Remember Sorrow

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17/20
Nom du groupe Diskelion
Nom de l'album Remember Sorrow
Type Album
Date de parution 12 Janvier 2015
Style MusicalMetal Symphonique
Membres possèdant cet album3

Tracklist

1. Forgotten 05:34
2. Far Away 05:47
3. Call My Name 05:01
4. Cry for Me 05:38
5. Silent Voice 04:03
6. My Spirits Despair 03:27
7. Remember Sorrow 04:50
8. Forever One 04:49
9. Broken Dreams 05:44
Total playing time 44:53

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Diskelion


Chronique @ ericb4

22 Octobre 2015

Une aérienne et subtile pièce d'orfèvre où s'harmonisent grace formelle et jouissive allégresse...

C'est à la découverte d'une épique et troublante aventure que nous convie Gaby Koss, parolière expérimentée et émérite soprano (Death Army, Nota Profana, Cantus Lunaris, Dominia, ex-Haggard, ex-Equilibrium (live), ex-Koyaanisqatsy). Et ce, à l'aune d'un colossal projet, ayant pris le temps nécessaire à sa pleine maturité. Précisons que cette inattendue proposition sort à une époque propice à la propagation d'une nouvelle orientation musicale, à grande échelle, dans le metal symphonique à chant féminin. En effet, depuis une poignée d'années, une tendance à l'opéra metal se dessine, semblant inspirer de plus en plus de groupes de cette obédience, avec des résultats variables selon les projets. Aussi, en quoi cette offrande, s'inscrivant dans cette veine artistique, peut-elle se démarquer pour nous rallier à sa cause plutôt qu'à une autre ?

Ayant auto-produit ce premier opus au bout de deux ans d'efforts, et ce, au Helionstudios (Munich), avec la contribution de Seref et René Berthiaume (Equilibrium), Gaby a également supervisé les paroles et les lignes de chant, pour un rendu très efficace et d'une extrême précision. De cet intense et minutieux travail en studio émanent des enregistrements épurés de toutes notes parasites. On remarquera notamment un mixage ajustant les parties vocales et/ou orchestrales de façon optimale. De plus, les enchaînements intra et inter pistes tout comme les finitions ont été passés au peigne fin, ne laissant ainsi transparaître que fort peu de passages résiduels susceptibles de miner notre confort auditif. C'est dire que la partie logistique, particulièrement soignée, donne déjà le sentiment de partir sur de saines bases.
Pour sa mise en oeuvre, la soprano a requis les talents de compositeur et de parolier du guitariste et claviériste Tom Harris. De ce travail de cohésion de tous les instants, il en ressort une œuvre artistiquement fertile, rythmiquement puissante, mélodiquement généreuse et sensuelle, parfois romantique, aux gammes fondamentalement immersive. Poussant le metal symphonique à son paroxysme, flirtant ainsi avec un opéra metal propre, mais sans lissage excessif, noble mais son exubérance ostentatoire, sachant ainsi déjouer les pièges de la grandiloquence, cette proposition metal à orientations plurielles évite judicieusement les poncifs du genre. Ce faisant, elle veille à maintenir l'intérêt de l'auditeur jusqu'au terme d'un luxuriant et jouissif voyage.

Mais, le duo ne s'est pas arrêté là pour communiquer ses arpèges. Il a fait appel à quelques invités triés sur le volet, afin d'assoir un supplément d'âme dont se sont amplement nourries les ragoûtantes compositions égrainées sur les neuf pièces d'égale longueur que compte cette juteuse rondelle de trois-quarts d'heure. Aussi, pour conférer une dimension philharmonique au propos, ont été sollicités : le bassiste Sebastian (Symbolic), le flûtiste Albert Dannenman (Cantus Lunaris, Blackmore's Night), le batteur Manuel di Camillo (ex-Equilibrium), le guitariste et claviériste René Berthiaume (Equilibrium) ainsi que les violonistes Daniel (Nota Profana, Simon Bolivar Youth Orchestra) et Alexey Mester (Cantus Lunaris). Ce qui n'a pas été sans effets sur l'octroi d'une stupéfiante profondeur de champ acoustique et de parties techniques échafaudées avec tact et restituées avec brio.
Plus encore, ce qui démarquera surtout ce message musical d'autres de même acabit, ce sont les jeux de complémentarité et de parallélisme entre vocalistes exclusivement féminines. Pour ce faire, Gaby a fait appel aux Sopranos : Kerstin Bischoff (ex-Xandria, ex-Axxis), Alev (ex-Nota Profana), Julie Deletoile (Kosmik Vortex), mais aussi aux Mezzosopranos : Zuberoa Aznarez (Diabulus In Musica) et Hannah Wagner (Saeldes Sanc). Joutes oratoires, mises en relief, jeux de cache-cache, émulations, fusions, offrent un riche panel de performances, stimulant dès lors nos pavillons pour venir nous toucher au plus profond de nous-mêmes. Jouant de nos émotions avec habileté, les entrecroisements vocaux de ces déesses se révéleraient-ils aptes à avoir raison de nos plus farouches résistances ?
Que le rideau s'ouvre sur la scène et que les projecteurs placent ces nymphes et leurs acolytes instrumentistes sous les feux de la rampe. Ecoutons-les alors et tentons de percevoir le message qu'ils ont à nous livrer. Musique...

De sculpturaux actes nous attendent, à l'aune de moments au symphonisme avéré, à l'empreinte heavy, dont l'esquive s'avère être une illusoire entreprise. Ceux-ci nous cueillent d'entrée de jeu, et de quelle manière... De savants arpèges au piano nous invitent à pénétrer au cœur de « Forgotten », titre à la touche heavy symphonique, où Gaby et Zuberoa nous livrent des jeux d'ombre et de lumière des plus savoureux, le long d'une ligne mélodique sulfureuse et indéfectible. En parallèle, de somptueuses séries d'accords distillées par d'enveloppantes nappes synthétiques interpellent, et même aspirent le tympan, inexorablement, dans la lignée de Diabulus In Musica. Et ce, alors que les deux déesses se livrent à une extasiante émulation sous l'égide de prestations aux fines volutes et aux nuances de tonalité des plus infiltrantes, harmonisant profondeurs abyssales et célestes incantations, avec une parfaite et hypnotique tenue de notes jusqu'à l'ultime. Mais, ce n'est là qu'un hors-d'oeuvre... Plus encore, imposante plage heavy symphonique d'inspiration wagnérienne, « Call My Name » sait user d'un discret tapping pour nous imposer ses gammes ravageuses et son tempo effréné. Ce faisant, cette pièce dantesque nous installe sur de magnétiques refrains entonnés par un duo de sopranos enchanteur, suivant un cheminement mélodique rigoureux et immersif à souhait. Cette flamboyante pièce aurait l'étoffe d'un hit en puissance, la qualité d'un solo de guitare et la subtilité des arpèges en plus.

Sans surprises, les moments metal symphonique pur ne manquent pas à l'appel, non sans ravissement pour le pavillon, loin s'en faut. Ainsi, un fugace clavecin et un fringant violon nous calent sur l'entraînant « Far Away », non sans rappeler Dark Sarah. Ce morceau metal symphonique aux riffs crayeux nous aspire dans les méandres de couplets somptueux et bien ajustés et de refrains à l'inaliénable mélodicité. Dans cet engageant parcours auditif, deux sirènes aux timbres dissociés, s'affrontent pour mieux se lover, traduisant ainsi une fine coordination entre elles. Gaby et Hannah, en véritables bourreaux des cœurs, d'un battement de cil, nous cueillent dans leurs filets oratoires. Ainsi, la sauce prend rapidement, tant les sinuosités dans les notes en voix de tête sont réglées au millimètre et prêtes à nous happer, sans jamais avoir à forcer le trait. De plus, on appréciera un solo de guitare à l'alerte picking sur un bref pont synthétique que se plaisent à enjamber les deux angéliques interprètes, pour un voyage onirique au firmament. Enfin, dans cette mouvance, l'outro de l'opus nous réserve une surprise de taille. De rayonnants arpèges au clavecin nous immergent dans l'atmosphère enjouée de « Broken Dreams », frondeuse plage aux riffs arrondis, dans l'esprit de Xandria, première mouture. De saisissantes joutes vocales, dispensées par Gaby et Kerstin, illuminent successivement couplets et refrains, pour ne plus nous lâcher d'un pouce. Résister à cette déferlante serait une tentative bien vaine. Eminemment mélodique, cette soyeuse piste révèle un travail très appliqué sur chaque mesure, sans pour autant négliger quelques passages techniques du meilleur effet. Le spectacle s'achève crescendo sur une note céleste à l'unisson, celle qui « tue » et nous libère de toute contingence matérielle.

