Entreprise ô combien périlleuse pour les jeunes loups que de plonger tout de go dans le chaudron bouillonnant du metal symphonique à chant féminin. Nombreux sont ceux à en avoir fait l'amère expérience avec pour corollaire une disparition précoce des tabloïds pour la plupart d'entre eux. C'est pourtant dans cette arène que se lance, sans complexe, ce sextet colombien originaire d'Itagüí, une verte formation qui, à l'instar de ses compatriotes d'
Athemesis et
Nova Orbis, caresse, elle aussi, le légitime espoir d'essaimer ses gammes et ses arpèges sur la scène locale, voire internationale. C'est, pour le moins, l'ambition affichée par nos six compères, à savoir : la frontwoman
Sara David, le guitariste et grunter
Emanuel Ocampo, le guitariste Gopal Leon (
Lord Thanatos), le claviériste Lucas Ocampo, le bassiste Juan Esteban Potes et le batteur Tomás Londoño.
Dans ce dessein, le groupe n'a nullement cherché à précipiter les événements, loin s'en faut, n'accouchant de son premier bébé, le présent EP 6 titres «
The Awakening », pas moins de six années suite à sa sortie de terre en 2013. Aussi, effeuille-t-on une œuvre metal symphonique gothique et progressif à la fois frondeuse, entraînante, parfois complexe et énigmatique, dans la lignée d'
Epica,
After Forever,
Therion,
Aesma Daeva,
Xandria et
Nightwish, calée sur le schéma oratoire devenu classique de la Belle et la Bête. Enregistrées et mixées par Sebastián de los Rïos (406 Studios) et mastérisées par Sebastián Lopera, les 30 minutes de cette auto-production jouissent d'une belle profondeur de champ acoustique doublée d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation.
La structure générale de l'album ne déroge pas aux codes du genre, l'opus démarrant par une classique, brève, mais seyante entame instrumentale symphonico-cinématique («
Arise »), alternant passages enflammés et en retenue, pour s'achever sur une fresque symphonique progressive («
Forgotten Cross »). En outre, le potentiel technique affiché demeure difficile à prendre en défaut, les arrangements instrumentaux dispensés s'avèrent de bonne facture et les enchaînements intra-pistes plutôt proprets. A priori, rien qui ne laisse transparaître une ombre quelconque au tableau...
Malgré les qualités de la technicité et de la production d'ensemble, la magie n'opère qu'en de rares circonstances. Parmi les pistes les plus enfiévrées, on retiendra bien l'up tempo « Sweet Ears » qui, aux faux airs d'
Epica, avec un zeste de
Xandria (première période) dissémine une énergie aisément communicative. Dans ce champ de turbulence où abondent les montées en régime du corps orchestral, évolue un duo en voix de contraste bien habité, les cristallines mais flottantes volutes de la belle répondant point pour point aux graveleuses et profondes attaques de son acolyte de growler. Une offrande metal symphonique gothique glissant sur d'amples nappes synthétiques, recelant certes un vibrant solo de guitare, mais accusant une tenace répétibilité de son cheminement d'harmoniques ainsi qu'un dispensable pont techniciste. Quant à l'emphatique, épique et obscur «
Forgotten Cross », dont les franches accélérations et les riffs rageurs rappelleront ceux d'
After Forever, il nous projette au beau milieu d'une bourbeuse série de notes, dans une atmosphère oppressante, se révélant alors peu propice à une inconditionnelle adhésion.
Quand il desserre un tantinet la bride, le combo peinera plus encore à trouver quelques clés pour nous rallier à sa cause. D'une part, à mi-chemin entre
Epica et
Therion, le mid tempo progressif et syncopé «
Lost in Myself » n'a de cesse de faire résonner ses tambours et vrombir sa basse, distillant au passage un grisant tapping ainsi qu'un bref mais vibrant solo de guitare. On regrettera toutefois de se voir imposer une ligne mélodique bien peu oscillante, voire linéarisée, et sur laquelle se greffent les patines de nos deux tourtereaux ; duo en voix de contraste au sein duquel la sirène concède à nouveau une inconsistante tenue de note. Ce ne sera pas le tortueux mid tempo «
War (The Seal of Our Ambition) », affublé de séries d'accords peu ragoûtants et d'enchaînements mal ajustés, qui sauvera davantage le navire du naufrage...
A la lecture de ce premier essai, on comprend qu'en dépit de leurs louables efforts logistiques et techniques, nos acolytes ne sauraient dores et déjà s'imposer parmi les espoirs du metal symphonique à chant féminin. En outre, le modeste opus ne jouit ni d'une enveloppante lumière mélodique ni d'impactants harmoniques tout en ne concédant que peu de prises de risques. Il conviendra également de viser à une pluralité de l'offre sur les plans atmosphérique, rythmique et vocal, tout en variant les exercices de style et en gagnant en maturité compositionnelle pour espérer opposer une farouche résistance à leurs homologues, toujours plus nombreux à évoluer dans ce registre metal. Bref, une œuvre dans un mouchoir de poche, entre autres...
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire