Quelle énergie éolienne peut bien pousser les fraîches formations à espérer s'illustrer encore aujourd'hui au sein d'un registre metal on ne peut plus surinvesti sans encourir, à leur tour, le risque d'une désaffection prématurée de cette scène-là ? Nombreux sont leurs homologues et compatriotes à en avoir fait l'amère expérience. Une épineuse question que s'est légitimement posé ce jeune duo brésilien originaire de
Rio de Janeiro et à laquelle il apporterait déjà quelques éléments de réponse...
Prudence est mère de sûreté, dit-on... Un adage à suivre scrupuleusement, et plus particulièrement en terre brésilienne, l'un des fers de lance du genre en Amérique du Sud, et pourvoyeur depuis plus de deux décennies de nombreuses et talentueuses troupes, dont certaines déjà bien impliquées à l'international, parmi lesquelles :
Vandroya,
Lyria,
Perpetual Legacy, ou encore
Save Our Soul. Conscient des enjeux d'un tel investissement, message aurait été bien reçu par nos acolytes...
Créé en 2017 par la parolière et frontwoman au timbre chatoyant Ludmila Reis, et sous l'impulsion conjointe du compositeur et pluri-instrumentiste Celo Oliveira, le discret combo s'est laissé le temps nécessaire à la maturité de ses portées et de sa plume. En effet, ce n'est que deux ans plus tard qu'il enfante de son premier bébé, « The Darkest Day », un album généreux de ses 53 minutes où s'enchaînent sereinement 11 pistes témoignant chacune d'un enregistrement de bon aloi et d'un mixage parfaitement équilibré signés Celo, réalisés au Kolera
Home Studio. Ce faisant, on effeuille une œuvre rock'n'metal mélodico-symphonique atmosphérique à la fois pétrie d'élégance, troublante, frissonnante et romantique, dont le set de compositions serait au carrefour d'influences entre
Within Temptation,
Delain,
Anathema,
Mattsson,
Evanescence,
Lacuna Coil,
Autumn et consorts.
C'est au cœur d'une forêt de pistes à la cadence mesurée que le collectif brésilien nous plonge, révélant, de fait, d'alléchants atours, développant alors de vibrants arguments rock'n'metal symphonique atmosphérique, dont certains d'ores et déjà inscriptibles dans les charts. Aussi, un pavillon déjà sensibilisé aux travaux de leurs maîtres inspirateurs sera-t-il naturellement aspiré par les grisantes lignes mélodiques et les riffs ronronnants exhalant des ''delainiens'' et entraînants mid tempi « Drifting Away » et « Mirror
Image ». Mis en habits de lumière par les pénétrantes inflexions de la sirène, dotés de refrains catchy et de judicieuses et saisissantes variations atmosphériques que n'auraient nullement reniés ni
Vandroya ni
Lyria, et fortement chargés en émotions, aucun des deux brûlots ne consentira à lâcher sa proie d'un iota. On ne sera pas moins impacté à la fois par les vibes enivrantes et les délicates sinuosités atmosphériques transpirant de «
Mistake », « The Darkest Days » et « No Man's
Land » ; trois ensorcelants efforts, le premier dans la lignée d'
Evanescence, le second dans celle de
We Are The Fallen, le troisième dans l'ombre d'
Autumn.
Un tantinet moins tubesques mais dans une énergie similaire, d'autres pistes n'en tirent pas moins leur épingle du jeu. Ce qu'illustrent « Pieces » tout comme «
Masquerade », aériens mid tempi aux riffs épais et ondulants adossés à une rythmique un poil plus sanguine, dans la veine coalisée de
Mattsson et
Anathema. Pourvus d'enchaînements couplets/refrains sécurisés doublés d'une sente mélodique aussi exigeante dans leur principe d'émission que finement restituée, ces deux galvanisants propos se révéleront propices à une irrépressible magnétisation du tympan. Quant à « Rise and
Fall », tonique et frissonnante offrande dans le sillage d'un
Delain estampé « Moonbathers », elle n'en révèle pas moins de séduisantes séries d'accords. De par ses couplets bien customisés que relayent des refrains immersifs à souhait et mis en exergue par les ondoyantes patines de la déesse (qui, ici, ne sont pas sans renvoyer à celles de Dudás Ivett (
Tales Of Evening)), le propos saura gagner le cœur de celui qui y aura plongé.
Lorsqu'il nous mène en d'intimistes espaces, le duo n'a pas davantage tari d'inspiration, générant plus prestement encore l'inconditionnel déclenchement de la petite larme au coin de l'oeil. Ainsi, notre fibre émotionnelle ne tardera pas à être impactée à l'aune des magnétiques harmoniques distribués sur « Hideplace », prégnante et radieuse power ballade à mi-chemin entre
Within Temptation et
Lacuna Coil. Et ce ne sont ni les caressantes modulations de la douce ni la féline ligne de basse qui nous débouteront de l'instant privilégié, loin s'en faut. La magie opérera tout autant à l'aune de « Hyperbolic », ballade romantique jusqu'au bout des ongles aux airs d'un slow qui emballe, dans la lignée d'un
Autumn, seconde période. Certes pourvue de refrains convenus, et en raison d'un sémillant cheminement d'harmoniques, la touchante offrande ne s'en révélera pas moins addictive. Et comment ne pas succomber aux violoneuses ondulations corroborant les limpides volutes d'une interprète alors touchée par la grâce insufflées par la ballade atmosphérique « A New Stand » ? Bref, un moment ouaté d'une rare puissance émotionnelle, qui pourrait bien finir par faire école.
Résultat des courses : on effeuille une œuvre subtile et pénétrante, voguant entre rock atmosphérique et metal mélodico-symphonique, dont l'accroche s'opère quasi immédiatement, et qui jamais ne se révèle impulsive ni empreinte d'une quelconque marque d'agressivité. Ce qui n'exclue nullement l'une ou l'autre accélération ou changement subreptice de tonalité, nos deux compères réservant ainsi quelques effets de surprise, et ce, au sein d'un message musical à l'architecture somme toute classique. Par ailleurs, le combo a beaucoup appris de ses maîtres inspirateurs et digéré suffisamment ses sources pour apposer son sceau sur chacune de ses compositions. Un introductif et encourageant mouvement profondément zen...
Note : 14,5/20
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