Y a pas à chier, parfois, la musique, ça fait du bien. Je ne parle pas des hymnes intemporels qui vous font voyager, les yeux clos et la tête dans les nuages, dans des contrées musicales oniriques, ou de ces mélopées bouleversantes de beauté qui vous chavirent l’âme et vous filent la larme à l’oeil, non. Je parle de musique brute, violente et directe, d’un exutoire jouissif sous forme de décibels, d’un défouloir bruitiste dans lequel noyer toutes vos haines et vos frustrations. Vous avez passé une journée de merde au boulot et votre patron vous a traité comme un moins-que-rien? La voisine vous a réveillé à 6h du mat’ un dimanche matin en passant l’aspirateur? Vous venez d’apprendre que votre belle mère venait manger à la maison ce soir? Votre femme fait sa crise de la quarantaine et refuse de se soumettre au rituel hebdomadaire de la petite gâterie que vous chérissez tant? Qu’à cela ne tienne, il y a
Vomitorial Corpulence.
Vous vous doutez bien qu’avec un patronyme aussi raffiné, nos doux poètes australiens ne pratiquent pas du metal prog’ à claviers et ne font pas dans la dentelle. Comme on peut s’en douter ici, on macère allègrement dans le pus d’un grind bien gras et crade, et les 27 petites minutes de ce doux requiem sentent bon le mucus, le vomi, la tripaille et la bile.
N’y allons pas par quatre chemins:
Vomitorial Corpulence, ou V. C. pour les intimes (ha ha!), c’est du grind de 3eme division tout ce qu’il y a de plus basique et bas-du -front, sans aucune originalité ni finesse, le fier représentant d’un style primaire qui se complait à s’auto-parodier et à s’engluer dans les mêmes clichés horrifico-gores éculés depuis les premiers
Carcass et
Cannibal Corpse. Ici, il n’y a rien à dire, tout y est, de la pochette craspec’ au nom de compos à coucher dehors (allez, au pif, je vous sers du
Festering Insalubrious Bowel Hemorrhaging Of Cancerous Pustulosus
And Abdominal
Abscess Discharge Of The
Intestinal Tract, merci le copier/coller!), en passant par les inévitables extraits de films gore histoire d‘empuantir encore cette ambiance putréfiée et cadavérique, et l’indispensable morceau de 6 secondes pour concurrencer le
Dead de
Napalm Death. Du classique de chez classique on vous dit.
Musicalement parlant, comme on peut s’en douter, il y a peu de mélodies, peu de variations, les musiciens sont loin d’être des virtuoses, et on ne distingue pas toujours très bien ce qui se passe: imaginez des guitares accordées très bas formant une bouillie sonore indistincte avec la basse et nous gratifiant de riffs pas toujours très compréhensibles, une batterie en carton pâte qui alterne rythmiques punk et blasts des familles et une alternance de voix délirante (ridicule?) entre un Donald Duck sous speed, des grognements porcins et les borborygmes d’un évier qu‘on débouche. On pourrait croire à un hybride bâtard entre
Rompeprop,
Mortician et Last Days of Humanity, et le tout ressemble furieusement à un
Napalm Death putréfiépériode 88-89, mais en plus craspec', décérébré et rudimentaire c’est vous dire le bon goût de l’objet!
Et pourtant,
Vomitorial Corpulence possède ce petit quelque chose d’indéfinissable que je ne parviens pas à trouver dans la multitude de groupes de grind qui pullulent sur le marché actuel, et qui en fait un groupe attachant : je ne sais pas si c’est le côté délirant du tout (le groupe ne se prend clairement pas au sérieux,il n'y a qu'à voir le "Thanks
God" à la fin du livret et la photo du groupe se recueillant devant une église, mais ne tombe pas au niveau de bouffonnerie un peu lassante d’un
Gronibard ou d’un
Ultra Vomit), l’alternance entre les voix qui donne une dynamique agréable et une certaine « fraîcheur » (ha ha!) aux compos, à moins que ce ne soit cet accordage si spécial, ce son si épais, qui donne un côté très groove n’ roll à l‘ensemble (parfois, on pense même à du
Haemorrhage), mais
Skin Stripper, malgré tous ses défauts qu’il assume pleinement, se laisse écouter avec une délectation jouissive ( mention spéciale pour le dernier titre, machine groovy imparable avec ses riffs gras qui vous file une gaule d’enfer et vous donne envie de tout péter dans votre baraque). Le tout est furieux, groovy, in your face et intense et, même si une impression de grand n’importe quoi et de confusion s’échappe souvent de ce joyeux bordel (les interludes au banjo désaccordé que constituent Hillbilly
Heaven et Barnyard Grind), ces 27 minutes de grind déjanté et chaotique passent très vite et nous filent la banane. En cela, les Australiens réussissent largement leur pari, s’adresser à nos instincts les plus vils et primitifs pour faire ressortir l‘animal qu‘il y a en nous, et nous faire passer un bon moment de bestialité primaire sans prise de tête, et surtout sans aucune prétention.
En conclusion, si vous voulez un grind engagé et enragé à l‘intensité furieuse et aux riffs en béton armé, passez votre chemin, Vomitorial n’est pas
Nasum. Si vous voulez des compos rouleau-compresseur au son massif et écrasant, circulez, Vomitorial ne fait pas du
Mumakil. Si vous voulez du grind barré et schizophrène travaillé et technique, allez voir ailleurs, Vomitorial ne verse pas non plus dans le
Cephalic Carnage. Non
Vomitorial Corpulence c’est du crade, du décérébré, c’est presque du foutage de gueule tellement c’est minimaliste et anti-musical, mais finalement, c’est ça qui est jouissif, et on en redemande! Cheers guys,
Vomitorial Corpulence rules!
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