Dans l'âme battante du metalcore atmosphérique, une tempête sonore éclate, une fusion entre la brutalité frénétique de la musique hardcore et les nuances évocatrices de l'atmosphère. C'est un voyage musical qui transcende les frontières du lourd et de l'aérien et crée un paysage sonore où les riffs déferlent et les mélodies planent. Les instrumentaux permettent de plonger dans des tourbillons d’énergie pure, où les émotions sont exacerbées et les pensées sont libérées. Les compositions laissent des sensations de feux d’artifice sonores qui explosent dans l’obscurité et laissent des étincelles d’intensité briller. Le style doit se voir comme une expérience cinématographique pour les oreilles, une fusion puissante d’éléments contrastés qui créent une symphonie unique.
Ce souffle, le quatuor américain de
Silent Planet l’a rapidement adopté au point de devenir un sérieux modèle. Dès la publication de son premier opus
The Night God Slept en 2014, le groupe s’est de suite fait une place dans un sous-genre encore méconnu et peu cultivé. Les sorties qui s’en suivent n’ont été qu’une confirmation de cette innovante approche, une exploration intelligente de textures sonores variées et du maintien d’une agressivité caractéristique. Mais c’est bien la dernière offrande en date
Iridescent en 2021 qui a été un véritable tremplin pour la formation américaine, notamment grâce à une belle publicité et à des critiques élogieuses. C’est donc sous une spirale positive que nos musiciens reviennent en cette fin d’année avec un sixième disque intitulé
Superbloom.
Cette nouvelle toile n’a pas réellement vocation à bousculer les codes déjà bien ancrés de notre troupe. Au sein de rythmiques grasses, pondéreuses et querelleuses, des passages éthérés généralement marqués par des claviers permettent d’exposer un tableau à la fois hostile dans les moments batailleurs et émotionnel dans les instants purs. Quelques prémices sont d’ores et déjà perceptibles sur Offworlder avec ces rares lignes de riffing lumineux et de cette prestation vocale contemplative sous des faux-airs de shoegaze. Le titre suivant Collider témoigne davantage de cette ambiance presque rêveuse, aussi bien sur le chant en majorité vaporeux que sur l’instrumental où les synthétiseurs nous embarquent dans un milieu mystérieux et accueillant. L’aspect mordant apparaît sur les deux breaks du titre, sur des guitares dissonantes et un vocal malveillant.
Bien que les constructions des morceaux soient dans leur ensemble assez semblables, l’inspiration d’un metal moderne et d’une touche atmosphérique dans les mélodies donnent lieu à une curiosité auditive constante. De même, certaines œuvres révèlent une volonté de se dissocier et d’amener un visage plus personnel. C’est le cas d’Euphoria avec la participation d’Alejandro Aranda (Scarypoolparty). Au sein d’une rusticité inflexible, les refrains attestent d’une belle élégance, principalement grâce à une proposition vocale suave qui nous introduit dans une ambiance réconfortante. L’instrumental n’est pas en reste avec son riffing chatoyant mais aussi avec une couche de clavier très sensible.
C’est d’ailleurs dans ces instants plus intimes que le quatuor affiche son plus beau profil. En effet, en dehors de ces temps aériens, le collectif use d’un metalcore somme toute assez classique mais tout de même parfaitement réalisé. Un titre tel que Anunnaki est un déferlement d’animosité certes bien moins extravagant que l’ensemble de l’ouvrage mais qui peut se vanter d’être l’une des seules pièces à soumettre une telle pugnacité, ce qui lui permet d’être finalement authentique au sein de l’album.
L’ouvrage se termine en apothéose avec le morceau éponyme, à la fois le plus long et le plus mémorable de cette sixième réalisation. Il n’est ici aucunement question de férocité mais surtout d’une superbe progression et montée en puissance dans une composition qui flirte avec le rock. Le vocal ainsi que l’instrumental sont d’une beauté et d’une douleur que l’on avait assez peu entendu jusqu’à présent, un message qui nous touche en plein cœur. L’outro par ces quelques notes voluptueuses au clavier n’est qu’une confirmation de ce trait poignant et poétique qui conclut magnifiquement bien près de quarante minutes d’émotions multiples.
Superbloom est une continuité dans le parcours de
Silent Planet, un metalcore atmosphérique à l’identité sonore reconnaissable et à la maîtrise remarquable. A travers cette sixième étude, le quatuor américain ne cherche pas vraiment à chambouler ses habitudes mais plutôt à affiner et à enrichir son langage musical. Embrassant des instants songeurs et animé par quelques expérimentations audacieuses, ce disque s’impose logiquement comme une œuvre solide et nuancée qui témoigne de la maturité artistique du collectif. Pour le moment, la magie continue d’opérer comme les premières fois mais on ose espérer que notre jolie petite troupe ne se contentera pas toujours de cette même formule ensorcelante au fur et à mesure des années. A cette crainte, seul le temps y répondra.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire