Vouloir tenter l'expérience de la scène metal symphonique à chant féminin pour les jeunes formations semble constituer un pari risqué aujourd'hui plus qu'hier. Nombre d'entre elles, en effet, s'y sont essayées et ont prématurément disparu. Toutefois, ce quintet américain fondé en
2012 à San Diego, en Californie, pratiquant un metal mélodico-symphonique gothique dans le sillage conjoint de
Delain,
Kingfisher Sky et
Autumn, entend bien relever, prudemment, ce défi.
Aussi, la frontwoman au timbre proche de celui de Judith Rijnveld (
Kingfisher Sky) et claviériste Cassie Morris (Ruines ov
Abaddon) et ses acolytes (Ryan Leaver (ex-Aenea) à la guitare et aux growls ; Joe Bennett (Ruinist) à la guitare ; Wena Velsaco (Cowgirls From
Hell) à la basse ; Shawn Cameron (
Carnifex) à la batterie) nous livrent un EP éponyme de 6 titres bien inspirés, mais à la production friable, comme message introductif.
Dans une orientation metal symphonique mélodique, le combo étasunien marque ses premiers points. Ainsi, sur une rythmique enjouée et un riffing corrosif surplombant de sinueuses nappes synthétiques, les engageants « Fear Is in Your
Eyes » et « When It Comes Time », à mi-chemin entre la mélodicité d'un
Delain des premiers émois et les harmoniques de
Kingfisher Sky, délivrent chacun d'entêtants refrains enjolivés par les claires inflexions de la sirène. Dans cette mouvance, on retiendra encore le tubesque «
Unicorn Death » aussi bien pour ses judicieuses variations rythmiques et atmosphériques que pour ses riffs mitrailleurs, ses gimmicks et surtout son refrain catchy. Si l'on appréciera la dynamique percussive, le fin legato à la lead guitare et d'insoupçonnés changements de tonalité, sur les trois pistes, tant le sur-mixage de l'instrumentation que la longueur de l'introduction du premier titre nous laisseront perplexes.
Dans une veine metal symphonique gothique plus sombre, le groupe sait également nous retenir. Ainsi, dans le sillage atmosphérique d'
Autumn à l'aune de «
Cold Comfort », se calant sur le schéma oratoire de la Belle et la Bête, le vénéneux « Sever » comme le tortueux, mais néanmoins mélodieux « Ride the Sun » jouent tous deux habilement des contrastes ; vocaux pour le premier, rythmiques pour le second. Cependant, le manque de profondeur de champ acoustique ne saurait se faire oublier, tendant à comprimer l'orchestration ; le sous-mixage du chant contribuant pour sa part à étouffer aussi bien les graciles volutes de la déesse que les growls ombrageux de son acolyte.
Pour compléter son offre, le combo californien nous convie à une orientation symphonique prog de son propos et qui lui sied plutôt bien. Ainsi, à l'instar de «
Endless Sleep », de délicats arpèges au piano secondent les virevoltantes et enivrantes patines de la maîtresse de cérémonie, avant que ne déferlent des riffs acérés et d'incessantes frappes de fûts. Ce faisant, couplets bien ciselés et refrains immersifs s'enchaînent sereinement et laissent entrevoir des séries d'accords savamment élaborées, que n'auraient nullement reniées les maîtres inspirateurs de la jeune troupe.
Aussi, c'est au fil des écoutes que finit par nous impacter le méfait, révélant ainsi la fertile inspiration du collectif ricain. Et ce, à condition d'éluder un enregistrement encore lacunaire, un mixage peu équilibré et des finitions manquant cruellement à l'appel. Marchant sur les pas de leurs aînés, s'ils livrent une œuvre prégnante et diversifiée dans ses schémas vocaux et rythmiques, nos compères ne dévoilent par encore une identité artistique à part entière et tendent à éviter toute prise de risques, pourtant requise dans un si concurrentiel registre metal. C'est dire qu'à la lecture du propos, un potentiel technique et mélodique s'esquisse déjà, mais que le groupe devra prendre le temps de valoriser, à la fois par un travail en studio plus minutieux et un set de compositions plus personnelles. La balle est désormais dans leur camp...
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