Pas évident d’occuper son temps en ces temps perturbés et certains l’ont bien compris. Privé de toute obligation scénique avec
Firewind et délesté depuis déjà quelques années de sa contribution avec
Sinbreed, Herbie Laughans a vu qu’une partie de l’année 2020 se dressait vierge face à lui.
Souvent parolier ou exécutant comme dans
Firewind ou
Avantasia, l’allemand a cette fois-ci décidé de prendre le taureau par les cornes, de composer un album quasiment seul et de réunir une fine équipe autour de lui. Autant dire que les musiciens ne sont pas tombés de la dernière pluie, le label non plus. C’est donc Carsten Stepanowicz qui l’accompagne aux guitares (avec qui il a collaboré pour l’unique album de Radiant en 2018), le vétéran André Hilgers (ex-
Rage, ex-
Axxis,
Silent Force) en position de marteleur et le plus inconnu (pour ma part) Dominik Stotzem à la basse. Ajoutons Miro aux arrangements, l’inusable Sascha Paeth aux manettes et Frontiers Records pour distribuer tout ça et nous avons le « produit » idéal de ces dernières années. Préfabriqué pour certains, né pour combler l’ennui pour d’autres mais trop souvent inapproprié sur la durée, Sonic
Haven propose ainsi avec "
Vagabond" son premier disque en espérant qu’il ne soit pas le seul. Car il est bougrement bon et Frontiers pourrait cette fois-ci bien s’appuyer sur cette production certes pas vraiment surprenante mais totalement maitrisé de bout en bout.
Inutile de parler de style, on sait d’office que c’est face à un gros mur power metal allemand que nous allons avoir affaire. Le chant de Herbie colle parfaitement à ce style mélodique et rugueux, entre
Helloween et
Edguy avec un soupçon de conformisme à la
Iron Savior et de romantisme épique à la
Gamma Ray. Vous avez dit allemand ?
Certes pas original, le titre éponyme nous prend à froid directement avec un riff rapide et diaboliquement efficace, rapidement suivi par un cri d’Herbie et d’un tempo rapide pour lancer l’album. La production est aux petits oignons, tout se distingue parfaitement et on se prend rapidement à chantonner le refrain, avant même de le connaitre complètement, preuve du savoir-faire des musiciens ici présents. A la différence d’un
Magnus Karlsson que je mentionnais hier, on sent ici une énergie dévorante et un plaisir communicatif très propre à
Helloween ou
Edguy justement, qui se transmet littéralement à l’auditeur. Les parties de guitares sont virtuoses sans tomber dans la démonstration finnoise (pas de grandes échappées à la
Stratovarius ou
Sonata Arctica ici). C’est simple (façon de dire), efficace et en acier trempé.
Power dans le sens le plus propre du terme.
"Back to Mad", second extrait de l’album, se veut un peu plus hard rock dans son riff mais bénéficie toujours de la puissance d’une production « made in Paeth » et ça se ressent dans l’impact du son et l’emphase d’un refrain où le clavier prend un peu plus de place.
Tout est présent dans l’album sans que cela sonne trop téléphoné, même si le cahier des charges est bien rempli. Pour autant, on ne s’ennuie jamais et les différentes phases abordées le sont toujours avec allant et énergie. Des rapide et bruts "
Nightmares" ou "
Blind the Enemy" en passant par du mid tempo "Keep the
Flame Alive" (aux claviers plus en avant) ou encore le taillé pour le live "
End of the World" (vous noterez la grande originalité des titres de chansons) et son riff d’intro déjà entendu des milliers de fois mais curieusement efficace cette fois-ci.
"The Darker Side" s’apparente au morceau plus épique et sombre (étonnant ?), avec un bon gros riff appuyé et plus lent et une ambiance globalement pesante. Le riff s’emballe dans la seconde partie afin de gagner en vitesse et en épaisseur, comme dans le pur style du heavy épique, Herbie jouissant de ses capacités vocales toujours aussi étonnantes, que ce soit dans son timbre rugueux et agressif ou dans un style bien plus mélodieux, parfois à la limite de la narration. "
Save the Best for Last" fait office de ballade de rigueur pour terminer totalement le tableau.
"
Vagabond" ne surprend donc pas mais est vraiment un joli voyage réalisé par des professionnels chevronnés et par un chef d’orchestre qui avait vraiment envie de laisser aller sa fibre créatrice cette fois-ci. Le potentiel est là, gageons dorénavant que les emplois du temps surchargés de chacun donneront un avenir positif à cette formation qui ne demande qu’à murir et prendre de l’épaisseur, un peu comme
Serious Black en son temps (d’un all-star-band à un vrai groupe). C’est tout le mal que l’on souhaite à cet homme aux
Vagabonds du nouveau millénaire, ces artistes incompris et solitaire de l’âme là où la société ne souhaite plus les gérer. L’histoire d’une vie pour eux.
« You´re alone and misunderstood
There's no place for you, there's no hood
They don´t see what´s inside
Like a
Vagabond”
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