Une fois n’est pas coutume, je vais vous présenter un petit groupe finlandais à peu près inconnu au bataillon. Sammas’
Equinox est un groupe pour le moins mystérieux, dont on ne connaît même pas exactement la date de formation. Après deux démos, le groupe est repéré par le label
Signal Rex qui le signe et regroupe les enregistrements de la formation en une compilation. Après un split avec Emanating
Void en début d’année, le trio sort enfin son premier album,
Tulikehrät, 32 minutes d’un black metal mid tempo ésotérique et intemporel.
On retrouve le poids des millénaires alangui par ces volutes d’encens dès l’intro ambiant et ritualiste de
Fire, dont le crépitement de cette flamme éternelle est parfaitement audible, nous plongeant dans ces antiques cérémonies païennes comme les mystères d’Eleusis. Pour le reste, on a un morceau principalement mid tempo au riffing entêtant et à la batterie sourde, le tout mené par une voix black grave et articulée. La musique n’est jamais vraiment agressive, nous faisant voyager grâce à ces mélodies de guitare et de clavier enchevêtrées qui prennent tour à tour une dimension épique (le début de The Staunching) ou plus intimiste, voire carrément ambiant (la fin de Northern
Gate of the Sun). On pense pas mal à la scène grecque ou la scène polonaise du début des années 90, notamment grâce à cette présence de claviers discrets mais presque omniprésents qui renforcent et transcendent les harmonies sombres des guitares, leur conférant ce sceau sacré et mystique. On peut vraiment parler ici de black atmosphérique, même si on a finalement quelque chose de brut, chaleureux et organique (
Carved in
Stone, qui porte bien son nom), avec ce chant rauque très mis en avant et ces percussions sourdes et sauvages qui résonnent comme des tambours païens. Durant 32 petites minutes, Sammas
Equinox exhume six hymnes oubliés de la poussière du temps, nous renvoyant des millénaires en arrière, dans l’obscurité d’un temple ignoré de tous.
L’accordage bas des guitares, cette saturation baveuse ainsi que le son à la fois mat et étouffé de la batterie accentuent encore cette sensation d’éloignement, tant spatial que temporel, comme si ces accords grésillants et cette psalmodie électrique nous venaient d’un autre monde, tandis que le tempo lent, lourd et mélancolique qui rythme l’ensemble, parfois subjugué par les incursions d’une basse malicieuse (Mustat Vedet) nous berce en douceur.
Pour conclure, Sammas’
Equinox nous offre un beau voyage dans les arcanes d’une spiritualité ancienne que les amateurs de
Rotting Christ,
Graveland ou, plus récemment, Runespell, devraient apprécier. Après d'innombrables siècles, la flamme brûle toujours, à l’instar du feu sacré des Vestales, et après avoir embrasé la Mésopotamie et le bassin méditerranéen, c’est maintenant au milieu des glaces de Finlande qu’elle luit comme un phare dans la nuit.
« Heureux celui des hommes qui a vu ces choses ; mais celui qui n'a pas eu part aux sacrements, celui-là n'aura pas un sort égal dans les ténèbres de la mort. »
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire