Devathorn est un groupe encore assez peu connu sur la scène grecque, et qui, depuis sa création en 2002 s’est montré plutôt discret : un full length en 2007 et deux splits avec des groupes underground, le moins que l’on puisse dire, c’est que le combo athénien ne court pas après la reconnaissance et préfère œuvrer en solitaire dans l’ombre, peaufinant à l’écart de la meute bêlante son art ésotérique à la recherche de la Révélation. Néanmoins, il se peut qu’il ait malgré tout attiré l’attention des amateurs de la scène grecque, notamment de par son affiliation avec
Acherontas, avec qui il partage son guitariste, Saevus Helcath.
D’ailleurs, au-delà de cette similitude de line-up, le rapprochement entre les deux groupes, tous deux réunis sous la bannière de World Terror Committee, est plus qu’évident, ne serait-ce que dans les thématiques abordées et le côté spirituel inhérent à la musique, développant un satanisme éclairé à la recherche de la connaissance et de la vérité intérieure. Voici donc
Vritra, deuxième full length de
Devathorn, qui nous propose 67 minutes de musique sombre, à la fois décadente et envoûtante, à l’aura quasi religieuse, et dont le superbe artwork annonce la couleur.
Premier point que l’on peut souligner, en comparaison des compatriotes d’
Acherontas,
Devathorn propose quelque chose de plus direct et puissant, un côté death n’étant pas exempt de certains passages, notamment via ces parties de batterie qui imposent une rythmique lourde et syncopée. Le tout n‘est d’ailleurs parfois pas sans rappeler un
Behemoth mid tempo qui serait particulièrement porté sur les ambiances (le début de
Cathedral of Set, massif et headbangant, le début d’Ars
Diaboli qui pilonne sur les éructations rauques d’Althagor, quelque part entre black et death, Veritas Universalis). Le premier titre de l’album, Veritas Universalis, démarre sur ces chœurs nébuleux, et un riff lourd à la fois hypnotique et entraînant, appuyé par une batterie puissante et rythmée, avant que ces vocaux blasphématoires à la puissance redoutable ne viennent emballer un titre de 6,39 minutes à l'identité certes assez quelconque mais d’une exécution et d’une efficacité redoutables. Doctrina Fide, plus rampant et insidieux, distille ses harmonies vénéneuses sur une rythmique d’une lourdeur suffocante avant de redoubler de violence dès 2,02 minutes sur le martèlement de la batterie qui vient soutenir un tempo plus soutenu, et la résonance funèbre de riffs résolument noirs et maudits.
Même si le black de
Devathorn ne cherche absolument pas à faire dans l’originalité, basant son art sur une influence orthodoxe très présente (les chants religieux au début de Veritas Universalis, Ars
Diaboli ou à la fin de Venomous
Advent, les cloches de Cantibus As Messore, Sanctus Mors, les arpèges dissonants de Sapphires of Vrittra, qui se fend d’un passage acoustique et païen dès 4 minutes, semblant invoquer les divinités chtoniennes en un rituel millénaire et blasphématoire, ces mid tempos rampants, ces riffs insidieux et sombres et cette batterie à la résonnance caverneuse qui semble vouloir nous lobotomiser par ses coups de grosse caisse sourds), la musique des Grecs est assez variée, comportant des changements d’ambiance et de tempo salvateurs qui confèrent un relief et une dynamique intéressants à l’ensemble.
Le tout est nimbé de cette aura mystique mise en avant par des guitares aux accents orientalisant (
Cathedral of
Seth, Sapphires of Vrittra, au riffing melecheshien), un son aux petits oignons qui met en avant les basses, et les vocaux sentencieux d’Althagor qui livre une performance assez saisissante. Certains passages peuvent faire penser à du
Rotting Christ, avec ces blast mid tempo à la lourdeur si typique et ces riffs à l’enrobage à la fois chaud et sulfureux (le début de Veritas Universalis, Principles of Chaos), et le tout se termine sur le très bon Promotheus Descent, qui du haut de ses 10,38 minutes est l’un des titres les plus complets de l’album, débutant sur ces arpèges lancinants et ce riffing lent et majestueux très typé doom, avant de s’envoler dans des contrées plus rapides avec ces grattes de toute beauté au feeling indéniablement grec, toujours plongées dans cette atmosphère aussi sacrée qu’impie. Draco Adligat Mundi vient achever la liturgie, titre entièrement ambiant imprégné d’une spiritualité palpable et presque troublante.
Certes, avec 67 minutes,
Vritra est un peu long, et le combo ne parvient pas toujours à éviter la redondance, avec certains titres plus dispensables (The Venomous
Advent), et des riffs qui finissent inévitablement par se répéter, ceci dit, l’atmosphère qui se dégage de ces onze titres est prenante à défaut d’être exceptionnelle, à la fois noire, pesante et ésotérique, et dans cette catégorie de metal à tendances religieuses,
Devathorn s’en tire avec les honneurs, loin devant leurs compatriotes déchus d’
Acherontas qui se sont plantés en beauté en cette même année 2015. Voilà donc une réalisation tout à fait honnête qui plaira aux inconditionnels du genre, à ranger aux côtés de votre Bible Sataniste et de votre kit d’alchimiste.
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