Tenter de se frayer un chemin dans le si concurrentiel espace metal symphonique à chant féminin relèverait aujourd'hui de la gageure pour les vertes formations. C'est pourtant sans complexe, mais non sans afficher une certaine prudence dans sa démarche, que se lance dans l'arène ce jeune quintet espagnol créé en 2020 à Barcelone. En effet, s'il réalise son introductif et discret EP, «
Through the Glass », un an à peine suite à sa sortie de terre, il faudra patienter la bagatelle de deux années supplémentaires pour le voir accoucher de son premier et présent album full length, «
Oniria » ; auto-production où se dispatchent dix pistes inédites sur un ruban auditif de 44 optimales minutes. Quels seraient alors ses armes pour espérer compter ce frais combo parmi les sérieux espoirs d'un registre metal où les jeunes loups aux dents longues sont loin de manquer à l'appel ?...
Ce faisant, et après quelques remaniements de son équipe, la chanteuse aux chatoyantes inflexions Leticia Saenz, les guitaristes Dani Arranz et Ferran Castillo, suivis d'
Alba Galimany, à la basse, et de Guillem Villar, à la batterie, nous mènent au cœur d'un metal symphonique gothique à la fois pulsionnel, enjoué, énigmatique et romantique, dans la lignée d'
Imperia,
Pythia,
Atargatis,
Nostra Morte, Anabanta, et consorts. Jouissant dores et déjà d'une technicité instrumentale éprouvée et de lignes mélodiques fleurant bon la féconde inspiration de leurs auteurs, la galette bénéficie parallèlement d'un enregistrement de bonne facture, ne laissant alors percevoir que de menues sonorités résiduelles, et d'un mixage bien ajusté entre lignes de chant et instrumentation. Tous les voyants seraient alors au vert pour nous offrir une traversée des plus sécurisées sur cette mer limpide en apparence mais à la profonde agitation intérieure...
C'est à la lumière de ses pistes les plus enfiévrées que le combo ibérique marque ses premiers points. Aussi ne pourra-t-on que malaisément esquiver un headbang bien senti sous l'impact des furieux et inaltérables coups de boutoir assénés par « Dance of Dragons », up tempo heavy symphonique à la croisée des chemins entre
Pythia et
Imperia ; un trépident effort aux riffs acérés et mis en habits de lumière par les fringantes patines de la déesse, que l'on ne quittera qu'à regret. Dans cette mouvance, on pourra également opter pour le jovial «
I'm the One » au regard de son refrain immersif à souhait, là encore enjolivé par le gracile filet de voix de la belle.
Plus complexes techniquement, les ''anabantiens'' «
Persephone » et « Perzys Ānogār », quant à eux, ne génèrent pas moins une énergie aisément communicative. Et ce n'est pas le fin legato à la lead guitare dispensé sur chacune de ces pistes qui nous débouteront de ces offensifs manifestes, loin s'en faut.
Quand la cadence du convoi orchestral se fait un poil moins alerte, nos acolytes trouvent à nouveau matière à aspirer le tympan. Ainsi, déversant un entêtant refrain mis en exergue par les puissantes impulsions de la sirène (aux faux airs de Helena Iren Michaelsen (
Imperia)) et calés tous deux sur une mélodicité toute de fines nuances cousue, l'enjoué mid/up tempo «
Army of Fear » comme le corrosif et ''atargatien'' « Prayers in the
Night » auront raison des plus tenaces des tentatives de résistance à leur assimilation. Difficile également d'éluder les ''imperiens'' mid/up tempi « Dreams Without a Memory » et « Restorer of the World » : l'un, tant pour ses enchaînements intra piste ultra sécurisés que pour son flamboyant solo de guitare à mi-morceau ; le second, eu égard à son caractère enjoué et à son infiltrant cheminement d'harmoniques.
