Sortir un album avec seize ans de retard est un exploit inédit dans l'industrie du disque, tout ça à cause d'une indécision à propos de l'artwork. Lassé par le laisser-aller du groupe, FNA Records (à l'époque A&M) met fin au pressage de
Revolution Day et le menace d'une fin de contrat imminente. Pris de cours, les Américains s'imposent des VDI (vacances à durée indéterminée) jusqu'à des retrouvailles en 2008 pour une tournée dans leur terre natale, le Tennessee. Repartie sur de bonnes bases, la formation est recontactée par FNA pour une éventuelle sortie du placard de ce fameux troisième album. Légèrement peaufiné avec deux titres enregistrés en 2010,
Revolution Day sonne finalement comme un
Tora Tora contemporain même si l'esprit de l'époque
Wild America ne semble pas avoir été réfuté.
Wild America fut la claque de la discographie du groupe (de l'année 1992?), pouvait-il se renouveler, suivre l'ère du temps ou préserver son essence tout en restant incroyablement inspiré? En vue de ce qui se trame au sein de la formation après la sortie de WA, il est difficile d'en attendre autant. Et effectivement,
Revolution Day n'est que le résultat d'un travail incomplet, un ramassis de titres vraiment moyens dans l'ensemble, qui n'aurait surement pas plus marqué qu'aujourd'hui lors de sa sortie initiale. Dommage car le nouveau «
Revolution Day» (un des deux titres récents) laisse prétendre un hard rock pêchu et dynamique, mené par un frontman dont la voix lorgne entre
Robert Plant et le défunt Andrew Wood. Un titre dans la continuité des tubes de
Wild America pour son refrain accrocheur et son riff en plomb. La seconde piste «Mississipi
Voodoo Child» n'est autre que le deuxième titre récent, morceau porté par un rythme fun et entraînant, représentatif de l'amour que porte le groupe à la country.
Et voici donc la cassure. La cassure entre le fruit d'un nouveau démarrage après une réconciliation et la tentative de faire une soupe délicieuse dans une vieille marmite. Malheureusement, le décalage est évident pas seulement au niveau de la production qui a quinze ans de retard mais plutôt dans ce rock très «ramasse-miettes» de la courte durée de vie du grunge. Alors que les Guns n'ont pas fini de faire trembler la Terre avec les Use Your Illusions I & II et que d'autres formations comme
Ugly Kid Joe s'éloignent de plus en plus du sentier des 80's,
Tora Tora se contente de laisser Patrick Francis mener les morceaux dont le jeu de basse remarquable n'empêche pas l'ennui de s'instaurer rapidement. En fait ce qu'il manque à
Revolution Day, ce sont des riffs. Des riffs de guitares de l'ampleur des deux (très bons) premiers morceaux nous auraient éviter les morceaux gavants que sont «
Shelter From The
Rain» ou «
Rescue Me» dignes des pires génériques de séries télés américaines. «Candle
And The Stone» rappelle énormément
Mother Love Bone, brin de nostalgie agréable mais qui n'a pas l'aura de «l'ancien
Pearl Jam». Ne reste ensuite qu'une poignée de titres plus ou moins écoutables mais pas franchement tonitruants, aux refrains beaucoup moins percutants que ceux proposés dans les albums précédents.
Un retour en demi-teinte pour
Tora Tora qui nous offre malgré tout deux titres forts. Une bonne intention qui empêche de crier à l'inutile même si le sentiment de ne pas revivre les moments passés avec
Wild America (ainsi qu'avec
Surprise Attack) donne sacrément envie d'enterrer le groupe et d'aller voir ailleurs. Et puis tout ça pour une pochette encore plus bâclée que les morceaux, faut pas se moquer du monde non plus. Une petite tournée des deux premières pistes et hop, au placard. Dommage, vraiment dommage...
SF.
Avec le recul, 1992 est effectivement une très, très grande année : Crimson Idol, Blood & Bullets de Widowmaker, Gotthard I, sans parler des bulldozers Countdown ou Images & Words, et de la scène allemande à son apogée avec les magnifiques Trapped et Pile of Skulls...
Dans un autre registre, le premier Robben Ford avec The Blue Line est une petite bombe, ainsi qu'un album de Clapton à pleurer, la B.O. du non moins excellent film "Rush"... Souvenirs...
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