« Soudain, nos têtes se tournèrent simultanément vers les montagnes que venait de franchir le petit avion. Nous vîmes alors à très haute altitude un objet volant en forme de cigare, argenté, sans ailes, sans appendices, qui planait lentement sans le moindre bruit, et semblait glisser vers nous ; puis il s’arrêta et resta immobile dans le ciel. Le Dr Williamson s’exclama, au comble de la surexcitation : ‘C’est un vaisseau spatial !’ »
Desmond Leslie & George Adamski, « Les Soucoupes Volantes ont atterri », 1953
A l’instar de l’ufologue américain George Adamski ; croyez-vous aux soucoupes volantes et autres objets volants non identifiés ? Pensez-vous sincèrement qu’il puisse y avoir dans l’univers d’autres formes de vie que celles polluant chaque jour un peu plus notre vieille planète destinée sous peu à un chaos total et mérité ? Si tel est le cas, alors bravo, vous faites sans doute partie de la caste supérieure des rêveurs de ce monde abject, libres des considérations bassement rationnelles cloisonnant la pensée imaginative et donc maitres absolus de leur destin cosmique. Dans les méandres d’une vie oscillant en permanence entre fantasme et réalité, croire fermement à ce que l’on ne voit pas et à l’inverse nier dur comme fer l’existence de ce que nos sociétés nous imposent comme acquis et indubitable permet peut être de saisir, curiosité aidant, ce qui peina à être en son temps et s’avère aujourd’hui oublié, à l’image du premier album de l’ovni
Screamer.
Originaire de Kenosha dans le Wisconsin,
Screamer voit le jour en 1985 autour des guitaristes Ronny Valeo (futur-
The Electric Hellfire Club) et Michael Schantek, rejoints dans la foulée par le bassiste Paul Bigalke et le batteur Kevin Litz. Ayant enfin trouvé son vocaliste en la personne de Bill Carter,
Screamer passe les années 86/87 à établir les bases d’un heavy metal d’obédience progressive qui se voit matérialisé par la réalisation d’une démo 8 titres. Après avoir signé sur le label californien New
Renaissance Records spécialisé dans le speed/thrash et venant tout juste de sortir pour l’anecdote la version CD américaine de «
Morbid Visions » de
Sepultura,
Screamer enregistre son premier full length aux Streeterville Studios de Chicago en compagnie du producteur Tim Hale. Superbement bien nommée, la soucoupe «
Target : Earth » se pose sur Terre en août 1988 sous l’immatriculation NRCD52.
Orné d’un sublime artwork signé le dénommé Scott Jackson, «
Target : Earth » commence à transporter l’auditeur au rythme délicieusement mid-tempo du terrible « Visionary » n’étant pas sans évoquer dès les premiers riffs du duo Valeo/Schantek le heavy progressif du mythique Queensrÿche période « The
Warning »/ «
Rage for Order ». Constat également renforcé par les vocaux suraigus voir même dopés à l’hélium d’un Bill Carter rappelant dans son timbre
Geoff Tate mais aussi parfois
Michael Kiske (ex-
Helloween). Particulièrement marqué dans le genre et caractéristique prépondérante de la musique de
Screamer, le chant de Carter ne peut laisser indifférent un auditeur définitivement conquis, notamment sur l’excellent et fluide «
Forgotten One » objet d’une vénérable prouesse vocale de la part du précieux frontman midwestern à la voix de cristal. Tout aussi classieux d’un point de vue purement instrumental, le heavy à tendance progressive du quintette de Kenosha WI se veut à la fois complexe et accrocheur certes, mais surtout brillamment esthétique ; invitant de fait au rêve et au voyage à l’instar du sublime « Time
Master » et de ses atmosphères sibyllines, sans parler de soli jouissivement instinctifs et bien évidemment techniques signés la paire de maestri de la six-cordes Ronny Valeo/Michael Schantek.
Premier opus d’un jeune groupe œuvrant dans un style où la concurrence nationale s’avère être rude en cette sainte année 1988 ; comprendre les remarquables et désormais mythiques « Operation :
Mindcrime », « Transcendence » et autres « No
Exit » respectivement sortis par les valeurs sûres et maitres absolus du genre Queensrÿche,
Crimson Glory et
Fates Warning ; «
Target : Earth » sait pourtant montrer les crocs et prouver qu’il s’avère être bien plus qu’un vulgaire ersatz des légendes précitées via une vision musicale habilement constructive où le binôme rigueur technique/complexité structurelle sert à merveille l’émotion et le feeling à défaut de l’inverse. Ainsi pour exemple, l’accrocheur «
Outcast » sait facilement séduire l’heureux possesseur du pressage original de ce debut album via l’énergie sincère et communicative qui s’en dégage mais aussi et surtout les changements de rythme enrichissant le tout et garantissant à l’auditeur une écoute synonyme d’évasion en des contrées inconnues. En effet, comment ne pas expérimenter la décorporisation vers les étoiles au son du core mélodique du classieux « Future World » ou d’un envoutant «
Flame Dream » et de ses soli intergalactiques et autres parties divines de twin guitars venues de nulle-part, rappelant l’âge de gloire d’Iron Maiden et de ses bijoux « Powerslave » (1984) et « Somewhere in Time » (1986) entre autres. N’est-ce-pas là le but premier de notre chère et tendre passion ?
Présentant un nombre optimal de huit titres pour moins de 40 minutes d’un heavy metal d’obédience progressive où technique et complexité sont au service des émotions et du feeling, l’impérial premier opus de l’oublié
Screamer constitue une véritable petite perle du genre articulée autour de thèmes science-fictionnesques favorisant l’imagination et le voyage au-delà de l’appréciation de la musique pure. Fluide, cohérent et délicieusement bien composé, le terrible «
Target : Earth » ne souffre d’aucun remplissage et sait aller droit au but pour le plus grand plaisir d’un auditeur charmé par l’univers extra-terrestre de la comète du Wisconsin,
Screamer. Oublié par les affres du temps, redevenu poussière au lendemain de la sortie du disque faute de support de New
Renaissance Records n’ayant su lui offrir une tournée promotionnelle digne de ce nom à l’exception de quelques gigs ci et là dans les états voisins du Wisconsin,
Screamer et son «
Target : Earth » ne demande qu’à revivre et venger ce foutu destin dans vos enceintes.
Seul et unique avertissement !
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