Liste des groupes Doom Gothique Vetitum Still Living

S'il est des formations au parcours atypique, ce groupe sud-américain serait de celles-là. En effet, créé en 2001, ce quartet brésilien originaire de Pelotas a sorti sa première démo « Inspiration » quelques mois avant même la constitution du line-up originel. Une longue période de latence s'en est suivie, le combo nous imposant quelque quatre années de patience avant de le voir nous gratifier d'une seconde et discrète démo intitulée « Locked in a Dream ». Suite à cette réalisation, l'attente fut plus longue encore avant que le combo ne revienne dans les rangs. Aussi, pas moins de quinze ans séparent la sortie de cet ep 5 titres de sa fondation. On comprend que le collectif brésilien signe là son grand retour sur la scène metal gothique locale.

Pour la mise en œuvre de cette menue rondelle, après moult changements de membres au sein du groupe, le line-up s'est stabilisé autour de : Nany Yates (Trail Of Sins, ex-In Absentia) au chant ; Paula Oliveira à la guitare ; Gustavo Knopp à la basse et Luisa Branco à la batterie. La troupe a également sollicité les talents d'Esmute Farias au chant et à la batterie et du guitariste/bassiste et vocaliste Bruno Anana, ce dernier ayant finement mixé et masterisé les 20 minutes de l'opus. De cette étroite collaboration émane une œuvre metal atmosphérique gothique aux relents doom, souvent calée sur le schéma de la Belle et la Bête. Empreinte de mélancolie, de tristesse, voire de noirceur, ce manifeste nous fait alors voyager entre Lacuna Coil, The Flaw, Autumn, One Without et The Gathering.

Dans un premier mouvement, le message musical se fait éminemment obscur, parfois gorgonesque, nous aspirant dans un tourbillon foncièrement anxiogène. Ainsi, chaotiques mid tempi progressifs aux riffs épais dans la lignée de The Gathering (première période), avec un zeste de The Flaw, « Rain of Lies » tout comme « Another Winter Morning » nous mènent dans une atmosphère profondément dépressive, résolument oppressante, finissant par nous glacer le sang. Au fil d'une ligne mélodique un tantinet linéaire mise en exergue par les déchirantes patines oratoires de la belle, le convoi instrumental poursuit inlassablement son chemin vers de glauques horizons. Le spectacle se fait plus mortifère encore lorsque des growls caverneux s'invitent au bal.

Moins nihilistes mais techniquement plus complexes, d'autres espaces d'expression attirent le tympan. Ainsi, le ''lacunacoilesque'' « My Weakness » se doublant d'harmoniques dans la veine de The Gathering se plaît à nous secouer, et parfois à nous dérouter, pour mieux nous cueillir. Suivant une sente mélodique en proie à quelques linéarités, cette piste se double d'insoupçonnées variations atmosphériques et rythmiques susceptibles de désarçonner le chaland. Mais le climat oppressant, largement entretenu par le duo mixte en voix de contrastes, assurément touchera l'aficionado du genre.

Parfois, le combo varie ses phases rythmiques, offrant par là-même quelques éclaircies à un propos opaque, un tantinet ténébreux. Ainsi, on retiendra tant « Still Living » que « Challenge » pour leurs fines nuances mélodiques estampées Autumn (seconde mouture), leur parfum ambré et un cheminement harmonique des plus infiltrants. Dotés de refrains avenants pour l'un, envoûtants pour l'autre, que relayent des couplets bien ciselés, mis en habits de lumière par une sirène aux faux airs d'Anneke Van Giersbergen (The Gentle Storm, ex-The Gathering...), ces deux efforts offrent une enivrante alternative au registre doom gothique, dominant dans cette livraison.

Pour leur retour sur le devant de la scène, en dépit du modeste format de la livraison, nos quatre mousquetaires n'ont pas plaint leur peine, octroyant une auto-production aux enregistrements soignés, rompant ainsi définitivement avec leurs tièdes débuts. On effeuille ainsi un message musical raffiné, à la fois énigmatique et mystique, plutôt frissonnant, à la noirceur magnétique, mais qui ne saurait encore totalement s'affranchir des sources d'influence de nos acolytes. On regrettera aussi un manque de diversité relatif aux exercices de style proposés, une technicité instrumentale tendant à se répéter et une mélodicité en demi-teinte. Bref, une galette évanescente cultivant le mystère au rang d'un art, qui doit cependant se laisser le temps de l'imprégnation avant son éventuelle assimilation...