Dans cette dynamique, quand il se fait parfois un tantinet plus énigmatique, voire obscur, le propos n'assignera pas moins le chaland à résidence. Ce qu'atteste «
Hail to the
Reaper », mid/up tempo dark gothique symphonique au carrefour entre
Atargatis et
Tristania. Dans ce vaste champ de turbulences, un duo en voix de contrastes bien habité s'offre à nous, les claires volutes de la belle offrant un saisissant face à face avec les growls caverneux de son comparse. Une gorgonesque et glaçante offrande aux riffs crochetés, instillée d'un seyant solo de guitare et pourvue d'un refrain agréable à défaut d'être inoubliable. Et la sauce prend, in fine.
Lorsque les lumières se font plus douces, toute tension s'évanouira d'un coup d'un seul, nos compères imprimant alors à leur message musical leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre « Shadows & Sins », ballade atmosphérique et progressive romantique jusqu'au bout des ongles, que n'aurait sans doute reniée ni
Imperia ni
Pythia. Greffé de délicats arpèges au piano et d'une sente mélodique des plus enveloppantes, sur laquelle se calent les troublantes oscillations de la maîtresse de cérémonie, et se chargeant en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié ne saurait être esquivé par l'aficionado de moments intimistes.
Au final, le quintet espagnol nous octroie une œuvre à la fois solaire, intrigante et romanesque, jouissant d'une ingénierie du son de bon aloi. Diversifié sur les plans atmosphérique et rythmique, le méfait l'est en revanche bien moins concernant ses lignes de chant, la belle monopolisant le micro durant la majeure partie de la traversée. D'aucuns auraient sans doute espéré des exercices de style plus variés qu'ils n'apparaissent, fresques, instrumentaux et autres duos manquant à l'appel. Encore trop proche de ses modèles identificatoires pour apposer une réelle signature artistique à son propos, le groupe devra également consentir à l'une ou l'autre prise de risque pour se démarquer de ses challengers, toujours plus nombreux à affluer. Bref, un fringant mais si classique effort généré par le combo ibérique, néanmoins susceptible de le compter parmi les espoirs à ne pas mésestimer de ce registre metal...
Note : 12,5/20
Merci à toi! Je comprends tes réserves concernant la capacité de la chanteuse à nous embarquer plus que cela dans son univers, et parfois quelques faussetés ne sont pas à exclure non plus, j'en conviens.
En fait, ce sont surtout ses médiums, qui me rappellent étrangement ceux d' Helena Michaelsen d'Imperia, qui m'avaient interpelé, même s'il est encore prématuré pour elle d'égaler le niveau d'interprétation de la frontwoman de l'illustre groupe néerlandais. A voir si les progrès tant attendus seront de la partie sur leur prochain opus...
Oui c'est vraiment ça! J'ai grincé des dents sur quelques notes! C'est dommage car à cause de ça je n'arrive pas à rentrer pleinement dedans!
Concernant Imperia, je ne connais pas, je vais donc écouter ça.
Maintenant il est clair que la chanteuse doit s'améliorer sinon je crains que ça va être difficile pour ce groupe de se démarquer
Imperia est un groupe de metal symphonique de renom, que je suis depuis ses premiers albums, et dont le répertoire pourrait te plaire. Perso, j'aurais un petit faible pour l'album "Queen of Light", sorti en 2007, avec notamment l'ensorcelante ballade "Abyssum", magistralement interprétée par Helena. Difficile, dans ces conditions, pour Leticia de se mesurer à elle, mais elle doit persévérer pour s'améliorer et permettre ainsi au groupe de ne pas rester dans l'ombre trop longtemps.
Pour ma part je suis désolé mais cette chanteuse chante si faux tout le long que je n'ai franchement réussi à écouter ce disque, j'ai finis par seulement le parcourir de ci de là en travers et il en ressort que c'est dommage d'avoir une telle chanteuse parce qu'il y a un petit potentiel dans le reste du groupe....mais bon pour les morceaux que j'ai réussi à écouter en entier c'était pas dingue dingue non plus et assez décousu même si certains passages sont biens. Pour moi pour l'instant ce sera dans la case "si ils passaient dans mon quartier je vais les voir en live, sinon sur album c'est niet".
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