Encore un ixième groupe de metal symphonique à chant féminin, sans doute promis comme tant de ses homologues à une carrière éclair, me direz-vous, et qui, en ces temps agités par une vive concurrence dont ce registre continue de faire l'objet, songerait à vous donner tort ? Ce serait sans compter l'indéfectible motivation de ce jeune combo brésilien cofondé à São Paulo en
2012 par la mezzo-soprano
Arya Medeiros et le claviériste Wagner Cappia (Vismal), originellement voué à des reprises de titres emblématiques de
Nightwish, dont le parcours en dents de scie aurait découragé plus d'un de ses pairs à en poursuivre l'entreprise...
Aussi, mû par un soudain élan d'inspiration, quelques mois seulement séparent la création du groupe de la réalisation de son premier single, «
Vitruvia » ; une entraînante offrande elle-même agrémentée d'un clip vidéo ayant, lui, contribué à le populariser. Mais pour des raisons personnelles, le projet restera en stand by cinq années durant, le collectif sud-américain ne revenant dans les rangs pas avant fin 2018. Et ce, à l'aune d'un second et envoûtant single dénommé «
Quantica », produit, enregistré et arrangé cette fois par l'expérimenté vocaliste brésilien Thiago Bianchi (
Noturnall, ex-
Shaman), également connu pour avoir produit certains albums d'
Angra,
Karma,
Shaman,
Wizards, entre autres ; effort à la production de bon aloi qui lui ouvrira plus largement les portes de cette scène metal, la troupe se voyant notamment invitée à ouvrir le concert de
Noturnall à
Santa Catarina un an plus tard. Portés par ce succès d'estime, quelque huit années suite à leur sortie de terre, les Brésiliens d' Eve
Desire en veulent plus, beaucoup plus...
Dans ce dessein, le groupe accouchera en mars 2020 de son premier album full length, «
Prelude to Singularity », une galette modeste de ses 36 minutes distribuée par le label brésilien
Dynamo Records, pour laquelle Thiago Bianchi s'est vu confié la production, le mixage et le mastering (Fusão Estudios (São Paulo)) ; une patte experte qui n'a pas été sans effet sur le confort auditif procuré par les huit titres de l'opus, composés pour l'essentiel par nos deux maîtres d'oeuvre. Ainsi, s'esquisse un propos metal symphonique classique aux relents power mélodique, dans la veine de
Nightwish,
Xandria,
Amberian Dawn et consorts. Ouvrage à la fois pulsionnel, épique et romanesque auquel ont été également impliqués les guitaristes Lucas Fragiacomo, Bruno Sena et Mauricio Nogueira (
Matanza), le bassiste André Fernandes, le batteur Rafael Hernandez, et Thiago aux bongos ; une belle brochette d'instrumentistes aguerris complétée des talents habilement conjugués des vocalistes de la chorale Madrigal
Ever Dream, conduite par
Arya. A l'instar de ce méfait, un tournant dans la carrière de nos inspirés concepteurs serait-il en train de se dessiner ?
Nous projetant sur des charbons ardents, certaines pistes essaiment par là même les mesures aptes à nous retenir, un peu malgré nous. Ce qu'atteste, d'une part, l'up tempo syncopé «
Chronos » ; une véritable torche incendiaire aux riffs corrosifs et au martelant tapping, au carrefour entre
Nightwish et
Xandria, qui ne lâchera pas sa proie d'un iota. Sur un même modus operandi, n'ayant de cesse de nous asséner ses toniques et véloces coups de boutoir, et livrant un refrain immersif à souhait mis en habits de lumière par les envolées lyriques de la déesse, l'impulsif « New
Past » comme l'enivrant «
Black Hole » n'ont pas moins tari d'armes de séduction pour aspirer le tympan du chaland. Tout aussi incisif mais moins immédiatement domptable et voguant sur d'ondoyantes nappes synthétiques, l'intrigant «
Mayan », pour sa part, n'en génère pas moins une énergie aisément communicative.
Quand la cadence se fait plus mesurée, nos acolytes peuvent là encore compter sur l'efficacité de leurs arguments pour nous happer. Ainsi, à la lumière du ''nightwishien'' mid/up tempo «
Quantica », on entre dans un chaudron bouillonnant, le combo décochant de sidérantes montées en régime de son corps orchestral et oratoire ainsi qu'un fringant de solo de guitare, tout en sauvegardant une mélodicité toute de fines nuances cousue. A la sirène eu égard à ses limpides et pénétrantes inflexions aux airs d'une
Tarja à ses débuts d'achever de nous convaincre de ne pas quitter prématurément ce hit en puissance. Nous octroyant un pont techniciste de fort bonne facture tout en offrant de grisants changements de tonalité ainsi qu'un entêtant refrain, et non sans rappeler un
Amberian Dawn de la première cuvée, le tubesque mid tempo «
Vitruvia » poussera lui aussi à une remise en selle sitôt l'ultime mesure évanouie. D'une technicité instrumentale plus complexe, le romanesque et ''xandrien''«
Elysium », quant à lui, laisse entrevoir des enchaînements intra piste des plus sécurisants et de soudaines accélérations du convoi instrumental. Et la sauce prend, là encore.
Que l'aficionado d'intimistes espaces se rassure, sans pour autant y avoir misé tous leurs espoirs de l'emporter, nos compères ne l'ont nullement laissé pour compte, lui adressant par là même leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre « Eternally », une ballade d'inspiration ''nightwhienne'' et romantique jusqu'au bout des ongles, dotée d'un troublant slide à la guitare acoustique, de couplets finement ciselés et d'un poignant solo de la part du lead guitariste. S'il jouit d'arrangements aux petits oignons, d'aucuns auraient sans doute espéré se voir gratifiés d'un refrain aux arpèges d'accords plus immédiatement lisibles qu'ils n'apparaissent.
A l'issue de notre parcours, force est d'observer que le combo sud-américain n'a pas plaint sa peine, nous livrant un propos à l'ingénierie du son plutôt soignée, transpirant la féconde inspiration mélodique de ses auteurs et générant une technicité instrumentale difficile à prendre en défaut. S'il diversifie ses phases rythmiques et vocales, on aurait toutefois espéré un message musical plus varié sur le plan atmosphérique et des exercices de style moins stéréotypés qu'ils ne nous sont proposés, par l'octroi d'instrumentaux, fresques, et autres duos, notamment. Il conviendra encore que nos acolytes se libèrent du joug de leurs maîtres inspirateurs pour conférer davantage d'épaisseur artistique à leur projet et qu'ils consentent à l'une ou l'autre prise de risque, afin de retenir plus largement et sur la durée un tympan déjà familiarisé avec les codes et vibes des cadors du genre. Bref, un enchanteur et chatoyant mais tâtonnant mouvement insufflé par la formation brésilienne...
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