On les Aura !

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16/20
Nom du groupe Régiment
Nom de l'album On les Aura !
Type Album
Date de parution 18 Juin 2015
Labels Antiq Records
Style MusicalBlack Metal
Membres possèdant cet album21

Tracklist

1.
 L'Ogre l'Emporte Encore à l'Est
 01:15
2.
 Sauvagerie Prussienne
 02:23
3.
 La Sape
 02:18
4.
 La Mort du Nègre
 05:08
5.
 ..En Dépit des Assauts Furieux du Kronprinz...
 02:33
6.
 En Avant !
 05:48
7.
 Des Capotes à la Popote
 04:50
8.
 Credo
 03:04

Durée totale : 27:19

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Régiment


Chronique @ TasteofEternity

19 Fevrier 2020

La Voie Sacrée remise à l’honneur.

"La mort éteint l’action de l’homme, l’Histoire la ravive comme le sel sur les plaies, c’est le prix du souvenir."

Le contact visuel avec l’œuvre ne laisse pas indifférent : putain Pétain !!! Portrait hexagonal sorti tout droit d’un manuel d’histoire de 4e enrubanné du drapeau français sur un fond verdâtre sur lequel se dessine une carte d’état major. A première vue, le groupe a décidé de ne pas retenir ses coups.

Régiment se présente comme une réunion d’anciens combattants aux solides états de service. Certains ont fait leur classe dans Aorlhac, Borgia, Peste Noire, d’autres continuent de ferrailler pour Véhémence, Anus Mundi, Lugnasad et j’en passe et des meilleurs, bref des militaires de carrière rompus au combat. Le label qui les encadre, Antiq (structure française à taille humaine ouverte en 2009), n’en est pas à son coup d’essai, lui non plus, puisqu’il a déjà travaillé avec certains des groupes précités. Nous sommes en famille. En réalité c’est bien pire que cela car H. aux guitares n’est rien d’autre que l’un des deux piliers du label. Antiq a toujours mis un point d’honneur à faire les choses par lui-même en en déléguant le moins possible, la contre-partie de ce côté artisanal (tirage limité, support K7 revalorisé, et concepts albums affirmés) rappelant les premières heures du mouvement, ce sont des moyens limités pour produire les groupes retenus par le label. Voyons si c’est toujours le cas avec "On les aura !".

Le mélange arbitraire proposé par Régiment de black et de death surplombé par ce timbre rocailleux si cher à feu Borgia nous happe instantanément. Véritable fil rouge qui nous permet de traverser le temps, la production s'évertue à faire ressortir les contrastes et les changements de rythmes. Rien ne semble laissé au hasard tant l’équilibre est subtile, même si ici l’atmosphère prévaut. Ce que H. appelle l’âme d’un groupe est palpable tant dans les cavalcades meurtrières (Sauvagerie Prussienne, La Sape) que dans les prises de positions asphyxiantes (La Mort du Nègre, En Avant). C’est rien de dire que les 5 sont au diapason sur cette percée, ça nous rappellerait presque que nous avons gagné cette guerre. La démonstration de force qui se déploie sous nos yeux ne se laisse pas aller à artiller à bonne distance tous azimuts. Le travail se fait ici en profondeur, au corps-à-corps, dans les tripes et le sang, la boue et la crasse, à grands coups de baïonnettes, de pelles et de poings dans la gueule. C’est rudimentaire, archaïque, et primitif comme l’instinct de survie qui nous étreint. L’identité sonore de Régiment est à chercher du côté de glorieux aînés avec en ligne de mire Arghoslent revenu en force dans l’hexagone à travers la réédition de son catalogue par Drakkar, le tout mâtiné de fulgurances dignes d’un Dissection survitaminé, et des lignes mélodiques aux relents heavy qui ne sont pas sans rappeler la NWOBHM et Iron Maiden en tête, autant vous dire ça sent pas le neuf et encore moins le plastique cette histoire. L’ensemble sonne d’une terrible cohérence, sans esbrouffe, ni instruments baroques ou encore claviers. L’étonnante sobriété instrumentale assure son efficacité tout au long des huit titres, dont une intro, un intermède et une outro, pour 27 petites minutes d'assauts répétés dans le froid, la boue, et le sang.

Pétain, seul, au frontispice de l’album : engagement, provocation ou trompe-l’oeil ? Pourquoi Pétain (1856-1951), et pas Foch (1851-1929), Joffre (1852-1931), Gallieni (1849-1916) ou Nivelle (1856-1924) ? Cette réponse appartient au label. Il est vrai que pour certains le flou demeure sur la stature de l’homme qui fut tour à tour considéré comme le Héros de Verdun, le Sauveur de la France pour finir condamné à mort le 15 août 1945 comme le Patron de la Canaille de Vichy, laquais du IIIe Reich, prêt à livrer les siens tout en prétendant les protéger. Aucun militaire de haut rang ne peut se prévaloir de ne pas avoir de sang sur les mains. Joffre sans Gallieni n’aurait jamais lancé la contre-offensive de la Marne en août 1914 et se serait planté avec son fameux plan XVII, Foch, le chantre de Clausewitz et de l’offensive à outrance, tombe en disgrâce en 1916, Nivelle, après avoir brillé à Verdun, sombre avec le massacre du Chemin des Dames en 1917… Mais une guerre appelle des morts, et des héros. En France on devient Maréchal, soit grâce au courage des soldats, soit le plus souvent à cause de l’incompétence de ses corréligionnaires. Sauf qu’aujourd’hui, en 2020, en dépit des zones d’ombre, comment, d’une part, ne pas admettre que Pétain, Héros et Sauveur, est une fabrication pure et simple à des fins politiques ? Difficile, d’autre part, de dissocier le militaire du politique avec Pétain, au-delà du fait qu’il s’agisse du même homme, il est question d’une seule et même intention, quelle que soit l’ampleur du sacrifice concédé : gagner par tous les moyens ! La défaite de juin 1940 a fait plier un genou à terre à la France, Pétain lui fit mettre le second. De sorte qu’arborer son portrait avec autant de déférence est au mieux une méprise d’élève du secondaire, au pire une prise de position impardonnable. En se permettant de jouer sur l’image d’un personnage rayé des cadres, banni de la ville de Verdun elle-même, le groupe exacerbe le sentiment au choix de rejet ou de fascination, mais accroche le regard ; sur ce point, l’instrumentalisation est efficace mais à double tranchant. Le groupe aurait fait parler la poudre et honorer ses morts avec une photo du 33e corps flanquée de la cocarde tricolore. Si Saumur est le bastion de l’Ordure, alors Saint-Cyr sonne le Martyr.


En conclusion, la thématique guerrière est devenue un lieu commun du metal extrême, le spectre de la première guerre mondiale verse dans une hype bien contemporaine. On ne compte plus les groupes qui s’y sont confrontés Endstille, Minenwerfer, Gherzen, Sacriphyx, God Dethoned lui a consacré rien de moins qu’une trilogie, sans compter les Ukrainiens de 1914, dont l’identité du groupe est intrinsèquement liée à la période. Côté français, la Grande Guerre inspire également nombre de groupes avec des fortunes diverses d’Azziard à Neptrecus en passant par FT-17 et Mourning Dawn. Sans avoir la prétention de faire du neuf avec du vieux, Régiment arrive à tirer son épingle du jeu dans un style qui ravive un passé douloureux chargé de souvenirs (livret très soigné, riche en illustrations et textes) qui ont forgés l’identité d’un peuple qui s’oublie de plus en plus, servi par une production sur mesure pour l’occasion.

19 Commentaires

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Y_RPLEUT - 23 Fevrier 2020:

La partie dédiée à la chronique musicale ne laisse pas indifférent en tout cas, vais essayer d'aller écouter ça.

adrien86fr - 29 Fevrier 2020:

Superbe chronique, le concept thématique n'est pas sans me rappeler ceux chers au Dr Konofal et aux Joyaux de la Princesse qui aime à fouiner dans ce genre de pans passionnants de l'Histoire de la Grande et Belle France, cette Grande Dame terre d'accueil, de travail (mot qui disparaitra bientôt du dictionnaire), d'assimilation.. Pétain, homme controversé ; même Macron s'y est brûlé la langue ; cela va de paire avec le black metal, la pochette est impactante et clive assurément, Verehne a sans doute atteint l'objectif fixé au travers ce premier effort discographique à une époque où les politiques n'ont plus le sens du sacrifice, mais celui de se filmer la verge et les bourses à la main.

adrien86fr - 12 Juin 2020:

Superbe et surprenant disque, véritablement.. Puissant et varié dans son propos, "On les aura !" happe en effet l'auditeur que je suis au travers ses éructions impactantes d'obédience rythmique diverse et ses atmosphères historiques et martiales à la LJDLP, Triarii ou encore Arditi. Le son et les plans de guitares sont terribles pour le genre et la relative confidentialité du projet. Mention spéciale également aux vocaux de Géraud s'avérant être profonds et sepulcraux à souhait. Et le tout respire le chauvinisme cocardier et la franchouillardise, ça fait vraiment pas de mal par les temps qui courent. Seul bémol, je trouve la voix du narrateur de l'épilogue trop lisse, propre et presque efféminée sur les bords (on dirait que c'est un chroniqueur de France Culture qui parle), le rendu aurait été davantage intéressant et digne de l'ensemble avec un bon gars de chez nous garni d'un accent régional sentant bon le peuple et l'esprit de clocher. Merci Art ! 

LeMoustre - 12 Juin 2020:

@acmae, les paroles sont en Français 

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