Diversifiant son offre, le combo nous convie aussi à un metal symphonique progressif, selon un double regard. Plombant rythmiquement, puissant dans son assise percussive, « My Spirits Despair » est un titre metal symphonique progressif qui laisse convoler à l'unisson deux déesses aux timbres que tout oppose pour un ravissement de tous les instants. Cassures de rythmes, variations atmosphériques, folles cavalcades oratoires d'une stupéfiante maîtrise nous enivrent tout le long de cette pétillante gâterie. Sous un autre angle, on découvre une ravissante ballade progressive aux accords pénétrants, insufflés par un piano inspiré, et aux arpèges fort bien ajustés, avec « Remember Sorrow ». Aussi, le titre éponyme de l'opus ne rate pas sa cible, celle de nos émotions. Gaby excelle dans cet espace privé, câlinant le tympan de délicates inflexions haut perchées, au fil d'un tracé mélodique des plus incitatifs à l'adhésion. Pour parachever cette toile de maître, un savoureux solo de guitare s'invite à la danse. De nombreux effets de surprise et des prestations vocales haut de gamme se superposent à cet ensemble déjà affriolant. Des variations de tonalités de fort bon aloi se déversent et se calent au moment où piano et violon se tiennent la main pour fermer la marche.

Par ailleurs, un petit rai folk vient aussi illuminer quelques passages metal éminemment symphoniques, non sans rappeler Lyriel. Véritable traversée au gré d'un duo de sopranos, le véloce et sculptural « Cry for Me », couplé à une touche Amberian Dawn, déploie ses charmes harmoniques à l'orée de couplets tout en jouissives modulations, sans compter les refrains qu'on entonnerait à tue-tête. Difficile de rester impassible face à cette avalanche de douces patines vocales et de ne pas saisir au vol un spectaculaire solo de guitare aux prises avec un clavecin en liesse. Un break opportun se fait souffler par une imparable reprise sur le refrain. Sans oublier une attention particulière accordée à la chute en fin de piste. Exercice relevé de main de maître.

Comment aurait-on pu oublier quelques mots bleus dans cette veine atmosphérique ? D'une part, une violoneuse introduction déroule le tapis rouge à un duo de sopranos confondant de sensibilité, nous élevant dans un espace féérique sur « Silent Voice », ballade précieuse mais non altière. Nos émotions sont touchées et l'on se plait à frissonner par tant de grâce libérée et de subtilités harmoniques à fleur de peau contenues dans ce gemme. D'autre part, on ne passera pas à côté du puissant et captateur mid tempo d'influence heavy, « Forever One », celui-ci prenant des allures de ballade où deux chavirantes empreintes vocales se cherchent et s'enlacent pour offrir un succulent jeu de complémentarités, Julie venant donner le change à la maîtresse de cérémonie. Une délicieuse onde vibratoire nous gagne soudain, pour nous submerger littéralement, sur ce charismatique duo dans l'esprit de Dark Sarah. Le point d'orgue de la piste apparaît lorsque le violon amorce ses gammes pour les déployer simultanément au fringant champ oratoire. Emouvant passage, s'il en est. C'est sur une heureuse tonalité que s'achève notre traversée.

On ressort séduit, pour ne pas dire abasourdi par tant d'emphase et de flamboyance oratoire au sein d'une orchestration efficace, délivrant un schéma harmonique varié et faisant montre d'une technicité éprouvée. L'ensemble restitue avec précision les portées de chaque composition tout en sollicitant les émotions de l'auditeur, que ce dernier aura bien du mal à contenir. On découvre une œuvre qui a évité l'écueil de brefs instrumentaux, souvent inconsistants, et de fresques qui, parfois, peinent à maintenir l'intérêt jusqu'au bout. On dispose alors de neuf pistes, pas une de plus, mais ayant évacué nombre de passages peu ragoûtants, pour ne conserver que la quintessence de ce que peut offrir actuellement le registre metal dans lequel le groupe s'inscrit. Ni la production, ni les compositions, ni le jeu d'écriture, ni les prestations sont à prendre en défaut. De plus, l'agencement des titres permet d'offrir un spectacle riche en arpèges et en contrastes, étoffé de coups de théâtre, équilibré entre violence et douceur, flamboyance atmosphérique et tamis romantique.
Certes, le principe de la combinaison de voix n'est pas innovant en soi. Par exemple, Beto Vazquez Infinity a déjà mis au point ce concept quelques années auparavant. Mais, cette orientation metal opéra conjuguant uniquement des timbres de voix de sopranos et mezzosopranos n'a que très rarement été explorée. Une nouvelle flèche à l'arc de ce registre s'esquisse alors, qu'il s'agira d'affiner encore avec le temps et la multiplication des projets de cette nature. Ce qui, pour le moment, n'empêche nullement d'observer qu'à l'issue du voyage, on éprouve l'irrépressible désir de reprendre le bateau.

On conseillera cet album à tout amateur de metal symphonique, mélodique, gothique, atmosphérique à chant féminin, dans le sillage des sources d'influence du groupe. Les fans de la productrice et illustre interprète s'y retrouveront, cette dernière ayant imprimé sa signature vocale sur chaque partition de son œuvre, souvent concoctée par son acolyte. Pour une première offrande, celle-ci a témoigné d'une parfaite coordination des interprètes sélectionnées et compte ne pas en rester là. Nul doute que ce message musical trouvera un écho favorable auprès d'un auditorat qui, probablement, s'élargira. Du moins, arguons que ce sensuel et magnétique écrin ne tardera pas à trouver preneur, car il le vaut bien...

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Insmomnium - 24 Octobre 2015: Commentaire d'après lecture (et d'après écoute): Je dois dire que je sors assez frustré de l'écoute de ce skeud. Certes les lignes vocales sont parfaites (suis-je le seul à penser à Brigitte ?...Mon Dieu) et envoûtante, d'une justesse et d'une qualité peu commune.

Certes les orchestrations sont sublimes, variées, recherchées, et on retrouve parfois une polyharmonie très intéressante sur certains titres (Call My Name). Et pourtant je trouve que le rendu manque assez cruellement de puissance. En effet, les guitares sont bien trop mises en retrait, et distillent des riffs avec peu ou prou de variations inter et intra compo. De plus, la batterie répète inlassablement la même rythmique ce qui confère une certaine linéarité aux compositions. On observe ainsi peu de "moments de bravoures" et les compositions ont du mal à se démarquer les unes des autres.

Pourtant Diskelion nous montre qu'il est largement capable de changer d'ambiance en témoigne Cry For Me, titre éminemment plus varié que le ce qui précède, et quelque peu plus prog, nous distillant quelques solis et mélodies dans une veine classique avant de s'embarquer dans une atmosphère violoneuse, mais juste ce qu'il faut pour être reposante. Ou encore My Spirits Despair qui, pour une des premières fois de l'album, étale une certaine puissance guitaristique. Court mais efficace.

Le classique fait évidemment partis intégrante de cet album, que ce soit de part l'utilisation des violons et d'un véritable piano, ou mêmes de certains riffs aux synthés. Voir même dans l'utilisation d'éléments bien plus authentiques comme d'une clavecin (ou hapsichcord) dans Broken Dreams.

Ainsi, Silent Voice, aurait pu être une magnifique ballade si seulement le groupe avait pu nous proposer quelque chose de plus consistant, tout du moins plus épique, auparavant. On peut déplorer que Diskelion a d'avantage voulu jouer de subtilité que de démonstration ce qui est bien dommage. Silent Voice encore, nous aurait proposé un imposant soli supporter d'une batterie lourde de tom, comme cela avait pu être le cas sur Tides Of Time d'Epica, mais au lieu de cela, le groupe ne nous propose "que" une atmosphère lente (et belle) au violon. Violon que l'on a malheureusement trouvé sur quasiment toute la durée de la piste ce qui enlève grandement l'effet de surprise et amène cette frustration que je tente de décrire (tu dois savoir de quel moment je veux parler Eric).

On pourra tout de même admirer la beauté de certains titres comme Remember Sorrow, dont la ligne vocale ne va pas sans nous rappeler Simone Simons avec une touche d'Against Myself dans l'utilisation d'une touche plus cybernétique. Et qui ne répète pas l'erreur de la "ballade" plus précédente nous distillant d'un virtuose soli de guitare.
La fin de l'album se fait d'ailleurs à l'image de cette composition.

Pour conclure, je dois dire que Diskelion possède un potentiel monstre. Mais un potentiel ici bien trop peu mis en exergue. La dualité classieuse-lourdeur (et dont l'un des exemples les plus flagrants est Forever One) qui a tenté d'être créée dans cet album se voit malheureusement décrié par une production ayant fait la part belle aux symphonies, au détriment des instruments qui le sont moins (ou pas). Frustration vous dis-je. D'autant que ta chronique laissait présager une bombe. Malheureusement, la bombe a été désamorcée.
ericb4 - 24 Octobre 2015: Merci pour cet avis motivé qui prend, in fine, des allures de contre-chronique. Apparemment, l'album a suscité un certain intérêt de ta part, mais pas ta totale adhésion. Dommage! D'autant plus que nombre de tes arguments auraient pu faire penser le contraire. Pour un album qui t'a frustré, tu lui trouves tout de même pas mal de qualités! Auquel cas, tu aurais bien raison, d'ailleurs.

