Liste des groupes Hard Rock LA Guns (USA-2) Renegades

Diffusé quotidiennement sauf week-ends et jours fériés sur TF1 depuis 1989, le feuilleton télévisé "Les Feux de l'Amour" comporte dans sa version domestique originale "The Young and the Restless" plus de 12 000 épisodes pour 48 saisons et met en scène les rivalités professionnelles et sentimentales de familles influentes de la ville fictive de Genoa City dans le Wisconsin que sont notamment les Brooks, Foster, Abbott et Newman. Trahisons, mensonges, guerres de clans, manipulations, vengeances, spoliations, procès, népotisme, fornications extra-matrimoniales, addictions, disparitions tragiques, réconciliations, rédemption etc, ce soap-opera américain à succès sur le segment de la ménagère de plus de 50 ans possède son équivalent dans les sphères impénétrables du hard US : le légendaire L.A. Guns dont l'Histoire est elle aussi truffée d'inquantifiables rebondissements et coups de théâtre qu'une anthologie en dix volumes suffirait à peine à compiler.

Formé à Los Angeles en 1983 par Tracy Richard Irving Ulrich aka Tracii Guns, les flingues de L.A. ont inscrit leurs lettres d'or au Panthéon du hard via la sortie de la triplette mythique "L.A. Guns", "Cocked & Loaded" et "Hollywood Vampires" entre 88 et 91. Relié au mastodonte Guns N' Roses par la collaboration d'Axl Rose dans une de ses premières moutures mais aussi par celle de Tracii dans les premières heures de l'ex-groupe le plus dangereux du monde avant l'arrivée de Slash, L.A. Guns a sorti treize full-lengths et a vu défiler une cinquantaine de musiciens dans ses diverses incarnations. Après avoir quitté le combo en 2002 et monté une version dissidente de ce dernier, Tracii se voit rejoindre en 2016 par le chanteur Phil Lewis, signe sur Frontiers Records et relance la machine avec deux opus et une ribambelle de gigs dont une tournée sur le Vieux Continent en septembre 2018.

Dans le même temps, le batteur Steve Riley esseulé mais dernier mohican du groupe originel qu'il n'a de fait jamais quitté, rappelle le bassiste classique Kelly Nickels et embauche la vieille connaissance du gang sleaze Scott Griffin (guitare) et le rookie Jacob Bunton (chant) vite remplacé par un Kurt Frohlich davantage fonctionnel car également guitariste. Après plusieurs e-crêpages de perruques entre représentants des deux camps sur Twitter, un premier show au M3 Festival de Columbia dans le Maryland, l'entame en conséquence d'une action en justice par Tracii pour trademark infringement et un Mick Cripps dragué par les deux bords mais qui finalement préférera rester neutre et l'anonymat de son projet The Brutalists aux joutes verbales publiques entre vieux pistoleros, la version de Steve Riley dégotte un deal avec Golden Robot Records et sort en novembre 2020 l'ironiquement bien nommé "Renegades".

Avant même d'insérer la galette dans sa platine et de procéder à l'écoute avec l'excitation d'une pucelle avant son premier bal, l'auditeur sera interpellé par le booklet tant sur son fond que dans sa forme. En effet, si l'artwork obscure et minimaliste griffé Kelly Nickels fait immanquablement référence au premier effort éponyme de 1988, le livret n'est dommageablement constitué que d'une feuille unique, exit donc les paroles des morceaux. Musicalement, "Renegades" ouvre le feu avec le punchy et fédérateur "Crawl", judicieux premier single du disque sur lequel Kurt Frohlich apparait comme un sosie vocal hallucinant de Phil Lewis. Gimmick à la velléité ostentatoire, ce mimétisme indéniable avec le parfumeur râté sera toutefois moins prononcé sur le reste du full-length, permettant à Frohlich d'exprimer une personnalité de frontman plus originale notamment sur l'efficace "Why Ask Why"  voyant Scott Griffin faire des étincelles à la lead guitar ou encore le très bon et classieux "Well Oiled Machine" qui tout en nuances, dégage ce feeling rock n' roll sleaze pur et vintage des débuts donnant envie de s'en mettre une au Jack Daniel's.

Au chapitre des titres impactants et essentiels de ce premier effort, mention spéciale également au morceau éponyme "Renegades" sur lequel Griffin pose encore un solo d'orfèvre digne du Tracii de la grande époque. Pas mal pour un bassiste de formation, qui d'ailleurs a enregistré l'excellent "Hollywood Forever" de 2012. S'il se veut être le gardien du temple de la tradition d'un hard rock sleaze puant la classe et la motherfucking attitude depuis plus de trente-cinq ans, le L.A. Guns de Steve Riley présente également sur ce disque inattendu une facette intimiste et introspective notamment via le sombre mais puissant et sublime "Lost Boys". Au registre de la tempérance, "Would" rappelle dans son intonation le "My Way" mondialement popularisé par Frank Sinatra et l'honnête "You Can't Walk Away" fait plutôt bien le job avec son cantique de refrain-titre sans non plus transcender l'auditeur tel que les magnétiques "The Ballad of Jayne" ou "Crystal Eyes". Plutôt concluant dans son ensemble, l'opus nous sert cependant son inévitable lot de fillers dispensables que sont les sans intérêt "Witchcraft", "All That You Are" et "Don't Wanna Know" clôturant maladroitement ce surprenant recueil référencé GOLDRR 103.

Rassemblant dans son équipée sauvage deux membres du line-up classique du mythique L.A. Guns dans un contexte d'opposition fratricide, ce "Renegades" assez inégal et sorti de derrière les fagots présente néanmoins des arguments plutôt convaincants, grâce à une série de bons morceaux desquels se dégage ci et là par effluves l'authentique esprit sleaze ayant jadis forgé la Légende dans les bas-fonds crasseux des rades du Sunset Strip. Enregistré aux Stagg Street Studios de Los Angeles sous la houlette de l'ex-WASP Steve Riley en personne, "Renegades" est articulé autour d'un son chaud et organique de bonne facture laissant notamment ronronner la basse de Nickels, le neveu de notre Pierre Perret national. Un album au format idéal de dix titres pour moins de quarante minutes qui au delà de donner envie de coudre un patch du combo sur sa veste en jean, fait espérer une future tournée sur les planches de nos contrées où Riley et son gang espérons-le, se comporteront de bien meilleure manière avec les fans que le minable Tracii Guns sur ses derniers passages en France, fuyant les fans, vendant en merch des bouteilles de whisky vides dédicacées 20€ et facturant au prix fort des meet n' greets ayant le goût amer de l'arnaque à pigeons.