Je n'ai jamais été une très grande amatrice de black symphonique américain. Sauf exception, les groupes que j'ai pu écouter proposaient une musique trop générique, fade et sans ambiances, ou alors un black mélangé à un death brutal trop bordélique dénaturant tout l'essence même du style. Rien de bien folichon. Je suis donc très frileuse quand on me propose de nouvelles choses provenant de ce pays, et en général je reste sur ma faim. Sauf cette fois-ci avec
Enthean, une formation originaire de Caroline du Sud. La bande, composée de trois musiciens dont un multi instrumentiste, sort fin mai son tout premier album "Priests of
Annihilation", qui fait suite à une démo sortie il y a quelques années. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on est loin de se retrouver avec une musique générique !
Enthean reste malgré tout fidèle à ses origines et nous propose un black symphonique...intégrant une bonne part de death brutal technique.
Pas de surprises de ce côté là, il s'agit d'un mélange mainte fois exploité et pas toujours bien réussi. Mais le trio est loin d'être manchot et dénué de toute imagination. Au lieu de nous bombarder à coups de cavalcades techniques, il utilise ses guitares pour nous concocter des arpèges remplaçant tous claviers ou violons, à la sauce
Origin ou
Fleshgod Apocalypse (avant "
Agony"). Les nappes sont pourtant bien présentes et créent une ambiance obscure, avec ses choeurs oniriques en arrière-plan. Mais on est loin du schéma classique : le black imite le death, le death imite le black, les deux fusionnent ou s'affrontent, s'alternent et s'acoquinent avec d'autres styles comme le thrash ou le prog.
Le mélange est osé, voire déroutant, car le groupe sait particulièrement passer du coq à l'âne. "1054" ouvre les hostilités avec un black symphonique incisif et gracieux à la
Emperor, balance claviers, blasts et riffs costauds sans grande difficulté, enchaîne avec des offensives thrashy, poursuit avec des shreds tirés directement du death technique, et fournit une partie instrumentale épique très inspirée par la musique classique.
Les pistes s'enchaînent mais ne se ressemblent pas. "Tones of
Desecration" fait, lui, davantage dans le death metal avec ses riffs assassins et son growl caverneux, mais il est vite rattrapé par des claviers et des moments black mélodique à la
Dissection. On reconnaît un black/death épique et grandiloquent sur "Before You, I Am" qui cartonne avec sa progression, son break acoustique incantatoire, ses solos et ses sept minutes de pure bonheur.
Chaque morceau propose une nouvelle dimension, avec son ambiance qui lui est propre et ses soli inventifs. Il faut s'accrocher lorsque tout part dans tous les sens, comme sur le tordu "
Ekpyrosis" qui fait la part belle à la technique des guitares. On va du black véloce au death technique virevoltant sans transition, toujours avec une ambiance travaillée et maîtrisée. "Behold the
Primordial" est un autre exemple avec son black symphonique hollywoodien qui se marie avec classe à la technicité des grattes. C'est rapide, imprévisible, carré et même des breakdowns à la
Hate Eternal se font une petite place. Quand à "Invalesc de Profundis", on a cette ambiance black symphonique prédominante accompagnée d'un passage acoustique, d'une technique à couper au couteau, d'une lourdeur bienvenue et d'un groove impeccable à la basse, sans oublier les lignes jazzy qui vont avec.
"Priests of
Annihilation" est une très bonne surprise. Il s'agit d'un album qui s'écoute d'une traite et qui surprend du début à la fin, surtout lorsqu'on est habitués aux trucs basiques et sans âme qui circulent constamment. Bref, on a huit titres particulièrement étoffés, un bon compromis entre brutalité, technicité et mélodicité, une ambiance qui nous transporte et une production aux petits oignons. Cette première sortie est très mature et n'annonce que du bon pour l'avenir du groupe !
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