Combattre, encore et toujours, constamment et envers tous, pour se libérer de ses chaines et porter haut l’étendard de ses propres idéaux.
Dimicandum, tiré du latin, signifie donc la faculté de combattre et de s’imposer dans la difficulté.
On peut dire que c’est un peu le sort et le visage que prend le heavy metal en cette seconde décennie du troisième millénaire. Peu à peu abandonné, puis remis au goût du jour dans une veine bien plus mélodique et speed au début des années 2000 (les
Edguy,
Stratovarius,
Dragonland et
Sonata Arctica en sont devenus les maitres), l’essence la plus pure et triviale du genre revient quant à elle peu à peu dans les mœurs depuis quelques temps. Effectivement, une vague revival (la même se produit d’ailleurs dans le thrash) grandi de plus en plus, avec des groupes copiant allègrement leurs aïeux (
Katana par exemple) ou d’autres s’évertuant à créer quelque chose de nouveau malgré un vibrant hommage aux anciens (
While Heaven Wept pour ne citer que lui).
Dimicandum s’inscrit plutôt dans cette tendance, sachant faire parler le passé tout en se projetant clairement vers des éléments modernes et plus extrêmes…et ce n’est pas leur nationalité ukrainienne qui sera un frein à l’excellence de leur musique !
Vieux de seulement trois ans avec une moyenne d’âge ne dépassant pas 21/22 ans et un unique album à leur actif,
Dimicandum est en effet encore une jeune pousse mais "The
Legacy of Gaïa" ne laisse pourtant que peu de place à l’amateurisme. Directement, le premier morceau éponyme met les choses au clair, avec une production claire et limpide, un riff puissant qui tue et surtout un chanteur talentueux alternant un chant très typé old school avec des growls parfaitement maitrisés créant un superbe contraste. Les rythmiques sont épaisses, la caisse claire perce la muraille érigée par les grattes et des claviers éparses mais indispensables posent une ambiance épique sans jamais trop en faire. Épais et sans concession, le riff principal colle un véritable coup de pied au cul avant un phrasé bien plus mélodique sur le refrain, témoignant déjà d’un fort potentiel d’écriture et d’une intelligence notable.
Roman Semenchuk, chanteur guitariste du combo, mais aussi unique compositeur et parolier, a écrit un premier opus costaud et fort qui surprend car il sort clairement de nulle part. Taillé comme un single, "Give Me a Name" répète son refrain inlassablement même si on regrettera ici le chant clair du jeune ukrainien, pas toujours à la hauteur et manquant de justesse, restant dans des mediums qui pourront irriter certains. Un solo bien senti retentit avec toujours cette légère essence épique distillé par la demoiselle du groupe, Anastasia Loginova, avant justement un noircissement induit par le chant hurlé du jeune Roman. On ne pourra pas passer non plus sur l’énorme "Indigo Child", introduit par un cri caverneux avant un riff qui pourrait paraître désuet mais pourtant tellement efficace, et surtout s’inscrivant dans une personnalité propre, dans leur propre patte. L’alternant entre chant viril et growl criard ou profond (ce vocaliste a de l’avenir s’il perfectionne proprement son spectre vocal) est franchement inspiré et ne souffre ni des poncifs habituels du genre (crié sur les couplets et clair sur le refrain) ni d’un schéma préétabli se répétant sur chaque morceau.
Ainsi, le puissant "Bring me
Down to my Atlantis" tire plus sur le thrash par son riff gras et brut, même si des mélodies viennent se greffer naturellement autour au long de la composition. Le morceau est une épopée perpétuelle entre accélérations agressives et passages plus posés et atmosphériques que l’on pourrait renvoyer Ã
Amorphis ou
Sara Lee. C’est d’ailleurs le cas plus explicitement sur la très réussie ballade (fait assez rare pour être cité, d’autant plus sur un premier album où l’essai est bien souvent d’un manque d’aspérité ou d’émotion criant) "At the
Gates of
Ishtar" (l’une des portes de Babylone). Personnelle et poignante, elle tire autant des grands groupes scandinaves qu’à un
Metallica dans sa période la plus mélodique ("Load"). Sans growl, le titre nous emmène pour peu que l’on soit pris dans son ambiance et son solo est une petite perle en soit.
"The
Legacy of Gaïa" se termine (trop vite) sur un "When the Suns Burns
Out" plus moderne et syncopé, dévoilant probablement des pistes sur les travaux d’avenirs de
Dimicandum mais toujours avec une réussite complète et un talent d’écriture qui laisse augurer de superbes choses pour l’avenir. Les riffs sonnent très frais, pendant que le chant arraché de Roman s’éraille d’une façon viscérale ne laissant pas indifférent…ce qui ne l’empêche pas de repartir dans les aigus quelques secondes plus tard, mais un chant clair avec des « couilles », à des années lumières des groupes de metalcore pullulant depuis des années sur la scène européenne. Car elle se situe bien là cette différence, cette virilité même dans la mélodie, cette vision toujours metal ne se prostituant jamais sur l’autel de la pop, cette poigne intacte même lorsque la mélodie est prédominante.
Certes, "The
Legacy of Gaïa" est court (trente-sept minutes), il n’est qu’un premier album et le groupe est actuellement sur un petit label. Mais s’ils se font remarqués (ce qu’ils méritent amplement), qu’ils renouvellent ce type de performances dans les mois à venir avec une évolution naturelle et une production encore plus percutante, alors
Dimicandum est capable d’exploser aux yeux de tous, et de faire très mal. Sans être foncièrement un renouveau, les ukrainiens démontrent que le heavy traditionnel peut vivre en le mariant avec des phrases plus extrêmes sans sacrifier sa flamme incandescente et éternelle. La relève est là et c’est avec classe et identité qu’elle se présente…
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