Klone

Symbole d’excellence à la française, Klone a depuis désormais 20 ans repoussé les limites de leur musique pour aujourd’hui proposer un exemple de metal progressif fin et atmosphérique, à l’écriture riche et pleine de sensibilité. 

Dignes héritiers de Katatonia, Anathema ou Devin Townsend, ils reviennent avec un huitième disque intitulé “The Unseen”. J’ai rencontré Guillaume Bernard pour la énième fois, accompagné de Morgan Berthet (batterie) lors du Hellfest 2024. Comme d’habitude, c’est avec honnêteté et sans aucun filtre que le maître à penser se livre, ainsi que son compagnon d’armes. 

[Par Eternalis]

 


 

Comment s’est passé le concert ? [interview au Hellfest 2024, après leur prestation sous une Altar pleine à craquer)

Morgan : Très bien. En termes de réponse du public c’était génial. La tente était vraiment pleine à craquer et l’ambiance était géniale.

 

J’étais presque surpris de voir autant de monde avant le concert en plein milieu de l’après-midi !

Guillaume : On a payé tous ces gens là (rires). Ça nous a coûté cher mais ça valait le coup !

C’était vraiment très cool, on ne pouvait pas rêver mieux. 

 

Tu as eu un problème technique sur “Rocket Smoke” de ton côté, qu’est-ce qui s’est passé ? 

Non, pas du tout (rires). Je ne sais pas, j’ai mon jack de guitare qui s’est débranché. Depuis un moment, je joue en sans-fil mais je me suis dis que j’allais assurer le coup pour le Hellfest pour ne pas avoir de problème. Et bien j’ai eu un problème avec mon fil (rires). 

J’ai voulu rebrancher mon câble de secours avant que je me rende compte qu’il n’était branché à rien. Je regardais autour de moi mais personne ne captait. L’avantage, c’est que j’ai l’impression que personne n’a rien vu. Tant mieux, ça aurait pu péter mon concert mais le reste s’est bien passé. En fait, il n’y a que toi qui me pose la question !

 

Comment vous présenteriez “The Unseen” ? 

Morgan : C’est l’album qu’on préfère le plus à l’unanimité. C’est la première fois qu’on est totalement d’accord sur les chansons, sur le son, sur les arrangements. 

Guillaume : S’il fait vraiment l’unanimité entre nous, je me dis qu’il le fera aussi pour les gens et qu’il va peut-être créer le lien entre les anciens albums et les plus récents. Les premiers retours des journalistes ou des gens autour de Klone sont plutôt excités par le disque et les signaux sont en vert. Bien plus que “Meanwhile” par exemple. Il se rapproche plus des choses atmosphériques que nous avions pu faire pour “Le Grand Voyage” et “Here Comes the Sun”. 

J’aime bien “Meanwhile” mais j’ai l’impression que certains passages ne sonnent pas assez vrais. Nous voulions lancer des riffs plus “méchants”, un côté plus metal mais je trouve que finalement, ça donne l’impression que nous n’y croyons pas trop. Comme si Slayer continuait à faire du thrash à 60 ans (rires). Je me retrouve beaucoup plus en adéquation avec “The Unseen” autant dans les compositions que dans le son. 

 

Je trouve que “The Unseen” reste dans la progression entamée depuis “Here Comes the Sun”, mais avec une dimension plus “prog atmosphérique”. Il n’y a que quelques passages plus bruts, comme sur le titre éponyme, mais ils ressortent beaucoup. Quelle était l’envie principale derrière tes compos ? 

Ce sont des titres qui datent un peu pour la plupart, autour de “Here Comes the Sun” mais nous avions à l’époque trop de morceaux. 

C’était des morceaux très avancés, on pensait même à un side project à l’époque mais nous n’avons jamais pris le temps de finaliser ces titres. Après nous voulions du sang neuf et nous les avons laissé de côté alors qu’un titre comme “Interlaced” aurait même pu être sur “Black Days”. 

On a remis notre nez dans ces maquettes, les bases étaient solides et en consultant avec Yann, on s’est dit “Mais pourquoi on a abandonné ces morceaux ?”. On les trouvait vraiment cools, très frais. Mathieu Metzger a commencé à ajouter des éléments, j’ai écris de nouveaux thèmes pour créer une cohérence car je n’avais qu’une base, un socle batterie/guitare/basse. 

Il faut aussi dire que nous étions obligé par Pelagic de leur rendre un disque, dans une dealine très brève et avec une entente qui n’est clairement pas au mieux. Par contre, nous avons un délai plutôt long entre le moment où on remet les fichiers et la date de sortie. On voulait terminer ce contrat et en finir. D’ailleurs, certains pourraient penser que c’est un album de face B mais maintenant qu’il est terminé, on préfère totalement ce disque à “Meanwhile”. 

 

 

Vous avez ensuite retravaillé ces morceaux ensemble ? 

Alors … non ! 

Morgan : On n'a malheureusement pas eu le temps. 

Guillaume : On a fait une tournée au Mexique. Au retour, Morgan a fait ses parties de batterie chez Jelly Cardarelli, notre batteur remplaçant (qui joue également avec Stéphan Forté), en se basant sur nos drums programmés pour y ajouter de la vie et sa propre touche. On avait pensé à un moment les sortir avec une batterie programmée mais on aimait trop ces titres pour le faire, et surtout Morgan avait ce laps de temps pour le faire. 

On ne peut pas humaniser à la souris le jeu d’un être humain dans un genre comme le notre, tu peux faire du mieux que tu peux mais plus tu essaies et pire c’est ! On ne joue pas de l’indus. Finalement, on perdait du temps. Les prises de son de Jelly étaient géniales et matchaient parfaitement avec le reste, c’était parfait. 

 

Tu as donc pris des libertés vis à vis de la programmation ? 

Morgan : Complètement. Je m’approprie toujours le morceau. J’enregistre les titres, je leur envoient car nous n’étions pas ensemble pour avoir leur validation mais ça a été tellement simple sur cet album. Tout a été bouclé en trois jours. 

Guillaume : Sur “Meanwhile”, nous avions énormément bossé. Tellement que finalement, ça ne sonnait plus bien. Pour la batterie, nous avions fait plein d’ajouts derrière électronique et bidouillé. J’aime les compos de cet album mais pas du tout l’esthétique sonore. 

Morgan : L’album avait été long à composé, long à enregistré. Pour “The Unseen”, il y a eu un effet d’urgence qui a vitalisé l’album. 

 

"C’est l’album qu’on préfère le plus à l’unanimité. C’est la première fois qu’on est totalement d’accord sur les chansons, sur le son, sur les arrangements. "

 

Tout est prêt pour vous, tu as déjà diffusé l’album pour les journalistes mais, comme de plus en plus souvent, l’album sortira 6 mois plus tard. Je suppose que c’est pour la promo et les sorties physiques ? 

Déjà, depuis le Covid, tu as 6 mois de délai pour presser des vinyles. Tout est long. C’est devenu n’importe quoi. 

Guillaume : Le label prend également une grosse marge d’erreur pour éviter les retards éventuels ou les problèmes techniques. 

Morgan : La promo également. Nous avons la chance de jouer au Hellfest ce week end et on peut rencontrer tous les médias. C’est une chance parce que celui qui sort un disque dans l’été n’a quasiment pas de visibilités. Ils couvrent les festivals de toute l’Europe et les très gros groupes. Le label veut éviter ces périodes là aussi car ton disque pourrait sortir sans que personne ne le sache. Il faut attendre. On ne peut plus sortir un disque en trois ou quatre mois comme avant. 

Il y a un nombre de groupes toujours plus grand, des sorties d’albums toutes les semaines. Les salles de concerts sont aussi bookés des mois en avance. Il n’y a plus aucune place pour faire les choses à l’arrache. 

 

Un autre problème est que les sorties sont annoncées tellement en avance qu’il sort parfois cinq ou six singles avant la date de sorties (surtout pour les très gros) et que le public connait plus de la moitié de l’album quand ça sort …

Guillaume : On s’est posé la question. Il n’y a que sept morceaux sur l’album, on s’est dit qu’on allait proposer trois titres en avance mais ça fait beaucoup. Ca permet aussi de faire vivre le disque plus longtemps, en proposant des titres dans le temps et l’album complet plus tard. Je sais que tu ne fonctionnes pas comme ça mais de plus en plus de gens ne peuvent pas, ou ne veulent pas, se concentrer 45 minutes sur un album. Encore plus avec une musique comme la notre. Une attention de quelques minutes est beaucoup plus facile aujourd’hui. Les gens ne se mettent plus dans une bulle pour écouter un album, moi-même j’ai beaucoup plus de mal alors que je me posais souvent, quand j’étais jeune, pour ne penser qu’à ce que j’écoutais. 

 

A côté de ça, il y a “Spring” qui est votre morceau le plus long jamais écrit avec plus de 12 minutes. Il y a cette intro, le morceau structuré de quatre-cinq minutes et ensuite le thème qui se répète, encore et encore, de façon très atmosphérique. J’ai pensé à Devin Townsend qui étire parfois ses ambiances … comment est venu l’idée ? 

Parce que le contrat avec Pelagic Records dure quarante minutes (rires). 

On va être honnête, ça ne se passe plus bien avec eux et l’album durait environ 35 minutes. Je savais qu’il me ferait chier parce que c’est son genre donc j’ai décidé de faire un habillage sur le dernier titre. Je voulais écrire un interlude mais finalement, ça ne collait pas et ça ne sonnait pas comme je voulais parce que je ne voulais pas faire n’importe quoi juste pour combler le contrat. Le titre était déjà un peu long, il est en plus particulier car c’est Florent Marcadet qui joue dessus, de l’époque de “Here Comes the Sun”. Il y a toujours eu une “plage fantome” sur nos albums, un moment où on se laisse aller aux sons, aux expérimentations et aux délires sonores. Tout ça permettait de respecter le contrat et de revenir à des choses que nous faisons souvent et qui nous caractérisent avec cette boucle infernale qui se répète et qui nous sort du son de batterie pour juste se répéter. 

