Rhenium est un projet metal symphonique créé et mis en œuvre par Cristina Pucci à l'exclusion de tout autre membre, l'un des rares à avoir été tentés dans ce registre. Cette pluri-instrumentiste, auteure, compositrice et interprète d'origine italienne installée à Milton Keynes (Royaume-Uni) en 2010 a laissé glisser le temps avant de professionnaliser sa démarche en intégrant les studios et en accouchant de ses premières gammes 4 ans plus tard. Inspirée par les grands noms de cette veine metal, à l'instar de
Within Temptation,
Xandria,
Nightwish,
Epica ou encore
Stream Of Passion, l'inspirée musicienne et soprano n'a finalisé ses travaux qu'en 2016, à la lumière de son initial EP, « Rise Above the Sea », jeune et menue auto-production de 6 titres égrainés sur un ruban auditif de 23 minutes. Pour sa mise en valeur, un enregistrement convenable et un mixage bien ajusté sont à placer à l'actif de la jeune productrice, même si quelques détails et des finitions manquent encore à l'appel.
Là où Cristina marque ses premiers points concerne les passages en mid tempo, tous estampés metal symphonique pur jus.
Ainsi, c'est à la faveur de nappes synthétiques enveloppantes dans le sillage d'un
Nightwish des premiers émois, avec quelques notes en suspension dispensées par un gracile xylophone samplé, que nous parvient « Nobody Can Hear Me (free) », délicat et entraînant mid tempo enjolivé par les claires inflexions de la maîtresse de ces lieux. Aux faux-airs de Sharon den Adel, à l'époque de «
Mother Earth » avec un zeste de Julianne Regan (All About Eve), oscillant entre une fragilité maîtrisée et de célestes envolées non-lyriques, la jeune interprète magnétise notre attention, notamment sur un refrain immersif à souhait. Et ce, même si quelques brisures trahissent un potentiel à affermir pour impacter davantage.
Sur un mode rythmique similaire, «
More Than Words Could Say », plus sereinement encore, laisse couler moult arpèges au piano dispensés par une soprano bien inspirée, dans une logique d'articulation harmonique proche d'
Evanescence. Surtout, de subtiles modularités mélodiques revêtent couplets et refrains parfaitement coordonnés les rendant quasiment hypnotiques, avec de sensibles et insoupçonnées variations en prime, non sans renvoyer à
Delain, avec quelques accords dans le sillage des premiers
Xandria. Une plage plutôt sucrée pour certains, émouvante pour d'autres, mais qui ne laissera pas indifférent l'aficionado des sources d'influence de la compositrice.
Enfin, d'habiles gammes au piano se conjuguent à une ample couverture synthétique à l'aune du sémillant « Rise Above the Sea », où des choeurs en faction se font entendre. Dans une mouvance atmosphérique empruntée à
Amberian Dawn, dernière mouture, on ne résistera pas longtemps à l'enivrement procuré par de radieux refrains, même si l'on en aurait attendu autant des couplets. Un set qui fait comprendre que la jeune artiste a assimilé les codes du genre, rigoureusement restitué ses portées, et qu'elle détient déjà les clés d'une porte qui lui ouvrira l'accès aux valeurs montantes de ce registre metal.
Dans un second set, la princesse nous invite à la découverte de moments intimistes où les mots bleus prennent tout leur sens. Ainsi, de gracieux accords au maître instrument à touches accompagnent une violoneuse assise au fil des douces et touchantes incursions de la belle sur « Watching Over Me ». Cette progressive ballade atmosphérique dans la lignée d'
Epica nous amène à quitter le plancher des vaches pour embrasser un monde peuplé d'attractives chimères, que l'on souhaiterait voir se prolonger davantage. Trop bref et brutalement clôturé pour asseoir son pouvoir de séduction et déclencher une pointe d'émotion, cet intimiste moment bien qu'enchanteur reste donc pourvoyeur de quelques frustrations. Quant à «
Once Again », tendre morceau en low tempo, il nous propulse dans un prégnant univers organique et dispensé par une sirène mélancolique et bien habitée. Un joli solo de guitare nous est octroyé sur une piste carencée en luminescence mélodique, cette dernière handicapant d'autant les refrains, moins rayonnants qu'espéré. De plus, les impulsions de la déesse manquent de précision tant dans les montées que dans les enchaînements, nous faisant dès lors comprendre qu'il en faudra plus pour nous sustenter.
Enfin, comme tant d'autres formations l'ont fait avant elle, la belle a introduit son message musical par l'entame orchestrale de rigueur, que l'on se fera fort d'éluder tant elle l'entache d'ennui. Ainsi, une brève, classique et dispensable ouverture instrumentale nous est livrée, et ce, sous un faible éclairage mélodique se projetant sur de mornes plaines synthétiques ensemençant les terres inhabitées, mais non inhospitalières, de «
Drowning - Intro ».
Pas la moindre étincelle ne jaillira de cette plage. Bref, passons...
On découvre ainsi une valeureuse et sensible artiste, synthétisant en se les réappropriant partiellement un ensemble d'influences rejaillissant dans ses compositions comme dans ses pérégrinations vocales. Ce faisant, elle ne les a pas encore suffisamment digérées, au point de marquer de son sceau chacune de ses portées. De plus, quelques carences en matière d'originalité, de diversité atmosphérique, rythmique et vocale, et quelques faussetés altèrent la portée de son propos qui, en l'état, pourra tout de même se laisser effeuiller par les fans de ses maîtres inspirateurs, pour une écoute ou deux. Et ce, à condition de ne pas succomber à la tentation de la comparaison. Bref, un premier essai empreint de fragilités mais cristallisant un réel espoir pour la jeune artiste...
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