Allez, dernier jour, et pas des moindres !
On rassemble ses forces vacillantes et on se plonge dans le tumulte des concerts !
Black Bile (FRA)
C’est un peu par hasard que l’on va voir Black Bile, premier groupe programmé pour cette dernière journée, histoire de profiter un maximum des concerts avant de retourner à nos vies quotidiennes. Ne connaissant pas le groupe, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre, eh bien, c’est parfois quand on n’attend rien que l’on reçoit le plus… Catalogué stoner doom sur Spirit of Metal, les quelques morceaux que vous pourrez trouver sur Youtube se rapprochent plus d’un Messa, mais sur scène, la musique du quatuor prend une tout autre dimension, et lorgne vers un sludge atmosphérique/post metal avec quelques pointes black notamment au niveau du chant, Romane Ripnel se fendant de hurlements arrachés impressionnants. Statiques, graves et solennels, les musiciens envoient des compos à la fois puissantes et profondes servies par un son mastoc, les titres prenant leur temps pour développer leurs ambiances mélancoliques et exploser en un acmé d’émotions d’une pureté hypnotique peu commune. Là aussi, le batteur, avec sa frappe lourde et son jeu tribal, rythme parfaitement la transe, guidée par les vocalises tantôt douces et vaporeuses, tantôt déchirées de la chanteuse. Encore une très belle découverte, et l’un des shows les plus immersifs et touchants de cette éditions 2024, assurément !
Kronos (FRA)
Après ce superbe moment de metal atmosphérique, quoi de tel qu’un peu de brutal death pour redescendre sur terre ? Et pour le coup, ça tombe bien, Kronos a ce qu’il nous faut, avec un set impeccable de 40 minutes qui ravira tous les amateurs d’un death extrêmement brutal et technique (le bassiste affiche un t-shirt de Gorod, ce n’est peut-être pas un hasard !). Les musiciens sont impériaux, affolants de dextérité et balancent une musique qui reste outrageusement puissante et ravageuse malgré la complexité de certains plans. Encore une fois, le son est chirurgical, ce qui est essentiel pour apprécier toutes les « subtilités » (sic !) de la musique, le show est ultra dynamique et carré avec un Kristof très charismatique au débit impressionnant qui alterne growls profonds, pig squeals et hurlements criards et essaye de réveiller un peu l’assemblée un peu dispersée devant cette performance matinale et déjà bien éprouvée après 3 jours de festival. D’ailleurs, il annonce Haterealm comme une chanson douce qui aidera gentiment les spectateurs à émerger, quelle délicatesse ! Le show s’achèvera trop vite sur Mashkhith, premier morceau destructeur du premier album et la boucle est bouclée, Kronos aura montré qu’avec Benighted, ils sont vraiment les rois du death brutal à la française ! Bravo pour cette prestation les gars, on en redemande !
Griffon
Petite pause pour souffler et manger un bout, et c’est ensuite au tour de Griffon d’investir la Supositor. Les Parisiens, affublés d’une chemise en flanelle blanche maculée de poudre et de sang, mettront leurs deux derniers albums à l’honneur, et c’est d’ailleurs l’artwork de De Republica, une Notre Dame fièrement dressée, qui s’affiche sobrement en fond. On retiendra d’ailleurs le très réussi The Ides of March, aux riffs tranchants et mélodiques et aux blasts serrés ainsi que le superbe L’Homme du Tarn au refrain touchant repris en choeur par tous les musiciens (Que maudite soit la guerre !), qui emportent l’adhésion du public. La prestation est plus qu’honnête, avec des guitaristes relativement mobiles pour le style, headbangant copieusement au rythme du riffing et assurant des backing vocals death convainquants et un chanteur complètement possédé par son art, tournant le dos au public à chaque introduction comme pour mieux s’imprégner de l’émotion dégagés par les mots et la musique. Ceci dit, il faut dire que la musique du quintette, très chargée et parfois complexe, avec de nombreux changements de rythmes, n’est pas évidente à retranscrire sur scène, et une certaine confusion s’installe parfois lors de certains passages où l’on a du mal à démêler les lignes mélodiques de chaque instrument. Qu’à cela ne tienne, dans l’ensemble, Griffon aura fait un bon concert, dont l’on se contentera sans problème en attendant les passages de Rotting Christ et Gorogorth, les deux têtes d’affiche black du festival…
Monkey 3
Longue pause ensuite, car il reste encore toute une journée et une nuit à tenir, et le corps commence à montrer ses limites… C’est donc sans grande conviction que je m’extirpe de la tente histoire de, et que je me dirige vers la Bruce Dickinson pour assister au show de Monkey 3, groupe que je connais vaguement de nom, et étiqueté stoner… Mais nom de dieu, que s’est-il passé ? Honnêtement, je n’ai pas encore compris, mais comme pour Regarde Les Hommes Tomber il y a deux ans, le concert des quatre Suisses m’aura complètement retourné et plongé dans un état second proche de l’extase. La fatigue joue sûrement, mais les longues compositions hypnotiques du trio, uniquement instrumentales et rehaussées d’une bonne dose de psychédélisme, aux guitares chaudes et ronflantes et aux fulgurances oniriques m’ensorcèlent. Quatre longs morceaux qui se suffisent à eux-même (Collapse, Icarus, Kali Yuga et Through the Desert) pour un concert qui vient tutoyer les sommets, et qui semble méduser une bonne partie de l’assistance que l’on n’entendra pas broncher durant ces 45 minutes trop courtes à la saveur d’éternité. Les musiciens, parfaitement silencieux eux aussi, à moitié masqués par les nuages de fumée (et le claviériste en rajoute de beaux panaches avec sa cigarette électronique !) sans un mot pour le public, font jaillir les notes de leurs instruments dans une atmosphère irréelle, simples réceptacles d’une inspiration brute comme s’ils créaient les morceaux devant nos yeux. Un moment rare, incroyable trip purement musical d’une rare profondeur émotionnelle à consommer sans modération. Magique !
