«
Cloven Hoof » c’est un peu le poisseux dans la famille du heavy metal britannique. Beaucoup le reconnaissent comme un second couteau de la vague NWOBHM, alors qu’il aurait pu figurer en première ligne. Dommage que leur fabuleux « A
Sultan’s
Ransom » soit sortie à la fin des années 80, au moment où le public ne s’intéressait plus vraiment au heavy metal. Le groupe s’était disloqué après cet exploit en 1990. C’est à partir du début des années 2000, en pleine période de redécouverte des années 80 et du heavy metal old school que la formation refait parler d’elle sous l’impulsion du bassiste Lee Payne. La tentative de relance va s’avérer tumultueuse avec de fréquents changements de line-up. Un «
Eye of the Sun » tout juste honnête et éloigné de la tendance NWOBHM ne permettra pas à «
Cloven Hoof » de sortir de l’ombre où il s’est plongé voilà près de quinze ans auparavant.
C’est avec les anciens membres Russ
North et Jon Brown qu’est élaboré «
The Definitive Part One », figurant des anciens titres réenregistrés, pour la plupart massacrés. Ceux-là ne tiendront pas au sein de l’équipe. Russ
North a été remercié suite à un show particulièrement désastreux lors du festival
Power of the
Night de
2012 à Chypre, où il a été pris dans un état second. Lee Payne humilié par l’incident ne s’est pas fait prié. Il trouve un parfait remplaçant dans la jeune personne de Joseph Whelan, ayant participé par deux fois à la compétition britannique X Factor et se lançant parallèlement dans une carrière solo rock alternatif. Ceci va les diriger naturellement à la réalisation d’un nouvel album, le dénommé «
Resist or Serve », qui fera à peine mieux qu’«
Eye of the Sun ». «
Cloven Hoof » a beau résister, mais il continue de subir l’ère du temps.
L’ouvrage ne comporte pas véritablement d’introduction. On rentre directement au vif du sujet avec « Call of the
Dark Ones ». Comme sur l’album qui l’a précédé, nous ne pouvons pas faire de lien avec la période prestigieuse de la formation, quand celle-ci pratiquait un NWOBHM du meilleur acabit. Nous aurons en fait un heavy metal, enrobé de modernité. Cette apparence contemporaine doit beaucoup à son chanteur, qui figure en principal ouvrier de l’œuvre. Les autres intervenants se montrent tout bonnement moins loquaces ou moins efficaces que Joseph, comme nous le démontre notamment le riffing quelque peu poussif sur « Call of the
Dark Ones » ou encore la batterie que l’on retient amorphe. Ce constat est encore plus marquant sur un titre comme «
Northwind to
Valhalla ». Même si l’esprit est quelque peu rock n’ roll le rythme est laborieux. Le chant façon Coverdale qu’adopte Joseph est la chose véritablement attrayante à retenir sur ce morceau.
Dans un registre hard rock, il faut retenir un palpitant et nerveux « Austrian
Assault », qui néanmoins révèle les aspirations de son chanteur à un chant plus contemporain, inspiré du rock alternatif, comme le démontre le passage criard du pré-refrain. Ce titre permet à «
Cloven Hoof » de sauver les apparences, malgré sa répétitivité, surtout grâce à son divin et joyeux solo. Hors il est souvent état d’un jeu crispé, irrité comme sur «
Brimstone and
Fire », usant d’une rythmique effrénée et compressée, plus sympathique en fait pour son break. La rugosité est également au rendez-vous sur « Premature
Burial ». Il y avait pourtant une petite entame froide et posée qui nous prévenait d’un jeu autrement plus fluide et trempée. Même constat sur le priestien «
Hell Diver », s’épuisant rapidement dans un riffing presque syncopé et de perte de souffle tout au long de son déroulement. On retient ainsi que «
Cloven Hoof » a beaucoup perdu de sa subtilité et de son mordant.
Toutefois, sans parvenir à reproduire son heavy metal légendaire, le groupe se défend tant bien que mal avec des titres assez relevés. Nous pouvons retenir ainsi un«
Anti Matter Man » tenace avec ses riffs syncopés et son ambiance apocalyptique. Niveau ambiance destructrice, le nerveux et thrashisant «
Mutilator » n’est pas en reste. Tout n’est alors que violence, hâte, folie. Nous nous accordons là plus dans un heavy metal incontestablement moderne. En fait, cela va de pair avec la jeune équipe qui entoure actuellement Lee Payne. Heureusement nous avons aussi des titres plus enthousiastes, transmettant une énergie positive. J’en veux pour preuve le très galvanisant «
Deliverance ». Le chant y est plus relevé et ferait parfois songer à celui de
Bruce Dickinson. «
Cycle of
Hate », bien que mou en ce qui concerne la guitare rythmique, fait parfois preuve de passages forts plaisants. Celui-là se distingue une nouvelle fois par sa modernité, par le chant criard de Joseph. «
Cloven Hoof » a bien changé.
Le groupe tenu par Lee Payne est bien en phase avec son temps, mais pas avec la mode. La mode d’aujourd’hui en heavy metal, c’est de revenir à ce que l’on faisait à une certaine époque. «
Cloven Hoof » s’emploie à un heavy metal contemporain qui manque cruellement d’efficacité. Où sont les titres phares qu’il était autrefois capable d’élaborer. De plus, cela a beau s’accommoder avec la musique actuelle, à en croire ses riffs agressifs et le chant parfois criard, c’est beaucoup moins subtil et peaufiné que se fut sur « A
Sultan’s
Ransom » par exemple. Dans les déceptions des retours des groupes du NWOBHM dans les années 2000, en plus de «
Tank » et de «
Tokyo Blade », il faut ajouter «
Cloven Hoof », qui ne fera difficilement plus parler de lui autrement que par la présence d’un candidat de X Factor dans son line-up. C’est une vieille légende qui meurt à petit feu.
12/20
Un groupe que j'ai découvert grâce à la compilation "Metal Hammer" (1984) avec le titre "crack the whip" :
https://www.discogs.com/Various-Metal-Hammer/release/1916747
Si le premier album est plutôt rugueux, l'arrivée de Russ North (chant) (qui succède à David Potter) sur "Dominator" (1988) suivi du très bon "A Sultan's Ransom" (1989) a permis au groupe de proposer un style moins lourd et plus attractif, sans pour autant lui permettre de devenir un groupe majeur.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire