Un vent d'inspiration renouvelé en provenance de l'espace power mélodique russe nous est insufflé, et ce, à l'instar de ce jeune quintet né en 2013 à Saint-Pétersbourg. Mû par une sérieuse envie d'en découdre, l'année même de sa création, le combo réalisera son premier et troublant single 2 titres aux relents électro et folk «
Voices from the
Past ». Une longue période de latence s'ensuivra, le temps pour nos acolytes d'affûter leur production d'ensemble et d'élargir le champ des possibles stylistiques, enrichissant alors leur éclectique arsenal de touches metal moderne et heavy. Ainsi, ce ne sera pas avant 2015 que le collectif est-européen nous livrera deux singles à l'ingénierie désormais plus soignée, à savoir : le pulsionnel et organique « Chains
That Bind Me » (recelant notamment une ixième mais saisissante reprise de l'entraînant «
Moonlight Shadow » de Mike Oldfield), que relaiera l'enivrant mid tempo à la colorature heavy mélodique « Try to Find Myself ». Un modeste mais magnétique set de partitions qui lui ouvrira les portes de la scène metal locale. Pierre par pierre, se solidifie l'édifice...
Aux fins d'un changement partiel de son line-up, d'un travail en studio des plus exigeants et de longue haleine, la troupe nous gratifiera, en 2017, de son tout premier album studio «
Stories of the
Green Fairy », signé, cette fois, chez Sliptrick Records. Ainsi, eu égard à ses actuelles aspirations stylistiques, le groupe nous livre une œuvre power mélodique bien trempée aux effluves électro, moderne, symphonique et folk (renforcés par l'apport des talents de : Natalia Dudova, au violon ; Ilya Sakmarov (ex-
Citadel), à la flûte ; Nikolai Ryabyh à la flûte, à la harpe et à la cornemuse et Ivan Bakulin (Silvercast, ex-
Lanewin), à la flûte), égrenant la bagatelle de 12 titres (dont 4 issus de ses 3 singles) à la fois magmatiques, enjoués et troublants sur un ruban auditif de 46 minutes. Dans ce dessein, son corps oratoire reposant parfois sur un duo mixte en voix claires, la formation russe ira puiser son inspiration aussi bien du côté de
Visions Of Atlantis,
Kamelot et
Serenity, qu'auprès de
Nightwish,
Delain,
Ancient Bards,
Amaranthe, Blackmore's
Night,
Leaves' Eyes ou encore
Lyriel. Etat de fait qui n'empêchera nullement nos compères d'apposer leur sceau sur la plupart des portées concoctées...
Aussi, c'est dans un univers tourmenté, rayonnant et un tantinet romanesque que nous plonge l'équipage au grand complet, à savoir : la frontwoman Veronica Barbutskaya (ex-Silvercast) et le vocaliste Nikolai Barbutsky (ex-
Blacksmith), le guitariste Vasily Kukuta (
Citadel), le bassiste Roman Yanko (
Citadel, ex-
Fear Of Insomnia) et le batteur Peter Janssen (
Icewind Tales). Ce faisant, nous est livré un enregistrement de bon aloi, réalisé aux Sound Way Records par le guitariste/vocaliste et ingénieur du son Vadim Parshutkin (
Fear Of Insomnia, ex-
Sunless Rise), connu pour avoir oeuvré auprès d'
Elisaday, Fängörn,
Sanctorium,
Sunless Rise, Silvercast, entre autres. Comme pour mettre les petits plats dans les grands, l'enregistrement des lignes de chant a été dispensé au Rise!MyVoice Studio par Nikolai Barbutsky (déjà sollicité par
Power Tale et Silvercast), le mixage et le mastering, eux, relevant de la patte de Maxim Kokarev. Aussi, l'opus jouit-il d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, d'un judicieux équilibrage entre instruments et d'une belle profondeur de champ acoustique. Un alléchant programme nous intimant d'aller explorer plus en profondeur la cale du vaisseau amiral...
Le groupe interpelle, tout d'abord, par sa faculté à générer de grisants arpèges d'accords, ceux qui, précisément, vous resteront gravés en mémoire longtemps encore après y avoir plongé le pavillon. A commencer par leurs offensives pistes power mélodico-symphonique aux relents folk, loin de manquer à l'appel. Ce qu'illustre, d'une part, « Symphony of Light », tonique et jovial effort à mi-chemin entre
Visions Of Atlantis,
Leaves' Eyes et
Lyriel. Bénéficiant d'un refrain catchy mis en exergue par un duo bien habité doublé d'un fin toucher d'archet, signé Natalia Dudova, le seyant méfait jouerait dans la catégorie des hits en puissance que l'on ne quittera qu'avec l'indicible espoir d'y revenir sitôt l'ultime portée envolée. D'autre part, il sera bien difficile de résister à l'assaut de la vague de submersion qui va s'abattre sur nous à l'aune de «
Voices », pulsionnel, énigmatique et efficace manifeste dans la veine coalisée d'
Elane,
Lyriel et
Eluveitie. Mise à l'honneur à la fois par le souffle éolien du flûtiste et sonneur Nikolai Ryabyh, le libertaire violon de Natalia, et son refrain immersif à souhait que l'on croirait volontiers emprunté à Mike Oldfield, cette livraison n'a pas tari d'arguments pour nous rallier à sa cause.