J’assume complètement le morceau aujourd’hui mais la raison initiale de tout ça n’est pas ce qu’on pourrait penser. Comme quoi, quelque chose de négatif peut se transformer. Beaucoup de gens nous ont d’ailleurs dit que c’était leur morceau préféré. 

 

Si je comprends bien, ça sera le dernier album avec Pelagic Records ? (rires)

Exactement ! Le dernier … des derniers des derniers (rires)

 

 

Vous avez parlé de votre tournée au Mexique avec Riverside. Comment ça s’est passé ? 

Morgan : c’était génial ! Le promoteur local était parfait, c’était mieux organisé que ce qu’on voit parfois en Europe. On était des princes là bas. 

Guillaume : C’était super bien organisé pour les concerts, pour la nourriture, pour les dates. On a rarement ça ici comme disait Morgan. Et le public est complètement baisé (rires). Ils sont à fond, c'est incroyable. 100 personnes là-bas, c’est 1000 personnes ici en termes de bruit. Et la dernière date à Mexico ils étaient 1500 ! Morgan avait déjà l’expérience du Mexique avec Myrath. Après le concert de la première date, nous avons été au fond de la salle tranquillement comme on le ferait ici mais les gens étaient totalement fous et venaient nous voir. On était les Beatles (rires). Ils nous applaudissaient encore du show, c’était du délire. Il y avait même des gars de sécurité pour aller dans les voitures. C’était totalement fou. 
 

"De plus en plus de gens ne peuvent pas, ou ne veulent pas, se concentrer 45 minutes sur un album"

 

Un petit mot sur le line-up et les photos promos. Il y a quelques années, pour “Le Grand Voyage”, ça tournait uniquement autour de Yann, Aldrick et toi. Désormais, il y a tout le monde. Qu’est-ce que tu peux en dire ? 

Ça ne te plait pas ? (rires)

C’était compliqué à cette époque car on avait quelqu'un qui enregistrait le disque, un autre qui partait en tournée, surtout pour la batterie. Donc nous avions fait le choix de ne montrer que nous 3, les 3 frères (rires) ! Mais finalement, c’était un problème de n’être que tous les trois sur les photos car il n’y avait pas de batteur et de bassiste. Derrière, on fait des photos promos avec Morgan mais on nous dit “Pourquoi ce n’est pas lui sur la tournée”. Bref, ça ne va jamais ! On a même deux batteurs remplaçants quand Morgan n’est pas disponible car il y a Jelly mais aussi Romain Bercé pour les lives acoustiques. 

Le poste de bassiste était fluctuant à un moment mais aujourd’hui c’est plutôt stabilisé. Il n’y a pas vraiment de solutions miracles. Il faut aussi que tout le monde soit présent pour les photos promos, ce qui est le cas aujourd’hui, donc on doit en faire. On aura même Matthieu Metzger et ça, c’est la classe !

 

De quoi parles l’album ? 

C’est encore Yann qui a tout écrit. Je ne suis pas super précis sur les paroles donc je ne vais pas parler pour lui mais je sais que c’est plus positive pour lui. Certains titres évoquent un peu plus l’idée que “La Vie est Belle”. Le fait qu’il soit devenu papa, le fait de trouver un nouveau sens à sa vie. Il y a plus de joie dans sa vie. 

Mais à côté, des morceaux comme “The Unseen” ou “After the Sun” sont beaucoup plus sombres dans ce qu’ils évoquent. 

 

 

Dernière question : depuis “Here Comes the Sun”, votre style est très ancré et marqué. On pense beaucoup à Anathema ou Katatonia et, comme eux, votre identité stylistique est amenée à moins évoluer dans le temps. Est-ce que tu penses que Klone a définitivement trouvé sa voie ?

Je sais qu’il y a encore de la marge de manœuvre dans ce qu’on fait. Mais par défaut, j’ai mon identité. Je ne m’impose rien, je ne m’empêche pas d’expérimenter sur notre socle qui est solide mais je ne me vois pas aller vers des passages d’ultra-violence par exemple, même si j’en écoute. 

On a pris des risques en ouvrant sur des choses beaucoup plus mélodiques et nous avons toujours été récompensés par nos risques. “Le Grand Voyage” a été un beau succès et je pense que quand les gens sentent que tu es sincère et authentique, il te récompense au delà du style. Pourtant à l’époque, notre label voulait à peine le sortir et nous étions “Oui mais c’est ce qu’on veut”. C’est depuis l’album qui s’est le plus vendu de Klone ! C’est l’album qui a le plus touché les fans quand ils en parlent et c’est ce qui compte le plus !

Interview done by Eternalis

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