Projet solo du russe Valery Av (entre autres
Tenochtitlan,
Anima, Nenasty),
Senmuth est avant tout une curiosité musicale, dont la maigre renommée est malheureusement plus liée à son extraordinaire productivité -neuf albums rien que pour l'année 2011 !- qu'à sa musique proprement dite. Alternant entre musique ethnique, industrielle, symphonique et
Metal,
Senmuth nous propose un très large choix d'ambiances souvent très travaillées et ambitieuses. Car
Senmuth, c'est avant tout des ambiances soignées quel que soit le genre musical abordé.
Ici, c'est un voyage en Égypte ancienne que le Russe nous offre, sa passion et son thème de prédilection pour ses albums
Metal (le nom du groupe est à ce sujet révélateur,
Senmuth étant à la base un architecte servant sous la XVIIIème dynastie égyptienne).
Sekenenra, sa 65ème production, est donc un concept album racontant le combat du pharaon Séqénenrê Taâ II contre l'occupant hyksôs qui se terminera de manière violente pour le souverain, sa momie, visible sur la pochette de l'album, étant célèbre pour les blessures visibles au niveau du crâne causées par les soldats hyksôs. Sa lutte sera cependant poursuivie par son fils Ahmôsis Ier, qui reconquerra entièrement l’Égypte... Les paroles décrivent donc l'oppression Hyksôs, le combat pour l'indépendance et la naissance du futur pharaon libérateur de son peuple.
Avec un thème aussi recherché, la musique se doit d'être en mesure d'illustrer les événements narrés, et par chance elle y arrive sans trop de mal. L'utilisation plus que généreuse de sonorités traditionnelles ainsi que les touches symphoniques disséminées ici et là immergent totalement l'auditeur dans l'ambiance, et c'est sans doute le gros point fort de l'album. Les rythmiques et instruments orientalistes sont extrêmement bien maîtrisées par
Senmuth, et il en est conscient le bougre. Car la principale critique que l'on peut faire à cette débauche de sons ethniques, c'est de camoufler un peu la répétitivité de la partie metallique des morceaux. Très simples et assez proches dans l'esprit de certains groupes de
Metal industriel, les guitares sont employées de manière plus ou moins similaires du début à la fin de l'album et se contentent la plupart du temps de donner le coté martial indispensable à un tel concept, à l'exception de quelques soli plutôt bien foutus et surtout totalement en accord avec l'atmosphère générale de l'album...
Même critique pour le chant qui bien qu'assez agréable manque sérieusement de renouvellement au fil des morceaux. Entièrement en russe, celui-ci se fait entièrement sur un ton mi plaintif mi agressif assez adapté aux paroles mais plaqué sur des lignes de chant qui se répètent sans réelles variations et qui deviennent un peu monotones à force.
Senmuth, dans cet album du moins, ne vous propose pas de morceau inoubliable, il offre un tout cohérent qu'il faut prendre dans son ensemble pour saisir l'ambiance et ainsi apprécier sa valeur.
Car pour apprécier ce
Sekenenra, il faut avant tout comprendre le mélange d'amateurisme et de passion qui est à la base de chaque album de Valery Av. Amateurisme car outre l'aspect assez étonnant de ces sorties incessantes et presque pulsionnelles d'albums (certains de ses albums ont été composés en 10 jours !), Valery fait tout le boulot sur ses productions, avouant d'ailleurs ses faiblesses techniques, à la guitare notamment. Passion car
Senmuth ne nous offre pas de simples enregistrements de mauvaise qualité de ses délires personnels : tout, depuis la pochette (assez sympa, quoique n'atteignant pas le niveau de beauté de celles d'
Hexeractime, Deathknowledge & Lifeperception ou
Expanding Architecture) jusqu'à la production est fait avec sérieux et rigueur. Preuve ultime du soin apporté à son travail, il nous propose même sur les fichiers audios un glossaire (en russe, il ne faut pas déconner) des termes égyptiens utilisés dans ses paroles ! Si je parle de fichiers audios, c'est tout simplement parce qu'étant donné une telle productivité, la grande majorité de ses albums n'atteignent pas la sortie physique, ou se limitent du moins à quelques exemplaires... tous ses albums (ainsi que ceux de ses projets annexes) sont donc disponibles en téléchargement gratuit sur son site. De quoi se motiver à découvrir un artiste qui, s'il n'est sans doute pas un génie, reste bourré d'inspiration et totalement libre de donner libre cours à ses délires musicaux...
En bref un bon album, dont le coté personnel et l'indulgence accordée à un projet de ce type compense les défauts. A tester si vous aimez l’Égypte et les ambiances orientales, à fuir si pour vous l'efficacité des compositions prime avant tout.
15/20
C'est vrai que pour le coup ça donne envie mais quand on voit le nombre hallucinant d'albums...disons qu'il faut se lancer et découvrir petit à petit, mais vu la productivité du monsieur, c'est pas prêt de s'arrêter!
Merci en tout cas pour ce texte et ce voyage en Egypte ancienne.
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