Saint Christophe, également connu sous le patronyme de Christophe de Lycie est un saint des églises orthodoxes et catholiques romaines, considéré chez les faibles d’esprit manipulés par la religion du désert comme le patron des voyageurs. Fêté le 21 aout, tirant son étymologie des mots grecs « kristos » (Christ) et « phorein » (porter) et ayant selon la légende aidé l’enfant Jésus à traverser une rivière, Saint Christophe s’est vu depuis être l’objet de petites médailles dont le français moyen aime à garnir son véhicule personnel en compagnie des kitschissimes peluches Play Boy, couvre-volant en fausse fourrure, couvre-siège en billes de bois, fanions de l’Olympique de
Marseille et autres pare-soleil « Vive le Sport ». Dès lors, comment ne pas s’étonner qu’un classieux combo de hard FM américain des 80’s ait consacré un titre de son premier opus éponyme à cette babiole on ne peut plus symbolique de la beauferie absolue et ultime ?
Saraya voit le jour sous le nom d’Alsace Lorraine (?!) en 1987 dans l’état du New Jersey autour de la chanteuse Sandi
Saraya et du claviériste Gregg Munier (R.I.P. 1962-2006). Rebaptisé très compréhensiblement
Saraya quelques mois à peine après sa formation et suite à un voyage à Hollywood s’ayant avéré être infructueux dont les buts premiers étaient de trouver des musiciens ainsi qu’une place au soleil, le duo retourne sous la grisaille de son New Jersey natal et se voit rejoindre par le futur
Danger Danger Tony « Bruno » Rey à la guitare, les dénommés Gary Taylor à la basse et Chuck Bonfante derrière le drumkit. Officiant dans un hard FM n’étant pas sans rappeler celui de leur voisin et superstar
Bon Jovi et fronté par une jeune et jolie jeune femme sachant chanter et empreinte d’un délicieux charme orientalo-méditerranéen,
Saraya ne tarde pas à s’attirer les faveurs de différents labels souhaitant signer le quartette de la Côte Est et en faire « the next big thing ». C’est au label Polydor du mastodonte Polygram Records de Jan Timmer que reviendra l’honneur et le plaisir d’offrir à
Saraya son premier deal discographique. Un premier album éponyme bien évidemment intitulé «
Saraya » sort ainsi en 1989.
Bien avant l’infecte mode du metal symphonique à chant féminin des sinistres années 2000 des formatés et alors lucratifs
Nightwish,
Within Temptation,
Epica,
After Forever et consorts, la musique décibellisée s’est vue animée par des êtres ovairisées de grand talent à l’instar des indispensables
Heart,
The Runaways,
Girlschool,
Pat Benatar,
Lita Ford, Joan Jett & the Blackhearts,
Vixen et autres
Bitch notamment, pour le plus grand plaisir des amateurs de rock dur ou de metal lourd particulièrement sensibles au charme de ces dames et appréciant à sa juste valeur le contraste parfois saisissant entre grâce féminine et intempérance sonore. Ainsi, la découverte d’entités relativement plus obscures que les mythes énoncés précédemment constitue une entreprise des plus passionnantes. Dès lors, comment ne pas succomber à la classe et à la distinction du hard FM bien senti et distingué du sombre
Saraya ? Sublime et particulièrement inspirée, l’introductive «
Love Has Taken Its Toll » permet à l’auditeur d’être charmé par le charisme vocal de la somptueuse Sandi
Saraya qui trouvant selon ses propres dires son inspiration et sa raison de chanter chez Ann
Wilson de
Heart et Chrissie Hynde des Pretenders entre autres, semblerait plutôt se rapprocher du timbre de Janet Gardner de
Vixen et peut être aussi de la grande
Lita Ford. Egalement marqué par un riffing puissant et quasiment infaillible signé Tony « Bruno » Rey, ce premier single de l’opus parait garantir à qui choisit de s’attarder sur cette galette certainement oubliée de beaucoup aujourd’hui un moment agréable et dépaysant d’écoute. Effectivement, ce «
Saraya » est apparemment marqué du sceau de la qualité intrinsèque et de l’émotion, comme en atteste avec brio la sibylline « Healing Touch » et ses délicieuses lignes de keyboards sans parler de son refrain imparable n’étant pas sans trahir les émotions sincères et communicatives de Miss
Saraya, la vivifiante et enthousiaste « One
Night Away », la superbe et mélodique «
Back to the Bullet » ayant constitué le second single du disque ou encore l’inqualifiable «
Fire To
Burn » révélant pertinemment toute la puissance vocale de Sandi au travers de lignes de chant ayant tous les arguments nécessaires pour flirter efficacement avec la magnificence divine.
