Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, intéressons-nous à un split entre deux formations obscures de black atmosphérique : Vuur & Zidje, trio hollandais fraîchement formé et
Impavida, duo germano états-unien officiant depuis 2005, ont décidé de collaborer sur cet enregistrement de 36 minutes, se partageant les deux faces d’un vinyle tiré à 500 exemplaires et sorti par
Prophecy Productions.
Les deux groupes ont des similitudes musicales assez évidentes, évoluant tous deux dans un black atmosphérique aux ambiances mystérieuses épaisses, ce qui donne un ensemble cohérent et fluide. Ce sont les Néerlandais qui ouvrent le bal avec Zonnestorm : le chant pur et intemporel de F. nous accueille, nu et fragile, comme amplifié dans un monde vide et mort, se répercutant sous l’immense voûte vide du ciel, avant qu’une tempête électrique ne s’abatte sur nous, vagues de guitares saturées appuyées par un blast sourd et roulant.
La musique dégage cette noblesse triste, une aura mystérieuse, presque sacrée, sorte de sentiment de fin du monde. L’ensemble n’est jamais violent, cette fatalité inéluctable s’impose à nous tout en douceur, portée par cette magnifique voix à la croisée des performances de Masha (
Arkona), Mandy (
Murkrat) et Lisa Gerrard (
Dead Can Dance). On croirait entendre le chant d’adieu d’une divinité païenne oubliée, l’ultime plainte d’une Gaïa meurtrie et souillée par le sang impur d’hommes devenus fous, et laissant derrière elle une nature sans défense (le début de Nordzee, dominé par ces pépiements d’oiseaux, ces cloches lugubres et ce mugissement sinistre). Pour le reste, de longues parties instrumentales volontiers contemplatives et nébuleuses nous entraînent dans un monde éthéré, mélangeant un jeu de cordes mélancolique, à la fois solennel et voluptueux à la
Dead Can Dance, baignant dans cet écho lointain et presque mystique, à un gros mur de son saturé et une volée de blasts typiques du black.
Puis vient le tour d’
Impavida qui impose un son plus tourmenté, jouant volontiers avec les dissonances (le début de Wahn & Stille), créant un côté légèrement disharmonique qui accentue cette épaisseur mystérieuse et impose un côté plus sombre. La différence se fait surtout au niveau des vocaux, avec ce chant black lointain, extrêmement étranglé et malsain, un accordage de guitare plus bas et des blasts plus agressifs. En fait, la partie d’
Impavida s’impose comme une suite logique à celle de Vuur & Zidje, le passage dans le monde des ombres après l’agonie du monde des vivants. Wahn Stille clôt superbement le split, rappelant autant
Helrunar que
Dolorian ou
Blut aus Nord, délivrant un déchaînement de violence et de mélancolie hypnotisant de 14,10 minutes sur lesquelles parties furieuses et blastées alternent avec ralentissements propices aux arpèges tordus et à une basse aux pulsations morbides.
Voilà donc un split intéressant, qui a le mérite de faire (re)découvrir deux groupes prometteurs (pour moi, mention spéciale à
Impavida, plus sombre, varié et violent). Si vous aimez les ambiances froides et mélancoliques, les atmosphères denses et hypnotiques, les musiques qui font voyager et permettent d’explorer la dichotomie entre l’ombre et la lumière, ce split est fait pour vous. Entre la morsure du feu et la douceur de la soie, plus besoin de faire son choix !
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