Sonata Arctica
Une autre petite pause histoire de recharger les batteries et me voilà devant la Dave Mustage pour assister au show de Sonata Arctica. Oui, le power mélodique ce n’est pas trop mon truc d’habitude, mais bon, j’ai l’occasion de voir l’un des plus talentueux représentants du style alors pourquoi m’en priver ? Pour le coup, les Finlandais livreront un show sympathique et énergique et je passerai un moment agréable, même si je ne peux pas m’empêcher de sourire sur certains passages un peu kitsch. Le son de gratte manque un peu de puissance, et le claviériste bien que sur l’estrade au côté du batteur, est trop souvent masqué par le guitariste, c’est dommage, surtout quand on sait l’importance que revêt son instrument dans la musique du groupe ! Cependant, lors d’un Replica très attendu dont l’intro acoustique est chantée en chœur par le public, il viendra au côté d’Elias Viljanen délivrer un déluge de notes sur son keytar, un grand moment du concert ! Les Finlandais privilégieront des morceaux rapides taillés pour la scène, avec un Full Moon hymnique qui fait des heureux et déclenche même le premier slam (!), ou un Don’t Say A Word survitaminé émaillé de courtes interventions growlées ! Si Tony Kakko ne peut plus atteindre les aigus comme à la grande époque, il a encore de beaux restes, en témoigne l’intro a capella du court et déjanté Vodka’s Song où le groupe reprend une mélodie traditionnelle bien connue. Un show bon enfant et sans prise de tête, qui fait du bien avant la boucherie sonore de Terrorizer qui s’annonce !
Terrorizer
Une brève pause pour reprendre quelques forces avant la dernière grande ligne droite, soit l’enchaînement de 4 concerts sans interruption histoire de finir en apothéose ! C’est donc de loin que j’entends Decapitated qui livre apparemment une très bonne prestation, puis direction la Mustage pour le show de Terrorizer.
Haaaaa, bon dieu, qu’est-ce que ça fait du bien ! Si jusqu’à présent, on a été gâté en death technique et brutal, parfois, rien ne vaut un bon death grind old school velu, bien direct et in your face ! Et c’est exactement ce que Terrorizer est venu offrir à son public, d’ailleurs, le décor ne ment pas, avec un pied de micro flanqué d’un squelette sanguinolent duquel pendent des organes ainsi que des paires de mains arrachées, et aux extrémités de la scène des crânes empalés sur de longues piques autour desquelles s’entourent une chaîne avec un crochet de boucher, des viscères fumants et une cartouchière ! Au moins, les choses sont claires ! Les zikos sont au diapason, débarquant sur scène en treillis et polo noir, Anthony Rezhawk arborant des peintures de guerre noires et vertes type camouflage sur le visage et du fil barbelé enroulé autour du poignet. Et c’est parti pour une heure de gros death de bûcheron sans aucune subtilité mais particulièrement jouissif, avec un groove mortel ! Ca envoie du riff bien gras par paquets de dix avec la basse de David Vincent (!) qui claque comme il faut et une alternance délicieusement régressive de poum tchak et de gros blasts qui décapent et qui éclaboussent. Les titres s’enchaînent et se ressemblent mais on s’ne branle, il n’y a aucun temps mort et on s’en prend plein la gueule, avec le sourire s’il vous plaît, le groupe alliant savamment l’intensité furieuse du grind, le groove du death old school avec un côté qui ne se prend pas au sérieux. Fear of Napalm, Storm of Stress, Human Prey, Resurrection, le motorheadien Infestation ou les plus récents Horde of Zombies et State of Mind, tous les titres y passent, y compris un bien nommé Crematorium particulièrement lourd en hommage à Jesse Pintado. Pas grand-chose à ajouter, et une seule conclusion s’impose : ce sont souvent les choses les plus simples les meilleures !
