DSKNT, voilà encore un sombre combo de black metal inconnu au bataillon et qui semble sortir de nulle part. Pourtant, l’entité bicéphale, association maudite de Asknt, qui officie ou a officié dans de nombreux combos suisses tels AION,
Exordium ou Necrosemen, et de Deus
Mortuus, également hurleur chez Antiversum et
Blakk Old Blood, s’est tout de même formée en 2013, mais ce n’est qu’en cette funeste année 2017 qu’elle accouche chez Clavis Sekretorvm de son premier blasphème musical.
Inutile de faire durer le suspense,
PhSPHR Entropy est un monstre de black metal lent, lourd, dissonant et bruitiste comme il en existe peu. La voix rauque et infernale de Deus
Mortuus, râle quasi death metal qui semble venir des abîmes, vient renforcer l’atmosphère noire et sulfureuse qui nous prend à la gorge dès le titre d’ouverture et qui ne nous quittera pas pendant les 41 minutes que dure l’album.
D’entrée, cette voix vomie, ce riffing sifflant et déstructuré, cette basse chaotique aux secousses brutales et ce martèlement sourd et régulier nous plongent dans un tourbillon de noirceur et de malaise qui sonne comme un hybride abject de black orthodoxe, de death et de doom qui nous séduit autant qu’il nous révulse. En effet, le combo suisse peut faire penser à un mélange réussi de
Deathspell Omega,
Desolate Shrine,
Portal et des derniers
Ruins of Beverast au dessus duquel planerait le spectre maudit de
Blut aus Nord, et donc, vous l‘aurez compris, ces six titres sont particulièrement oppressants, lourds et asphyxiants et constituent une expérience éprouvante à la limite de la claustrophobie.
Pourtant, si la plupart du temps, on se sent englué dans des ténèbres épaisses qui nous mènent en aveugle aux frontières de l’angoisse, (le début de S.O.P.O.R., à la sauvagerie bestiale qui annihile toute émotion, l’entame du titre éponyme avec ses dissonances repoussantes), l’art musical de DSKNT n’est pas monochrome, et quelques accalmies interviennent parfois dans ce déchaînement de violence : ainsi, Kr. Vy Rites, titre ambiant glacial et terrifiant avec ses dissonances sifflantes et ces percussions indus emplit l’air d’un malaise palpable sans faire aucunement appel au metal, tandis que Kr. Vy Portals, titre très porté doom avec son tempo lent, ne nous agresse pas directement, préférant nous envelopper dans cette chape brumeuse dont les vapeurs pénètrent insidieusement tous les pores de notre peau, s’écoulant dans une sorte de sérénité solennelle presque apaisante à l’aura spirituelle…
En fait,
PhSPHR Entropy s’apparente plus à une exploration des ténèbres, à la lente progression et au tâtonnement diffus dans les sinueux et obscurs méandres des abysses qu’à une chute inéluctable et définitive. Les explosions de fureur sporadiques aux riffs décomposés et tourbillonnants et aux blasts affreusement lourds et mécaniques succèdent à un metal rampant et nauséeux, formant un tout hypnotique tour à tour affreusement violent et douloureusement lancinant (Resurgence of
Primordial Void Aperture).
Alors oui, c’est vrai, la musique du duo n’est pas foncièrement novatrice (
Deathspell Omega et
Portal sont déjà passés par là, traçant la voie d’un nouvel art maudit toujours plus abject), mais elle est tellement intense, distillant un malaise palpable et annihilant implacablement toute lumière, qu’on ne peut s’empêcher de tomber sous le joug maléfique de ce premier album magistralement réalisé. En conclusion, DSKNT est un groupe au potentiel de destruction extraordinaire, et
PhSPHR Entropy en est le premier manifeste, pas loin du chef d’oeuvre dans ce style de black si hermétique et dissonant. L’hiver en Suisse, il peut faire froid, très froid, vous voilà prévenus.
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