Sortir un album de métal progressif à l’heure actuelle demande non seulement un bagage technique irréprochable mais également une grosse paire de couilles. Tant de choses ont été faites que proposer un disque intéressant dans ce créneau est devenu une véritable épreuve de titan. Alors, lorsque je vois débarquer ce premier opus de
Outworld lors des ultimes jours de 2006, je me dis que je devrais peut-être terminer cette année sur une note perfectionniste, rien n’étant souvent laissé au hasard dans ce genre de disque.
J’achète le disque et tandis que beaucoup s’extasient sur le fait qu’il s’agisse du groupe de
Rusty Cooley, le guitariste (pour ma part inconnu au bataillon mais ayant suscité l’admiration de
John Petrucci et
Jeff Loomis, ce qui ne peut laisser présager que du talent !), je fais pour ma part attention au chanteur de cette galette. Mais c’est Kelly Carpenter ! Le vocaliste m’ayant collé des frissons indéfinissables et dérangeants sur l’exceptionnel "Section X" de
Beyond Twilight. Je suis d’emblée rassuré, posséder un tel chanteur et un gratteux imposant le respect au guitariste de
Dream Theater ne peut amener à produire un album mauvais.
La musique se situera d’ailleurs pas mal entre celle de DT, avec une grosse louche de
Symphony X et une pincée de
Judas Priest. Voilà notre potion magique ! Un métal power/trash progressif d’une puissance dévastatrice et d’une technique impressionnante sans être rebutante.
En effet, si Rusty est un très grand guitariste, jouant avec ses notes comme peu sont capables de le faire, il faut avouer que nous avons tellement vu de choses ses dernières années que, l’effet de surprise passée, ça nous bouleverse beaucoup moins. Mais heureusement, le quintette a composé de vrais morceaux ne misant pas forcement tout sur la technique, donnant donc au disque une espérance de vie bien plus longue que la moyenne des sorties du genre.
Un titre comme le phénoménal "
Grey Tide" montre un groupe utilisant avec une grande intelligence la technique et le groove, afin de créer un morceau cohérent de neuf minutes sans une seule seconde de lassitude. Le solo parvient à se défaire d’une superficialité encore quelque peu présente en étant très mélodique, beau et presque drôle (ne me demander pas pourquoi mais il me fait sourire) tandis que le magnifique et puissant refrain se cale dans notre tête pour ne plus en sortir de si tôt. Les claviers sont utilisés avec parcimonie que ce soit pour les notes ou les solos, de telle sorte que l’on n’a jamais l’impression qu’il y en ai trop.
Kelly Carpenter est simplement magistral, conférant une agressivité extraordinaire à l’ensemble, et digne d’un Rob
Halford. Sur "
War Cry" notamment, où il explose plusieurs octaves sans aucun problème de son chant tétanisant sachant se faire plus rauque sur le refrain ou plus mélancolique quand l’atmosphère le demande ("
Outworld"). Une grande performance, même si elle reste très loin et différente de l’excellence de tous les instants présents sur Section X, un chant plus métallique et moins unique, c’est comme cela que je le qualifierais sur cet album.
Les morceaux sont pour la plupart très rapides, comme le démontre le titre d’ouverture "
Raise Hell" débutant sur une mélodie de clavier éclair et un "beat" de batterie donnant de suite la couleur. Sur "The
Never", la première chose nous venant à l’esprit est "Tiens, voilà le nouveau
Symphony X" (qui était tant attendu au moment de la sortie de ce disque !) tant l’intro composée de ces claviers tranchants et d’une combinaison guitare-roulement batterie rappellent les américains.
Le tout s’écoute et se réécoute avec grand plaisir mais, s'il est très bien produit (le son est très lourd et confère encore plus d’agressivité à l’ensemble), très bien composé et interprété (on sent que tout a été pensé dans les moindre détails), il manque une certaine fraicheur, où un petit quelque chose d’indéfinissable qui ferait toute la différence.
De plus, certaines parties solos n’évitent pas le piège de la démonstration, comme sur "Riders", où Cooley en fait vraiment trop, ce qui déçoit à la longue. En revanche, et c’est étrange, l’intermède instrumental "Prelude to Madness" passe admirablement bien, grâce à la présence du piano donnant un léger air nostalgique et au son de guitare inhabituel et trafiqué.
Alors sans se montrer incroyablement transcendant et novateur,
Outworld délivre un album de haute voltige dans un genre saturé et exigeant. La suite, sans Kelly Carpenter au micro (un brésilien inconnu du nom de Carlos Zema l’a depuis remplacé) s’annonce difficile mais le talent de composition démontre une réelle capacité à pouvoir progresser. Une chose est sûre, rien ne sera plus jamais comme sur ce premier album…
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