Rotting Christ
Pas le temps de souffler, on enchaîne directement avec Rotting Christ qui aura finalement troqué son heure de passage avec Gorgoroth. La foule est très compacte et on sent que les Grecs sont attendus, ceci dit, cela n’a pas l’air de leur mettre le moins du monde la pression et ils livreront un excellent show dans leur style si typique et personnel, à la fois chaud et puissant, fédérateur et incantatoire, subjuguant un public entièrement acquis à leur cause. Sakis Tolis est souriant et très en voix, allant même jusqu’à exiger un wall of death (chose presque impensable pour du black !) et les musiciens déroulent leurs partitions avec une énergie et un professionnalisme indiscutables. Chaque morceau résonne comme un hymne et est repris par une bonne partie du public, explosant comme un grand cri païen sous un crépuscule déclinant doucement au fur et à mesure du show. Apage Satana fera office d’interlude sauvage délivrant les énergies primitives du public tandis que les Grecs balaient le spectre de leur large discographie, avec des morceaux comme 666, Demonon Vrosis ou Grandis Spiritus Diavolos qui s’enchaînent avec une cohérence sans faille, démontrant s’il le fallait encore à quel point leur musique compose une œuvre au caractère et au son uniques depuis plus de 30 ans. Même le superbe Non Serviam n‘a pas pris une ride et s’insère parfaitement dans la set list au côté de morceaux plus récents comme Dies Irae ou un Like Father Like Son réellement envoûtant. Un superbe moment de communion et d’émotions qui met du baume au coeur avant d’aller subir la froideur inhumaine des monstres de Meshuggah.
Meshuggah
Dire que Meshuggah était une tête d’affiche de ce Motocultor 2024 est un euphémisme. Les Suédois sont quand même les inventeurs d’un metal polyrythmique à la technicité affolante complètement unique qui a fait un nombre incalculable d’émules et est même à l’origine de tout un pan du metal moderne, rien que ça. Oui, les gens qui idolâtrent Meshuggah sur album sont nombreux, et ça s’est vu à l’affluence impressionnante qui se pressait devant la Dave Mustage pour assister à l’un des derniers gros shows du festival ; ceci dit, Meshuggah sur scène, ça donne quoi ? Les cinq d’Umeå sont-ils capables de retranscrire la complexité chaotique de leur musique en direct ?
La réponse est sans appel : oui, et avec la manière s’il vous plaît ! Il convient avant tout de souligner l’incroyable travail sur les lumières qui donnera une autre dimension à ce show, projetant d’emblée la silhouette des quatre musiciens (le batteur est un peu en retrait) qui apparaissent sur un fond rouge flamboyant et disparaissent dans la nuit, par un jeu d’ombre et de stromboscopes saisissant, et ce avant même que ne résonne la première note. Quelle entrée en scène ! A partir de ce moment-là, la machine se met en branle, et c’est la démonstration : Meshuggah livre un show magistral, bluffant de puissance, de technique et d’efficacité avec un son énorme qui nous assomme, un vrai rouleur compresseur. Les quatre jouent en ligne, statiques, impassibles, comme s’ils appartenaient à un tout savamment organisé où chaque élément doit impérativement être à sa place pour exister, et leur présence scénique est impressionnante, surtout celle de Tomas Haake qui nous agresse de son chant rauque, véritable instrument à part entière qui semble guider les guitares. Les titres s’enchaînent comme un seul grand morceau dans ce style si atypique et heurté mais l’ensemble est étonnamment accessible, en tous cas moins hermétique que sur album, avec quelques passages plus ambiancés et presque mélodiques (Broken Krug). Il faut dire que les effets pyrotechniques, inondant la scène de ces lasers rouges et bleus qui renforcent le côté robotique de la musique, ainsi que les deux somptueux visuels apocalyptico cybernétiques aident à s’immerger dans la musique du quintette et c’est en bons masochistes qu’on se fait terrasser par un Born In Dissonance aussi schizophrène que dévastateur qui ravage les cervicales. L’enchaînement avec Mind’s Mirror est complètement fou, les secousses inhumaines et quasiment drone du début de morceau faisant littéralement vibrer des milliers de festivaliers complètement hébétés et je ne peux m’empêcher d’esquisser un sourire lorsque certains membres du public essaient naïvement de frapper dans leurs mains pour marquer le rythme sur les arpèges biscornus et malsains qui suivent : les gars, c’est Meshuggah, comment pouvez-vous espérer battre un tempo régulier plus de 10 secondes ? Bref, un show dantesque, encore un qui démontre à qui en doutait encore qu’à l’instar de leur dernier album, les Suédois sont vraiment « immuables » !
