Parmi les clones de "
Moonsorrow", on connait bien entendu les allemands de "
Finsterforst". Mais, à vrai dire, peu connaissent encore "
Draugnim". Un groupe plutôt talentueux, suivant lui aussi de près les traces de son compatriote finlandais depuis pas mal d'années déjà. "
Northwind's
Ire" et surtout "
Horizons Low", tous deux sorti chez Spinefarm ont connu un certain succès. La signature en 2015 chez le nouveau label référence du black metal Debemur Morti Productions, marque une tournure au sein de la formation. Celle-ci cherche assez clairement à se rapprocher du circuit black metal, davantage que du circuit pagan. Cela semble se confirmer par les différentes déclarations autour du troisième album à venir, les photos promo révélant un trio des plus inquiétants, ou encore la pochette morbide du volume en question. Tous les indices nous mèneraient donc vers la mort. Tous les chemins y vont. Et le groupe prévient que toute lutte est impuissante. C'est ainsi que naquit "
Vulturine", une oeuvre sobre et froide qui perturbe quelque peu par son approche plus épurée, mais qui suit toujours assidûment la piste de "
Moonsorrow".
Tout commence sous la pluie. "
That Nature Is
Hate" nous impose le mauvais temps, un ciel couvert de lourds nuages noirs et d'orages, ceux bien sûr en provenance des instruments de la bande. La musique est céleste dans le pur esprit,la solennité et l'entrain du groupe "
Moonsorrow", mais insistant davantage sur la fibre black metal. Toutefois, curieusement, il faut retenir cet extrait parmi les plus enthousiastes et vibrants de la galette. L'offensif "Drums of
Black Death" nous offre un nouveau passage féerique, une vision céleste et épique qui doit beaucoup à ses formidables et puissants battements, aussi bien qu'à sa couverture atmosphérique. Force et volupté sont mêlées pour alimenter un pagan metal envoûtant. Le sentiment n'est pas loin d'être similaire pour ce qui est de l'énigmatique "
Serpent Stone". Un poil plus mélancolique, quasi effacé en entame, mais prenant vite une démarche épique, davantage à la "
Bathory" d'ailleurs. Ce qui intrigue dès les premiers instants. Le pagan y est particulièrement solennel et pesant. Quelques soubresauts sont perceptibles à partir du milieu de la piste. L'effet s'estompe et la pression monte, prenant une bonne tournure ascendante.
La pression est néanmoins permanente et présente d'entrée pour ce qui concerne le frénétique "A Passage in
Fire". Le chant presque growlé de Chimedra rejoint cette fougue. Une fougue peut-être pas très subtile, mais assez prenante pour autant. Elle va trouver une sorte de point d'arrêt peu après le milieu de la piste, pour un black metal au pas à pas, prédateur. Le chant là devient alors plus gras et pâteux. A partir d'ici, la piste s'essouffle et s'érode à défaut de produire un véritable renouvellement. La sobriété, mâtinée de mélancolie, prévaut sur le crépusculaire, mais rude "As in Hunger, So in
Demise". On observe là une attitude quelque peu mollassonne dans le pagan de "
Draugnim". Ceci semble trouver un écho plus révélateur en ce qui concerne le froid et monotone "
Grief Unsung". S'en est même une exagération. On surprend le groupe jouer quelque peu les faux semblants à "
Primordial". Ce titre est bien ce qu'il y a de plus morose dans ce disque, mais la pure mélancolie passive créée par "
Draugnim" aurait du mal à passer sur une durée supérieure à 8 minutes.
"
Draugnim" a changé, juste un peu, juste un chouia, un doigt, comme qui dirait. C'est néanmoins suffisant pour s’apercevoir que le groupe réagit en considération de l'évolution des scènes et des mentalités. C'est vrai que le pagan n'est plus à la fête ou à la simple vénération des dieux, à l'heure actuelle. Aujourd'hui, l'avenir se veut incertain, triste. On vouerait presque autant la mort à la vie. C'est la negative attitude La musique se veut le reflet de ce que nous ne pouvons exprimer. Une rage contenue ou l'acceptation de la fatalité quand nous nous sentons impuissants. Pour en revenir à la musique, on en arriverait presque à regretter le sens épique pur et dur de "
Northwind's
Ire" ou encore les quelques incursions acoustiques et folkloriques de "
Horizons Low". Le "
Draugnim" de 2016 est à la fois grave et terne, mais ne renonce toujours pas à "
Moonsorrow". Cette fascination se vérifie aussi par la présence de Henri Sorvali dans la phase mastering de ce troisième long volume du trio finlandais. "
Vulturine" révèle noirceur, sobriété et obstination. C'est presque là l'état d'âme d'un vieillard têtu.
14/20
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire