Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, c'est un adage qui pourrait s'appliquer à ce combo parisien qui triture toutes les idées musicales qui passent à leur portée. Et ce n'est pas la seule chose qui en fait un groupe pas comme les autres…
Point
Mort a vu le jour en 2014, et a fait jusqu'ici deux EPs, "
Look at the Sky" en 2017 et "R(
Hope)" en 2019, avec des participations au Brutalfest et au Motocultor Open Air. D'abord simplement des amis qui... voulaient faire de la musique ensemble, ils se sont stabilisés après plusieurs changements de line-up en un quintet, emmené par la vocaliste Sam Pallay.
Contrairement à certains, le groupe n'a pas pâti de la période du Covid, puisqu'il en a profité pour composer et enregistrer son premier album à son rythme. La majeure partie de la musique a été enregistrée live, y compris le chant, et les doublages et parties additionnelles ont été rajoutées par la suite.
L'artwork très coloré et énigmatique est plutôt original pour un disque de métal, et il est l'œuvre de la chanteuse Sam, sous le pseudonyme particulièrement hardcore de Chatouille. Quand je vous dit que c'est un groupe pas comme les autres…
Si on essaie de les catégoriser, les étiquettes ont la fâcheuse tendance à se décoller, et ni celle de post hardcore, ni celle de post metal, ou de mathcore ne suffisent à embrasser l'étendue de leur spectre. C'était déjà le cas sur leurs deux premiers EP, et beaucoup auraient simplifié la recette pour la rendre plus digeste. Pourtant, le quintet a choisi de pousser encore les choses vers les extrêmes, au risque de se vaporiser comme une supernova. Point
Mort, contrairement à son patronyme, change continuellement de braquet, d'intensité, souffle le chaud et le froid, à l'instar d'un Dillinger
Escape Plan, si ce n'est qu'avec le chant féminin, il se rapproche autant d'Azusa, projet du bassiste de DEP Liam
Wilson et des anciens
Extol Christer Espevoll et David Husvik. Mais ce serait plutôt l'influence de
Converge qui frappe frontalement sur le titre d'ouverture -"
In Cold Blood : A Warmer
Heart…", avant que les cartes ne se brouillent et volent en tous sens.
La voix de Sam peut se faire douce comme un voile, ou screamée en mode écorché. Ses capacités vocales sont impressionnantes, me rappelant celles d'Eleni Zafiriadou, chanteuse des précités Azusa. Elle semble même avoir un spectre encore plus large, à l'aise dans tous les types de vocaux agressifs (ces plongées dans le growl à la fin de "Les Corps Flottants...."), et disposant d'une palette nuancée de chants clairs.
Les morceaux peuvent être longs, voire dépasser les dix minutes ("Olympe…", "
Ash to
Ashes."), et sont dotés d'ambiances très variées ; même sur un titre plus simple comme "La Bienveillance des Faux...", qui commence hardcore rapide, puis mélange rock posé et screams sur son refrain, et évolue de manière sludgy pour terminer en blasts. On a affaire à une espèce de pieuvre musicale, qui prend un malin plaisir à vous désorienter, vous saisit un bras, relâche son étreinte avant de vous étriper d'un autre. Il n'y a que huit titres, mais composés de tellement de parties que l'opus s'apprécie mieux dans son ensemble. Pour tout dire il y a assez de riffs pour faire deux albums, par exemple dans "Olympe..." j'en ai compté une dizaine, sachant qu'il y a des variations.
Seul "Corners..." offre une vraie respiration intimiste avec un aparté guitares claires/chant mélodique au milieu de cet ouragan qu'est "
Pointless".
Inutile de dire qu'avec des morceaux aussi versatiles et imprévisibles, un certain nombre d'écoutes est nécessaire pour rentrer pleinement dans cet opus. Il y a heureusement nombre de bonnes idées qui font mouche et des passages mémorables à la pelle… même s'il est difficile rétrospectivement de les situer. "
Pointless" est un premier album ébouriffant, déconcertant, mais il récompense la persévérance avec une violente candeur.
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