Pour l'européen de base, nourri « intellectuellement » à coups d'informations racoleuses et chauvines, la Chine n'est qu'une dictature cherchant à asseoir sa domination économique sur le Monde en faisant fi des Droits de l'Homme appuyée par une population docile à la botte du parti unique. Mais les médias dans leur ignorance crasse, la même qui, il y a 20 ans faisait passer les chinois pour de sympathiques personnages, rigolos avec leurs vélos et leurs chapeaux triangulaires, ont oublié que le Chine était avant tout des hommes et des femmes. Des êtres humains avec leur émotions, leurs craintes, leurs état d'âmes, leurs idées, leurs forces et faiblesses... Alors, dans un pays, il est vrai, longtemps fermé à la culture occidentale et dont la musique se résumait à de la Pop sirupeuse et romantique, de nombreux artistes ont cultivé dans l'underground le plus total leur amour pour les arts sombres et « interdits ».
Ame damnée, perdue dans la population Pékinoise,
Spectre est de ceux là. Vocaliste et multi-instrumentiste amateur de Black
Metal et de films d'horreur, il fonde en 2001 son one man band,
Ululate (??). Avec un tel patronyme (?? pouvant être traduit par hurler de douleur ou se lamenter) nul doute que la musique du projet musical de
Spectre ne respirera pas le lilas, la brise de printemps et le gazouillis des oiseaux. Et c'est donc l'année qui suit sa formation qu'
Ululate sort son premier opus intitulé
We Are Going to Eat You!!! (bien que le titre ne figure pas sur la pochette), un premier opus empli de misanthropie et de douleur. Après tout, aurait-il pu en être autrement d'un album dédié à Varg Vikernes et Lucio Fulci (réalisateur italiens de « gialli », style de films d'épouvante très crus, en vogue à la fin des années 70)?
Une oeuvre noire qui s'ouvre sur
Epic March morceau de près de 6 minutes à la structure totalement décousue. Une introduction plutôt mélodique mais lancinante avec sa mélodie vicieuse et ses claviers fantomatiques qui s'interrompt brusquement pour laisser place à un brûlot Black
Metal brutal et glacial, lui même interrompu de manière brutale par un riff lent, dissonant et vicieux qui clôt le morceau sous les hurlements décharnés de
Spectre (faisant penser à ceux de Nattram de
Silencer en plus grace et distordus). En à peine 6 minutes
Ululate a défini son univers. Un Black
Metal sans concession, vicieux et surtout très (très) crade. Du grain des guitares, aux hurlements de
Spectre, presques distordus par la production brute et granuleuse, tout l'album est emplit de l'odeur sordide de la
Mort.
Par ses paroles hurlées, éructées, vomies
Spectre décrit des cadavres et des os en putréfaction pour étaler toute sa misanthropie. Lorsqu'il ne « chante » pas, il laisse les films d'horreur s'exprimer à sa place. Samplés et apposés par dessus des couches de guitares et des nappes de synthétiseurs funèbres, ceux ci finissent par devenir vraiment flippants (
Human Beings are Bullshit, I don't Want to be With
Them). Des morceaux, sans réelle structure mais unis par la même folie destructrice, passant de riffs lents et dépressifs à d'autres brutaux et noirs ou laissant place à des sanglots étouffés perdus dans un brouillard de claviers dépressifs (le final de
Death Passes the World Like This) composent cette oeuvre mortuaire.
Une reprise du
Lost Wisdom de
Burzum, plus crade et torturée que l'original mais sans réelle surprise sert d'hommage au mentor de l'esprit dérangé de
Spectre.
Undead Avenger, interlude de plus de deux minutes un peu inutile introduit l'Epilogue de ce disque noir, morceau de plus de 8 minutes répétant inlassablement le même riff aliénant. Mais après cette conclusion inhumaine et jusqu'au-boutiste,
Spectre nous laisse en ghost-track un morceau acoustique folk chanté en anglais comme pour nous rappeler que derrière toute cette haine... se trouve un humain.
We Are Going To Eat You est le cri de rage et de douleur d'une ame tourmentée, ignorée par la multitude dont il fait malgré lui partie. Ni bien produit, ni bien écrit, ridicule au premier abord mais authentique, We Are Going To You révèle toute son insanité au fil des écoutes, dans cette mélodie sournoise perdue dans le magma infame des guitares, dans cette tentative avortée de solo (Galaxy-Cracked
Solitude), dans ces hurlements étouffés et agonisants... Un disque cruel, brutal et douloureux: c'est aussi ça l'humanité...
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