Liste des groupes Death Mélodique Beyond Chronicles Shatter

Certains groupes ont aujourd’hui une empreinte musicale si marquée qu’elle pousse à une certaine habitude, et ce malgré l’ingéniosité et le caractère de certaines structures et mélodies. C’est particulièrement vrai dans le Death Mélodique où seulement la recherche d’un petit plus peut permettre de se démarquer (et encore ce n’est pas gagné car la recette globale doit également prendre), c’est un chemin semé de multiples obstacles et embûches. Les groupes ayant réussi ce pari dans ce style se comptent sur les doigts de la main tant la prolifération des formations en tous genres n’incite pas à percevoir ce qui peut être apporté de supplémentaire au genre.

Nombre de formations scandinaves (suédoises et finlandaise notamment) se sont imposées sur la scène en proposant des compositions de qualité avec toujours un "petit plus" qui les démarque (par exemple Amon Amarth pour la thématique viking guerrier, Insomnium pour la mélancolie qui transpire de ses compositions, etc.). Alors pourquoi s’intéresserait-on à cette scène en dehors de la Scandinavie ? Et bien parce que c’est souvent dans les territoires les plus inattendus pour un style que l’on peut avoir des surprises de taille. C’est notamment le cas pour les Franciliens de Beyond Chronicles, auxquels nous nous intéresserons aujourd’hui.

Beyond Chronicles est un groupe de Death mélodique originaire de Sèvres, fondé en 2012, anciennement connu sous le nom de Chronicles. Leur musique est un subtil mélange de Death mélodique (mélodies extrêmement travaillées, voix principale très puissante) et de riffs impitoyables à vous arracher les cervicales. La plupart de leurs compositions oscille entre parties en mid-tempo aux mélodies mélancoliques de la guitariste lead, et riffs monstrueusement véloces bordés de parties épiques. Au niveau vocal, la voix growlée est couplée ou en dualité avec le chant clair du gratteux rythmique. Musicalement, les influences que l’on perçoit tout de suite viennent de Insomnium, Before the Dawn et autres Dark Tranquillity.

Le groupe nous avait présenté sa recette il y a quelques mois avec la sortie du single intitulé "No Rising Sun", et montrait une formation qui ne se cachait absolument pas derrière des influences pourtant immédiatement décelables, mais les mélangeait avec d’autres dans un tout cohérent, mélodique, prenant, épique et très efficace. De manière générale, ce single eut de très bons retours du public et inaugurait un très bel avenir pour cette formation, tant pour les prestations live que pour l’enregistrement studio. Au début du mois de février 2015 est sorti leur premier EP, constitué de six titres (dont "No Rising Sun ") intitulé "Shatter". Et c’est à ce disque que je vais m’intéresser maintenant.

"Shatter" a été enregistré durant le mois de décembre 2014 dans le studio personnel de Lucas d’Angelo de Betraying the Martyrs, le "Dangelo Sound" et produit par celui-ci. Le son est très propre et professionnel, chaque moment fort des pistes est clairement identifiable, chaque instrument a sa place dans le mixage (excepté un léger retrait de la basse, il faut tendre l’oreille pour l’entendre).

L’EP est assez court et particulièrement intense, mais pas pour autant dénué de défauts. C’est ce que j’expliquerai en toute fin. En seulement vingt-cinq minutes, Beyond Chronicles fait preuve d’un talent d’écriture et d’exécution indéniable.

L’intro "Unbreakable" est la mise en bouche de l’EP, afin de montrer à l’auditeur de quoi ces cinq gaillards sont capables. Ce morceau de moins de 2 minutes (contre 4 ou 5 minutes pour le reste) fait monter la pression doucement afin de mieux nous exploser les forces du groupe au visage. Charles, le chanteur principal, vocifère et s’époumone avec passion en gueulant "I Am Unbreakable", porté par une montée progressive des leads mélodiques et de la batterie.

Après cela, "Bereavement" vient exploser au visage de l’auditeur par son accélération monstrueuse et prouve que Beyond Chronicles est très loin d’être là pour verser dans le mielleux. On y retrouve les mélodies "insomniumiennes" avec la puissance de la voix de Charles. On entend pour la première fois la voix claire de Julien sur le refrain. Celle-ci intervient à nouveau cette fois en dehors du refrain avec un pont mélodique à 3:45 qui n’est pas sans rappeler l’intro de "While We Sleep" d’Insomnium, mais avec, encore une fois, une montée progressive de la mélodie vers les aigus qui donne un aspect sonore épique à l’ensemble.

"Where I Belong" est moins véloce et plus mid-tempo, mais pas dénué d’intérêt. Piste plus entraînante, elle présente des schémas mélodiques très travaillés qui tendent toujours à donner cette sonorité à la fois planante et épique. Ça s’entend surtout au début du refrain.

"New Paradise" et "Born to Die" font sans aucun doute partie des titres de l’EP possédant les meilleures mélodies et ambiances. Ces deux pistes démarrent toutes les deux par un plan que n’auraient absolument pas renié une fois encore les grandes formations mélodiques finlandaises. Ce doublé marque par une approche musicale à la fois belle, touchante et violente.

En ce qui concerne "No Rising Sun", c’est sans aucun doute LE titre fort de l’EP car il réunit à lui tout seul la quintessence de Beyond Chronicles sur ce disque : démarrage mélodique en arrière plan, progression vers les aigus pour donner un côté touchant et épique. Le moment à se décrocher les cervicales arrive à l’apparition de la voix de Charles et d'un riff monstrueux de puissance sonore. La dualité vocale entre la voix de Charles et celle de Julien aère énormément l’ensemble et offre un titre de toute beauté. Sincèrement, Il serait dommage de ne pas y jeter une oreille car je peux vous dire que ça vaut le détour...

L’EP de ces Frenchies est donc de très bonne qualité pour un premier essai, mais c’est également un disque qui n’est pas exempt de défauts : En premier lieu, on peut reprocher au groupe d’utiliser de temps à autres des structures de morceaux souvent trop conventionnelles. Un autre défaut se situe également au niveau de la voix claire de Julien. Elle est à la fois une force et une faiblesse, car même si elle offre une respiration très agréable à l’ensemble des compositions, on ne peut s’empêcher de penser qu’une certaine prise de risque aurait été nécessaire (mais justement c’était peut être trop risqué) car sa voix peut paraître pour certaines oreilles trop monotone et sans modulation. Elle n’intervient qu’a des endroits spécifiquement définis comme les refrains (excepté sur "Born to Die" et sur "New Paradise"). Personnellement, les deux défauts précédemment cités restent minimes tant l’EP est d’une qualité indéniable à mes oreilles.

Pour conclure, "Shatter" est donc un excellent début pour une jeune formation comme Beyond Chronicles. Forts d’un EP de premier choix, ces 5 zicos ne demandent désormais qu’à exploser sur scène. Croyez moi, ne passez pas à côté de ce skeud, peu original certes, mais qui a le mérite de tirer le meilleur parti des influences de Death mélancolique à la finlandaise.

15/20