Sur un même modus operandi, certes moins directement orientés vers les charts, d'autres espaces d'expression ne sauraient cependant être éludés. Et ce, à l'instar de «
Green Fairy », festif et enivrant mid tempo progressif aux percussions et choeurs résolument tribaux. Dans la lignée de
Lyriel, Blackmore's
Night et
Elane, jouant à plein sur les effets de contraste rythmique et atmosphérique, dotée d'un violon en liesse, dispensée par les troublantes volutes de la déesse, nombreuses et efficaces sont les armes de cette invitante offrande pour nous faire plier l'échine. Un poil plus tourmenté, l'offensif et violoneux « Into the
Dark » révèle, lui aussi, de séduisants atours, à commencer par son infiltrant cheminement d'harmoniques et ses couplets bien customisés. Pourvu d'enchaînements intra pistes des plus sécurisants et d'un duo évoluant à l'unisson, ce ''lyrielien'' méfait réserve, par ailleurs, d'insoupçonnées montées en régime du corps orchestral. Pour notre plus grand plaisir... Se faisant plus insaisissable, abondant alors en effets de surprise, le polyrythmique «
Sleep » tantôt nous projette sur un lac de lave en fusion, tantôt nous propulse en de célestes contrées. Et là encore, la sauce prend...
Dans cette dynamique, mais plus volontiers orientés metal moderne ou électro, certaines plages ne trouveront pas moins matière à nous retenir plus que de raison. Ainsi, n'ayant de cesse de nous asséner ses riffs en tirs en rafale, ses féroces et inaltérables coups de boutoir, ses sinueuses rampes synthétiques, tout en nous livrant ses couplets finement échafaudés relayés chacun d'un entêtant refrain, le mid/up tempo power symphonique à l'habillage électro pop «
Forgotten Dream » revêt l'aspect d'une enveloppante ogive que n'auraient reniée ni
Ancient Bards, ni
Amaranthe, ni même
Delain. Tout aussi impulsifs et surtout efficaces, le ''delainien'' «
Secrets of the
Universe » comme l' ''amaranthien'' « I
Will Awake » ne relâcheront pas davantage la pression. L'un, recelant une imposante muraille de choeurs venue escorter la belle dans ses pérégrinations, générant un break opportun sur fond de clapotis pianistiques et prestement balayé par une bondissante reprise sur la crête d'un refrain catchy ; le second, plus cadencé, nous invitant à un inaltérable déhanché sur le dancefloor. Non moins corrosif et organique, nous faisant flirter avec d'orientalisants paysages de notes, mis en habits de lumière par les puissantes inflexions de la sirène et des choeurs en tapinois, le frondeur « Mirror » poussera, quant à lui, à un headbang bien senti dont les nuques fragiles s'en souviendront encore longtemps.
Lorsqu'ils en viennent à desserrer la bride, nos gladiateurs trouvent, là encore, quelques clés pour nous assigner à résidence. Ce faisant, c'est d'un claquement de doigts que l'on entrera dans la danse à l'aune de « The Way », engageant mid tempo folk symphonique et progressif non sans renvoyer tour à tour à
Eluveitie,
Lyriel et Blackmore's
Night. Se densifiant délicieusement au fil de son parcours, le convoi instrumental révèle également d'intrigantes oscillations d'une flûte gracile, dans le sillage de Jethro Tull, signées Ilya Sakmarov. Un poil plus abrasif et non moins invitant, dans la lignée de
Kamelot, le mid tempo power symphonique folk « Try to Find Myself » déploie ses riffs lipidiques, dissémine ses frappes de fûts mesurées et d'une régularité métronomique, tout en dispensant un fin legato à la lead guitare ; les graveleuses attaques de Nikolai Barbutsky faisant le reste pour nous intimer de suivre jusqu'à la note ultime cette poignante offrande.
Quand il nous mène en d'intimistes contrées, le combo en profite pour nous adresser ses mots bleus les plus sensibles, avec, pour effet, de déclencher la petite larme au coin de l'oeil. Aussi, c'est d'un battement de cils que l'émotion étreindra l'aficionado du genre sous le joug des radieuses séries d'accords et du pénétrant filet mélodique jaillissant des entrailles de «
Winter Night » ; chatoyante folk ballade au carrefour entre Blackmore's
Night, The Corrs et
Delain, laissant entrevoir de grisantes portées exhalant d'un inattendu accordéon samplé, et mise en habits de soie par les ensorcelantes patines de la maîtresse de cérémonie.
Force est d'observer que nos compères n'ont manqué ni d'allant ni de panache, nous octroyant un message musical à la fois volontiers frondeur, des plus lumineux, un brin enivrant et pétri d'élégance. Bénéficiant d'une production d'ensemble difficile à prendre en défaut, varié sur les plans atmosphérique, rythmique et vocal, avec quelques prises de risques à la clé, témoignant d'un réel potentiel technique et d'une féconde créativité mélodique, ce premier et luxuriant opus renseigne sur les louables et légitimes intentions de ses auteurs. On aurait toutefois espéré l'un ou l'autre instrumental et/ou fresque, exercices de style souvent requis par un auditorat déjà sensibilisé aux vibes de leurs maîtres inspirateurs. Cependant, à la lumière d'un album ne concédant pas l'ombre d'un bémol ou d'une longueur superflue, ayant dores et déjà digéré ses sources pour les faire siennes, le collectif russe dispose d'une panoplie suffisante pour jouer les épouvantails parmi ses nombreux homologues. Pour une frissonnante incursion en terre d'abondance...
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