Il est vrai que si l'on s'attendait à une offrande emplie de puissance percussive sur la majeure partie de l'oeuvre, on risque de rester sur sa faim (la chronique pouvait le laisser présager). En effet, comme dans nombre de projets émergents en Metal Symphonique à chant féminin, ces derniers temps, telle n'était pas la logique conférée à ce projet, celui-ci ayant pris le temps nécessaire à son élaboration et à la justesse de chacune de ses mesures pour un rendu tout en superbes jeux de nuances atmosphériques. Ce propos se veut globalement entraînant, parfois énergisant mais jamais inutilement agressif ou débordant de violence. Ce qui, de toute manière, n'aurait pas contribué à rendre cette oeuvre plus immersive qu'elle ne l'est. Du moins, nous aurions été en déconnexion avec les fondements d'une proposition axée sur les subtilités formelles, distillant de manière équilibrée de doux et pénétrants instants et un rayonnement des harmoniques corroborées à quelques rythmiques souriantes et sereines.

Il serait illusoire de penser que Gaby Koss n'a pas inséré quelques touches de son valeureux passé dans le registre metal dans lequel elle s'inscrit. On le ressent bien, à condition d'en avoir eu connaissance, avec une empreinte toute personnelle sur ces compositions aux riches arpèges. En effet, celle-ci a misé sur les variations d'ambiance, de rythmiques (perceptibles dans des conditions optimales d'écoute et sur la durée), de champs vocaux, le tout généré dans une parfaite cohérence avec son objet et les thématiques développées.
Pour assoir son oeuvre, elle a misé sur une souplesse féline de frappe, avec quelques petits effets techniques, mais pas trop, pour permettre justement aux lignes mélodiques de se disséminer dans des conditions autorisant leur parfaite mise en relief. La qualité du mixage aidant, chaque partie se perçoit clairement sans effets de compression ou de sous-mixage des voix et des instruments. C'est dire que si les soli sont un peu mis en retrait, bien que la fluidité des déliés soit tout de même accessible à l'audition, ils n'avaient pas pour objectif de s'imposer au détriment d'une orchestration qui, bien souvent, suit un cheminement harmonique sans failles. Ils devaient simplement s'intercaler, en finesse, pour ne pas rompre le rythme d'ensemble de chacun des morceaux où ils nous sont proposés et ainsi distribués. Les contrastes sont à chercher ailleurs, notamment dans les joutes oratoires, mais pas seulement.

On comprend que ce message musical ne se nourrit pas tant de démonstrations instrumentales ostentatoires, parfois caricaturales, si ce n'est sur quelques ponts bien placés, que sur un cahier des charges conférant un rôle équitable entre les parties en présence. On tend ainsi vers un ajustement des lignes générales autorisant un équilibre des éléments dans l'espace sonore. On peut ainsi avoir l'impression que l'ensemble paraît aseptisé, mais de légères fêlures, opportunes et bien contrôlées, s'observent néanmoins. Telle devient l'orientation privilégiée de nombre de ses homologues, certains misant sur des complémentarités de styles pour proposer un soupçon d'originalité, pas nécessairement évident à créer dans un registre aussi peu perméable aux prises de risques quelles qu'elles soient.

Il y a certes le rôle prépondérant de l'émetteur créateur, mais aussi celui du récepteur auditif, qui a évolué et s'est étoffé et diversifié, depuis quelques années maintenant. Cette oeuvre souhaite ainsi répondre à certaines attentes d'un public réceptif à un metal symphonique à chant féminin qui est devenu pluriel, s'étant nourri d'influences diverses. Et, honnêtement, après de très nombreuses écoutes et au regard de ce qui sort en oeuvres de qualité dans ce registre ces derniers temps, je ne vois pas ce qui pourrait empêcher Gaby de toucher, à son tour, un public, expert ou novice. Difficile de tout avoir, certes, mais là, nous détenons un très bel album qui s'expérimente, s'apprécie au fil des écoutes, avec un peu de recul, et qui saura assurément combler bien des amateurs du genre. Si l'accroche ne s'opère toujours pas au bout de cinq écoutes, alors autant passer son chemin...
Insmomnium - 24 Octobre 2015: Justement, c'est bien le fait que cet album possède énormément de qualités qui est frustrant. La touche classique est extrêmement plaisante car on ne la retrouve que trop rarement aussi mise en avant (ou alors dans d'autres styles).

