En ce début des années 90 le visage du
Hard Rock et du Heavy
Metal français est marqué par les grimaces torturées d'une scène à l'agonie. Il y a maintenant longtemps déjà que
Satan Jokers, Sortilèges,
Warning,
Attentat Rock,
Nightmare et quelques autres ont exhalé les soupirs de morts en sursis. Le poison putrescent gangrenant les plus vivants d'entre eux qui tentent, encore, de survivre à l'image de
ADX,
Vulcain ou encore
Squealer les condamnera bientôt.
Les causes de ce fléau grandissant sont multiples.
Il y a d'abord cette exception culturelle française, le choix de cette langue pour exprimer toutes les nuances de sa musique, qui, quoi qu'on en dise, n'a jamais séduit qu'un microcosme francophone plutôt étroit, laissant indifférents le reste du monde qui, lui, préfère, depuis toujours, le chant en Anglais. Preuve en est que les derniers rescapés de l'hécatombe sont ceux qui ont abandonné la langue de Molière pour celle, plus prisés, de Shakespeare. Il y a ensuite l'incapacité évidente de la scène française à se décomplexer par rapport à la réussite d'un
Trust dont la présence, et même l'absence, pesante handicapera lourdement, et longtemps, bons nombres de groupes de
Hard et certains de Heavy. Il y a aussi, pour finir, l'impuissance de cette scène à se projeter dans un avenir plus constructif, plus novateurs, plus évolutifs, restant quelques peu sourds aux nouvelles tendances. Un aspect qui sera plus cruellement évident lors de l'émergence de mouvements plus radicaux. Le fossé creusé par ces diverses raisons, dans lequel est allongé le corps du
Hard Rock à la française, sera définitivement recouvert de terre par des sorties aussi virulentes que celle de
Massacra et son Final
Holocaust ou encore celle de
Loudblast et son Sensorial Treatment. Une certaine partie de nos musiciens hexagonaux est tournée vers le passé alors que l'autre l'est résolument vers le futur. Pourtant certains de ces groupes irrémédiablement condamnés auraient mérité un minimum de reconnaissance.
Blackwhite est assurément de ceux-là.
Défendant les couleurs d'un
Hard Rock très influencé par la musique des années 70,
Blackwhite sort son premier, et son dernier, véritable album,
Slave to Life en 1991.
Handicapées par une production assez moyenne, ou les guitares et la batterie sont étouffées, donnant à l'ensemble un aspect vieillot recouvert d'une couche épaisse de poussière, ce disque révèle pourtant quelques surprises assez intéressantes. Passé un Shout For Help ratés, dont la construction déconcertante brouillonne et l'aspect inconcevablement tourmenté par rapport aux restes de l'album nous assomment d'entré, on découvre quelques titres attirants. I Don't Wanna Loose U et ses riffs simples, son air entraînant, son refrain entêtant, dénote un esprit capricieux Rock'n Roll qui nous ouvre les portes d'un plaisir sans aucune arrière-pensée. Certains autres titres tel
Killing Time au goût d'emblée plus Bluesy avec son Harmonica et ses guitares acoustiques, ou encore Too Late, By Your Side sont pourtant, eux aussi riche en satisfaction. De plus l'œuvre est d'une homogénéité assez exemplaire et seul Shout For Help et un Right Now aux mélodies mièvres un peu trop évidente viennent troubler quelques peu l'équilibre d'un album plutôt bon. Si ces morceaux viennent le troubler, il faut aussi dire que d'autres le subliment. Ainsi la reprise efficace de My Sharona (The Knack - My Sharona (1979)), un très bon Crazy Little Rock'n Roll et son piano Boogie pour un titre endiablé qui clôt l'album dans une apothéose, mais surtout un Take Me High
Again composé de manière intelligente dans une première partie très doux piano-voix avant une deuxième plus intense aux riffs basiques mais énergiques et surtout un refrain dont la qualité indéniable, certes, facile, mais assurément efficace (une constante de la musique de
Blackwhite, et ce sur presque chacun des titres qui composent ce
Slave to Life), sont autant de morceaux attachants.
En outre l'ensemble de cette œuvre met aussi en exergue les talents d'un chanteur hors pair, Eric Fermentel. Chacune de ses interventions donne le relief nécessaire aux différents titres pour que ceux-ci se chargent de l'explosivité propre à ce
Hard-Rock festif qui nous offre les émotions directement accessibles d'un plaisir immédiat. Nul doute qu'en d'autres temps et qu'avec une production plus digne, cet album aurait trouvé un écho positif mérité, bien plus conséquent que cet oubli, duquel il n'est jamais sorti et duquel il ne sortira sans doute jamais.
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