Une célèbre expression nous dit : « Mieux vaut être seul que mal accompagné ». En ce qui concerne la musique, être le propre artisan de ses ouvrages voue une liberté et une créativité quasi infinie, une fantaisie que l’on peut construire de A à Z. Mais cette absence de barrières peut aussi être préjudiciable puisqu’une seule inattention ou incohérence et c’est tout un édifice qui se brise en mille morceaux. L’avantage pour privilégier un contrôle renforcé est de travailler en collaboration avec d’autres artistes et que chacun mette ses conceptions à plat. Mais là encore, un groupe peut tomber sur une solution de facilité à savoir composer des œuvres sans grande originalité. De même, des différends entre les différents membres peuvent causer des tensions et la mise à l’arrêt d’une entreprise. Quelle est donc la meilleure solution à adopter ?
A cette question, Dakota Whiteside a préféré choisir la voie solitaire. Son one-man band nommé initialement HORCRVX et fondé en 2016 change d’identité deux ans plus tard pour prendre le statut final de
Desolate Tomb. A la tête d’un seul opus Cast From
God’s Sight et paru sous le label indépendant Christian
Metal Underground Records, l’artiste américain n’a pas spécialement convaincu pour ses débuts avec un brutal death metal/deathcore certes efficient mais qui ne se dégage aucunement de l’immense masse de formations qui pratiquent le même style. Et malheureusement, sans réels moyens pour se faire connaître, le disque est finalement parti aux oubliettes comme bon nombre de toiles l’ont été avant lui. Mais il en faut plus pour décourager notre jeune homme amateur qui nous propose un second essai intitulé
Scorned by Misery.
L’auteur-compositeur montre qu’il connaît sur le bout des doigts les codes qui rendent un brutal death metal/deathcore infaillible avec des rythmiques dynamiques, des riffs endiablés ainsi que des percussions autoritaires. Pour autant, on sent que notre multi-instrumentaliste américain soigne sa personnalité avec quelques passages mélodiques ou une diversité vocale. Le titre éponyme dévoile certes une introduction très conventionnelle avec ce texte parlé certainement repris d’un discours suivi d’une mélodie millimétrée, carabinée et incandescente mais son cheminement devient d’un coup nettement plus séduisant avec l’apparition de ce solo de guitare. Ce dernier n’est pas forcément du plus technique mais il permet au morceau d’être moins linéaire. L’apport du vocaliste Jon Davenport de Cultist permet également de mettre en lumière une influence directement empruntée du hardcore.
Ce sont ses diverses touches assez astucieuses qui permettent à Dakota Whiteside d’être un peu moins prévisible et de posséder un regard plus extravagant. L’esprit tribal de
Trail Of Tears est exactement dans cette optique de la composition inattendue avec un véritable effort sur le travail à la batterie ainsi que sur les détails vocaux qui nous plongent littéralement dans un rituel sauvage. Il est cependant dommage de perdre cet aspect si fascinant passé la minute d’écoute pour revenir dans un modèle traditionnel. Le chanteur tente aussi quelques explorations dans des genres musicaux qui lui sont inaccoutumés. Ces incursions demeurent modestes pour le moment mais elles ont au moins le mérite d’exister. Ainsi, sur All Is
Dust, les guitares distordues en fin de titre ainsi que l’atmosphère générale oppressante s’apparentent à une inspiration black.
Dans sa rédaction,
Desolate Tomb est parfois trop ancré dans ses pratiques avec des morceaux qui sont à l’exact identique des préjugés que l’on pourrait avoir pour une musique death. Le tempo languissant et les successions de breakdowns sur Spitting
Nails est l’imitation même de la fainéantise et de l’exagération. A l’inverse, notre musicien en fait aussi de temps en temps trop avec une multiplication des informations et des couches instrumentales qui forment un rendu assez indigeste. L’outro de Writhing In The Bowels Of
Hell profite d’une batterie mitrailleuse, de plusieurs riffings tout aussi hâtifs et dissonants ainsi que de deux prestations vocales dont le résultat est quelque peu cacophonique. Heureusement, la production dans sa globalité reste de très bonne qualité, d’autant plus pour un groupe de deathcore dont il s’agit généralement d’un défaut.
Le constat est tout à fait honorable pour
Scorned by Misery qui est encore un peu loin du chef-d’œuvre mais qui marque une étape majeure par rapport à son prédécesseur. Bien que
Desolate Tomb ne se soit pas tant éloigné de son style de prédilection, l’interprète américain peut se vanter d’y apporter des inspirations rafraîchissantes qui rendent la découverte davantage appréciable. De plus, à contrario de ses semblables, on observe un soin particulier mis sur la production qui contraste avec les présentations surchargées que l’on a l’habitude de goûter. Ainsi, si vous voulez soutenir un jeune musicien talentueux et plutôt prometteur, Dakota Whiteside sous son one-man band est sans conteste un choix judicieux.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire