Une jeune femme … ou ce que l'on imagine être tel, car dépersonnifiée par ses longs cheveux dissimulant son visage … portant un frêle vêtement à la blancheur de linceul … prostrée comme un animal craintif … réfugiée dans la pâle luminosité d'un halo blafard qui, loin d'apporter le moindre réconfort, renforce l'opacité des ténèbres alentours. Ténèbres sur lesquels se dessine la sinistre silhouette du Mal, le Grand Maître de Cérémonie au masque aussi grotesque qu'inquiétant, esquissant un geste en notre direction et nous invitant à commettre les pires sévices imaginables sur la jeune femme prostrée, résignée quant à son destin … celui de victime … Sa victime … notre victime …
Véritable porte d'entrée à l'univers d'
Atrium Carceri, cette pochette est assurément l'une des plus dérangeantes qu'il m'ait été de donné de voir. Une pochette révélatrice d'une ambiance hautement malsaine et perverse, parfaitement mise en scène sur "In Chaos
Eternal", le titre ouvrant ce chef-d'œuvre de dark ambiant qu'est "
Seishinbyouin" : voix possédée ressemblant à des borborygmes démoniaques crachant des bouts de phrases incompréhensibles, respirations haletantes, cris d'horreur, nappes et triturations terrifiantes, cliquetis de chaînes métalliques, … Très vite, le malaise s'insinue et prend possession de notre être pour ne plus nous lâcher tout au long de ce périple horrifique de plus d'une heure, grâce aux trésors d'imagination déployés par Simon Heath, dont les compositions jouent sur toutes les gammes de la peur : de l'angoisse, sournoise et rampante, à la terreur pure, suivant une progression logique et implacable, digne des meilleures productions littéraires et cinématographiques d'épouvante.
La chambre de torture de "In Chaos
Eternal" laisse place aux couloirs insalubres d'un asile désaffecté et à ses cellules d'isolement hantées par les spectres de leurs anciens occupants : psychotiques, aliénés, sadiques et dégénérés de la pire espèce. On navigue dans un dédale d'égouts suintants d'eau poisseuse et nauséabonde.
Autant de lieux infects, peuplés de créatures difformes et de pantins ambulants de métal rouillé et de chair moisie, infestés par les atroces réminiscences d'anciens crimes restés impunis. Autant d'ambiances oppressantes et étouffantes, desquelles on s'extirpe à grand peine pour déboucher sur l'épilogue "Frosted Snowflakes" sonnant comme un générique de fin.
En s'appuyant sur de pures ambiances horrifiques, plutôt que sur des tessitures abstraites et introspectives,
Atrium Carceri a réussi son pari de se détacher de l'ombre encombrante de ses illustres compatriotes (et camarades d'écurie
Cold Meat Industry) que sont Raison d'Etre ou
Desiderii Marginis, et réalisé un cauchemar dense, tenace et aussi astucieusement mis en scène que les pièges mortels de Jigsaw. Y succomber n'est pas l'unique alternative, mais que ceux qui ont trouvé la clé de la rédemption sachent que celle-ci a un prix et qu'ils en resteront marqués à jamais…
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