Même si
Saraya semble attirer très logiquement le focus sur sa classieuse vocaliste brune, il convient au nom de la justice et de l’équité de ne pas occulter le rôle prépondérant tenu par les autres membres du quintette originaire du
Garden State quant à l’élaboration de ce premier effort éponyme produit par l’expérimenté Jeff Glixman (
Kansas,
Kiss/
Paul Stanley,
Gary Moore,
Magnum,
Black Sabbath,
Yngwie Malmsteen…etc). Louons ainsi les indéniables qualités guitaristiques de l’impressionnant Tony « Bruno » Rey qui achèvera très certainement de convaincre les fanatiques de pignoleurs de manches de sa dextérité doigtale remarquable, notablement appréciable sur la speed rock « Runnin’
Out Of Time » et sa rythmique endiablée qu’il magnifie d’un solo magistral de technique, de rapidité et de feeling. Album varié s’il en est, «
Saraya » sait ne jamais ennuyer son auditoire et possède sans cesse le souci de divertir ce dernier, conquis faut-il le préciser par la grâce et la distinction globalement inhérentes à cette galette qui squattera mine de rien le Billboard 200 pendant 39 semaines jusqu’à en atteindre avec honneur la 79ème place. Morceaux inattendus du disque rompant subtilement avec l’ensemble, relevons la courte instrumentale « Alsace Lorraine » s’avérant être une pièce de piano relativement mélancolique signé le regretté Gregg Munier et constituant un hommage aux premières heures du combo au cours desquelles ce dernier répondait à l’improbable patronyme d’Alsace Lorraine (pourquoi pas Nord-
Pas-de-Calais ou Languedoc-Roussillon ?), l’intimiste et secrète « Gypsy Child » ou encore la ballade « St Christopher's Medal » pouvant être considérée à raison tel le bémol de l’opus tant par le sujet abordé que par le flagrant manque de relief général propre à cette entreprise maladroite et dispensable sur laquelle Sandi
Saraya rappellera vocalement parlant la péripatéticienne Madonna ci et là. Enfin, cette très sympathique galette que s’avère être le premier full length de
Saraya tire sa révérence au travers de la grave et mécanique « Drop the Bomb » qui malgré une dénomination qui siérait à merveille à un bombardement sonique de l’immuable escadron de thrash metal outre-rhénan Sodom constitue un épilogue relativement intense, glacial et original avouons-le d’une galette méritant à plus d’un titre un coup de tympan des plus attentionnés de la part des amateurs de hard FM de la seconde moitié des 80’s pour lesquels la classe et la distinction demeurent des composantes absolument indissociables dudit style.
Remarquablement inspiré et efficace autant dans sa composition que son interprétation, empreint d’une classe rare et irrationnelle que l’on imputera sans peine à la belle et talentueuse Sandi, le premier full length du ténébreux
Saraya possède malgré quelques rares exceptions pardonnables l’ensemble des attributs permettant de considérer un disque comme une expérience garante d’un voyage mystique dans l’univers fascinant du style qui lui incombe. Véritable petite perle de hard FM à chant féminin bien sentie valant son pesant d’or, «
Saraya » saura très certainement trouver l’adhésion unanime de celles et ceux ayant jadis été conquis par les inénarrables
Lita Ford,
Vixen et
Alannah Myles entre autres. Parce qu’il n’est jamais trop tard pour rendre hommage aux trop nombreuses gloires oubliées du rock n’ roll et de les faire revivre à plein volume grâce à votre chaîne hi-fi de salon, fenêtres grandes ouvertes, lumières baissées et bouteille de vodka à portée de main…
Chronique délicieuse, je n'ai pas encore écouté la vidéo mais ta description m'évoque un autre groupe; Witness, qui n'a fait qu'un seul album en 1988 avec la chanteuse Debbie Davis. Thanx !
Excellent groupe, à la carrière malheureusement trop brève, que j'ai découvert récemment. Ce disque est très bon mais j'ai un gros faible pour le suivant qui délivre un propos plus heavy tout en préservant un sens inné de la mélodie auquel j'attribue un 17/20.
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