passés de Source Atone Records à Klonosphere récemment...
Maudits :
En effet nous bossons la promo d'In Situ avec Klonosphere. Ils s'étaient occupés de nos deux premières sorties et nous étions très satisfait de leur travail. On se connaît bien, la communication est fluide et on avance efficacement. 
Pour nous il était assez naturel de revenir vers eux pour gérer la sortie de notre bébé. 
Pour Source Atone je ne m'étendrais pas forcément sur le sujet. On a sorti le split avec Saar puis “Précipice” avec eux, et la collaboration n'a simplement pas été satisfaisante pour nous (ni pour eux j'imagine) . On attendait plus, vu les moyens investis de notre côté , que ce que leur modèle économique pouvait offrir. Mais c'est comme ça,on ne regrette rien, on les remercie et on ne leur souhaite que du bon ;) 

 

JeD (SOM): Vous avez sorti une live session de trois titres, à l'Opéra de Reims. Pouvez-vous nous en parler ?
Maudits :
C'est une très belle carte de visite que nous avons pris un énorme plaisir à réaliser. 
L'histoire de cette session est assez simple,nous cherchions entre les deux périodes covid, un bel endroit pour tourner une session live, et l'un des membres du groupe via une connaissance dans son activité professionnelle, a réussi à nous obtenir 2 jours de résidence à l'opéra de Reims avec tout le staff à disposition. On a donc pas hésité, rameuté notre ingé son Paul, un ingé light, un vidéaste et deux cameramans. Nous avons ensuite tourné ça sur les deux jours et fait mixer/ masteriser l'audio par notre producteur Frédéric Gervais. Cela a demandé beaucoup de travail et de moyens mais on ne regrette pas car le résultat est super et c'est une opportunité qui ne se présente pas deux fois. La session en question :
https://youtu.be/Og9WQAaKeZQ?si=RwOmK0avqp7W85qe
Pour info nous l'avons aussi sorti en version CD avec un artwork spécial et un mix/mastering différent ;) : 
https://mauditsofficiel.bandcamp.com/album/live-session-at-op-ra-de-reims

 

 

 

 

JeD: Pour finir, une toute dernière question qui me tarabuste : le trèfle à quatre feuilles, vous en semez partout... Pourquoi ?
Maudits :
Le trèfle est devenu naturellement notre “mascotte” et apparaîtra d'une manière ou d'une autre sur toutes nos covers. C'est un symbole fort qui représente bien la dualité de notre musique qui peut être à la fois lumineuse et très sombre. Le fait de lui enlever une feuille change toute sa signification, et finalement cela représente nos vies et notre condition d'être humain en général, avec ces joies et ses galères. 



Merci à Maudits pour ces réponses précises et fournies !

Interview done by JeanEdernDesecrator

0 Kommentar

0 Like

Mitteilen
    Du mußt eingeloggt sein um einen Kommentar zu schreiben

Mehr sehen