Je trouve également très intéressant d'avoir mis sur quasi-chaque compositions une double (voire triple) voix. Cela confère une profondeur de champ très bienvenue. Surtout que cela est très bien appuyé par les orchestrations avec l'utilisation de lignes symphoniques graves et aiguës. Je ne sais pas s'ils se sont entourés d'un véritable orchestre mais pour ma part je trouve le rendu orchestral entre violon, contrebasse, piano, clavecin et l'utilisation très fréquente de pizzicatos extrêmement plaisante. C'en est même un des points forts de l'album.

De plus, je ne dis pas qu'une touche plus violente aurait du être amenée, sous le couvert d'accélérations fulgurantes mais simplement que la batterie aurait mérité d'être mise plus avant afin de conférer une meilleure accroche au rendu global.

En ce qui concerne les guitares, il aurait peut-être été plus amusant qu'elles suivent la lignée des orchestrations et s'invitent elles aussi dans des tappings, voir quelques riffs dans des tonalités plus hautes. Et pas seulement de support. Parce que parfois il a bien du se faire chier notre ami Tom. Mais j'ai aussi pu déceler un jeu de manche que je n'avais pas remarqué à la première écoute. Cet album renferme peut-être bien plus qu'il n'y paraît même si je reste encore sur ma faim à la fin.

Il est vrai toutefois qu'après plusieurs écoutes, il est amusant de repérer toutes les lignes mélodiques et orchestrales cachées dans les titres. Par contre je trouve que les solos sont parfois assez mal placés (comme sur Far Away où il sort de nul part ce qui est assez déroutant). Sinon j'adore totalement le refrain de cette compo et comment la soprano se fait une petite descente dans les aigus.
ericb4 - 24 Octobre 2015: Merci d'avoir manifesté le désir de prolonger le temps d'écoute pour une sensibilisation plus affinée à cette perle. Je pense qu'à l'issue de plusieurs écoutes, en effet, on peut se rendre compte des petits détails esthétiques de production, de la richesse des accords et de la précision de chaque portée où s'inscrivent ces instruments, le plus souvent samplés. Hélas, il n'y pas d'orchestration physique mais d'excellents arrangements donnant le sentiment que l'ombre de Wagner rôde à chaque soubresaut instrumental...

Il est vrai que les parties de guitare auraient pu davantage avoir droit au chapitre, mais me semblent calées là où Tom a décidé de placer ses gimmicks. C'est d'ailleurs lui qui a composé la plupart des titres de l'opus, Gaby s'étant davantage focalisée sur les parties vocales et les choeurs, même si c'est cette dernière qui signe de son sceau cette oeuvre. Ces jeux de guitare servent de raccords efficaces sur ponts et breaks, tout en suivant le cortège orchestral à la trace, sans effets de superposition, de manière à conserver un espace sonore lavé de toute impureté, sans frôler pour autant des reliefs immaculés.

Cette stratégie a été pensée pour ne pas perturber le développement des lignes de chant, le plus souvent en duo (donc avec des effets de juxtaposition inhérents à l'exercice vocal lui-même que la présence plus marquée de guitares aurait pu alourdir). Donc, ces parties de guitare sont exploitées de façon judicieuse tout en jouant un rôle non négligeable, même si elles ne sont pas prépondérantes. Peut-être qu'une fresque aurait permis de les mettre davantage sur le devant de la scène.

Finalement, on se rend compte que le contrôle logistique et technique de l'opus est total. On a même pensé à évacuer d'inconsistants instrumentaux, dont quelques autres oeuvres peuvent souffrir, pour ne conserver que la quintessence de ce que peut proposer ce combo, animé par une furieuse envie d'en découdre.

Quand on entre en contact avec les experts et savoureux entrecroisements vocaux des mezzosopranos et sopranos, on oublie bien vite ces relatives carences. Ce faisant, elles parviennent à compenser partiellement la discrétion du panel de frappe, contribuant ainsi à conférer un méritant relief acoustique à l'ensemble. On aurait aimé encore un morceau ou deux, pour prolonger le plaisir des sens... peut-être par une suite donnée à ce dantesque projet!...
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