Gorgoroth (NOR)
Pour le coup, le changement d’heure de passage avec Rotting Christ profite bien aux Norvégiens : c’est bien en pleine nuit et sous une superbe pleine lune que l’essence sataniste de leur musique peut se dégager pleinement, et le moins que l’on puisse dire, c’est que les conditions sont idéales pour ouvrir les portes de l’Enfer ! Les musiciens font leur entrée sur la Marche Funèbre de Chopin en clous, piques et corpse paints et nous offrent un show diabolique incroyable d’intensité. Quelle ambiance ! Si on pouvait craindre une prestation en demi-teinte à cause d’un dernier album vraiment médiocre, les quatre n’ont pris aucun risque, n’interprétant qu’un seul titre d’Instinctus Bestialis, un Kala Brahman sombre et rampant qui s’intègre sans problème dans le répertoire plus ancien du groupe. La basse claque et nous fouaille les entrailles, et les musiciens jouent complètement noyés dans un océan de lumières rouges vives aux airs de braiser infernal, et sur Kala Brahman, disparaissent à moitié masqués derrière d’épais nuages de fumée. Le son est un peu sourd, et tous les riffs n’apparaissent pas très nettement, mais cette impression de confusion chaotique ne fait que renforcer cette aura sulfureuse et diabolique qui nous prend à la gorge et l’énorme présence des musiciens fait le reste, avec un Hoest réellement effrayant avec son bracelet à piques qui lui remontent jusqu’à l’avant-bras et son collier clouté à double rang dont les pointes mesurent bien 10 centimètres ! Gorgo déroule un show parfait en tous points, n’oubliant pas ses premiers albums (le Bergtrollets Hevn d’ouverture et Katharinas Bortgang se trouvant respectivement sur les intouchables Pentagram et Antichrist de 1994 et 1996) et Destroyer. Une messe noire hallucinée et une catharsis inoubliable pour tous les amateurs de black metal, ni plus ni moins.
C’est donc sur ce dernier concert que l’aventure Motocultor 2024 se termine pour moi qui zappe Avantasia, n’étant pas trop client du style, et que je m'écroule dans ma tente, vidé mais comblé. J’aurai passé un festival incroyable avec une programmation pointue et de qualité, très éclectique, et qui m’aura permis de faire quelques sacrées découvertes sans parler des belles rencontres avec certains festivaliers et bénévoles. D'une manière générale, j'ai été impressionné par l'organisation et le déroulement du festival (son de qualité, horaires des concerts respectés, site très propre, festivaliers et gens de la sécu vraiment amicaux, ambiance bon enfant et repsectueuse...) et d'après les retours récoltés sur place, c'est un sentiment très positif qui se dégage à l'unanimité pour cette nouvelle édition. Une fois encore, la jauge des 54 000 festivaliers a été atteinte, et au vu des premiers noms déjà annoncés pour l'année prochaine (Machine Head, Dimmu Borgir, Blind Guardian, Between the Buried and Me, rien que ça!), on se doute que le succès n'est pas prêt de s'arrêter ! Que dire de plus ? Bravo et merci Motocultor tout simplement ! A l’année prochaine !

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Quel boulot!! Bravo pour ce report des 4 jours, j ai eu l impression d y être, la fatigue en moins ; le confort en plus. Merci!
Merci pour ces live reports copieux, ça a du être un sacré marathon !
Merci, c'est très détaillé, je n'imagine pas le temps que tu as dû passer pour préparer & rédiger tout ça !
KRONOS est mon autre grosse baffe du festival avec INHUMATE !
Tout comme toi, j'ai apprécié BLACK BILE, GRIFFON, ROTTING CHRIST, TERRORIZER, MESHUGGAH et GORGOROTH.
En Post-, NIGHT VERSES était agréable. Idem pour PLINI en guitar hero ce jour-là. EXUMER en Thrash aussi mais je comprends que tu as eu ta dose ;-) (je ne suis pas allé non plus à tous les groupes de Thrash)
Tu aurais pu aller te faire plaisir avec STONED JESUS qui était une belle découverte pour moi, au lieu de SONATA ARCTICA, lol !
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