Le nom d’Hyl ne vous dira sans doute pas grand-chose, et c’est bien normal puisqu’il s’agit d’un tout jeune trio dont le label anglais
Odium Records vient de sortir le premier EP,
Where Emptiness Is All.
Pourtant les musiciens qui composent cette nouvelle entité sont loin d’être des inconnus puisqu’on y retrouve R. C. à la basse et aux guitares (Humanity
Eclipse,
Krigere Wolf,
Schizo…),
Shadow derrière le micro (
Black Altar et des concerts avec Ofermord) et Krzysztof Klingbein qui tient les baguettes chez
Vader et
Belphegor en live. Cette expérience et ce professionnalisme s’entendent dès les premières secondes de Pvrification, plage introductive extrêmement prenante nous immergeant instantanément dans l’ombre poussiéreuse d’un temple millénaire, et empruntant à
Batushka ces chœurs orthodoxes et cette atmosphère liturgique confinant au sacré. Into the Unknown commence les choses sérieuses avec une montée en puissance progressive où ces notes de guitares solennelles et grandioses s’assemblent lentement avant de former un riffing compact, tranchant et mélodique à la fois porté par une tempête de blasts conquérants qui semblent élever notre âme au-delà de la matière et de la finitude humaine. Le côté chaud des guitares rappelle la scène grecque,
Rotting Christ en tête, tandis que l’osmose entre profondeur atmosphérique et intensité rythmique renvoie assez évidemment aux Polonais de
Mgla, qui semblent être une référence importante pour Hyl.
La prestation de Krzysztof Klingbein est très dynamique, son martelage de futs dense et rapide creusant les contrastes et appuyant les ambiances de ce black mélodique de haute volée (il n’y a qu’à écouter le début de
And Everything Dies), mais ce sont bien les guitares, tissant une toile de riffs tour à tour tranchants et lancinants, galvanisants (le sentiment héroïque qui vient nous gonfler le torse sur Into the Unknown ou
Where Emptiness Is All) ou mélancoliques (les guitares lentes aux harmonies dépressives d’
Endless Illusions qui, appuyés par la double, font rouler leurs accords traînants jusqu’au tournis), glaciaux ou brûlants, qui nous immergent dans cet état de transe propre à cette musique très évocatrice et émotionnelle. Le chant rauque et articulé de
Shadow ainsi que cette basse claquante viennent compléter idéalement l’ensemble, ajoutez à cela quelques passages purement ambiant ou atmosphériques (la fin de Into the Unknown avec ces samples de vent, ces tintements de cloche et ces chants monastiques lointains , le début d’
Endless Illusions avec corbeaux, bruit des vagues, synthés lugubres et arpège brumeux, Under a Watching Sky, qui clôt l'album en douceur, sorte de balade nocturne horrifique, morbide et fantasmagorique dans un vieux cimetière hanté) et vous aurez un parfait album de style, excellent de bout en bout.
Non,
Where Emptiness Is All n’a rien d’original, mais l’interprétation sans faille et l’émotion qui se dégage de ces six titres en font un de ces albums captivants qui nous envoûtent du début à la fin. On pourrait être tenté de reprocher à cet enregistrement s a durée assez courte avec ses 33 petites minutes, mais quand on sait que ce n’est qu’un EP, la critique ne tient pas la route et on est forcé de se rendre à l’évidence : pour sa toute première réalisation, Hyl nous sort une tuerie incontestable, indispensable pour les amateurs d’un black metal à la fois atmosphérique, hypnotique, intense, agréablement varié et très accrocheur.
Comme son nom semble le suggérer, l’immense béance du vide nous aura rarement autant rassasié l’âme et les sens, et on attend déjà impatiemment la prochaine offrande d’Hyl, qui, à n’en pas douter, nous fera faire un pas de plus – le dernier ? - vers ce gouffre sans fond où le néant engloutit tout…
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