"Tu imagines
1349 mixé avec
Wardruna ? Ben, pour vulgariser, c'est ce qui t'attend avec
Korpblod." Mon cher ami dont je tairais le nom pour des raisons futiles ne s'était pas trompé. J'étais bien décidé à en découdre avec le monstre
Korpblod, cette créature, cette entité nordique jusqu'alors inconnue. La question étant : comment ai-je pu passer à côté d'un tel monstre ?
Un monstre musicalement, mais également dans la durée : le duo n'a pas torché son dernier bébé à la va-vite, puisqu'il dure quand même une heure pour huit morceaux. Un gros monolithe, et je vous garantis que vous ne regretterez pas cette heure accordée à cette majestueuse pièce, pour peu que vous puissiez entrer dans l'univers épique de
Korpblod.
Je vous rassure de suite, nous ne sommes pas en présence de branlette Bontampi comme chez
Graveland. Ici, le souffle aventureux vient plutôt des instruments folkloriques et des choeurs de voix tantôt grégoriens, tantôt celtiques. La rencontre entre "Chant d'Automne" de
Belenos et "Laukr" de
Wardruna, vous saisissez un peu la chose ? Je vois déjà briller dans vos yeux la gourmandise et la hâte. Patience, patience, mes chers amis, finissez d'abord de lire ce que je suis actuellement en train d'écrire en écoutant "Ur Denna Eld".
Parlons-en, justement, de ce titre d'ouverture. Imaginez un champ de bataille dévoré par les flammes. Les deux armées battent en retraite, le chaos règne, la boue se mélange au sang. Cette lente chanson marquée par un tambour très en retrait, qui rythme cette dernière telle une procession funéraire, vous plongera directement dans l'univers mythologique et cosmique du groupe (bon, n'éxagerons rien, c'est pas du
Darkspace non plus). Treize minutes de cette atmosphère ultra malsaine, et vous serez enfin parés pour entrer au coeur de ce "Norrön Megi".
Et puis ces choeurs, dont nous avons déjà parlé, que vous retrouverez tout au long de cet album, enfin vous les découvrez dans toute leur splendeur sur "Sokn", une chanson dont le riff de guitare sèche simple mais terriblement accrocheur vous hantera longtemps.
Et ça y est, le vrai
Korpblod arrive, sans prévenir, d'un seul coup. "Förevigad", mur de guitares compact et massif, riff mélancolique nous communiquant la nostalgie d'une époque, cette batterie marquant fortement la cadence, et cette voix, cette voix d'outre tombe, éraillée, ébréchée, nous racontant avec violence les mythes anciens. Dix minutes de violence totalement maîtrisée, aux rythmes assez changeants pour ne pas lasser l'auditeur, n'est-ce pas un véritable tour de force que nous avons-là ? Les blasts, peu rapides, sont cependant très efficaces : pas besoin d'avoir
Frost* derrière les fûts pour faire une chanson efficace.
Avec le titre suivant, vous restez dans cet univers chaotique pour encore dix minutes supplémentaires. Il en faut, du courage, pour faire face à ce mur de guitare qui vous arrive en pleine gueule. En tout, vingt minutes de violence noire. Vous tenez le coup ? Allez, promis, après celle-ci, vous aurez un petit répit.
Et d'un seul coup, on se retrouve projeté dans on-ne-sait quel sous-bois peuplé d'oiseaux aux chants différents. "Väsen" comme le calme après la tempête, chanson reposante rythmée par guitare et instruments folkloriques, un peu comme
Graveland, mais en moins pourri niveau sonore et inspiration. Qu'à cela ne tienne, les chants reviennent à nouveau, fortement marqués par ce même tambour raisonnant dans la vallée. Mon coeur ne peut s'empêcher de battre la chamade, bousculé par un tel souffle épique (que ceux qui pensent "quelle tapette, ce mec" sortent de suite, on réglera ça à mains nues). Vraiment, très peu de groupes arrivent à donner quelque chose d'aussi beau.
Et le répit est de courte durée, car le morceau suivant, tout en mid-tempo, vous achèvera (si ce n'était pas déjà fait). Après ce court intermède forestier, vous devez reprendre les armes en main pour affronter "En Sjed Or En
Skald", morceau encore une fois très long, mais lassant pour rien au monde : impossible de s'ennuyer. Vraiment.
"Ar Ok Fridr" marquera ce qui restera de votre carcasse après le monolithe de noirceur précédent. Presque comparable à du
Dark Ambiant, l'intégralité de ce morceau est exécutée sur un clavier. Mais pas un clavier de basse qualité, non. Intraduisible, je ne peux que vous dire d'écouter cette chanson pour voir par vous-même. Disons que ce titre annonce le morceau final, et celui-ci est vraiment un cran au dessus du reste. Batterie plus cadencée que sur les précédents, ce titre est proprement ahurissant de violence et de colère.
Bon, que-dire sur cet album, si ce n'est qu'il approche dangereusement de la perfection ? Il est varié, il est épique, il est folklorique, il est tout à la fois. Ces deux musiciens ont de l'or dans les mains, pour arriver à condenser dans ce disque des scènes de guerre, des pans entier de forêts, le panthéon nordique et les contes et légendes de leur pays d'origine. Je tire mon chapeau à
Korpblod, qui vole de très, très loin la vedette à
Drudkh en signant ce qui s'impose comme LE meilleur album de cette fin d'année. Ecoutez-le, et vous comprendrez.
Pour tout vous dire, je n'avais jamais écrit d'aussi longue chronique depuis "Il était une forêt" de
Gris, qui reste mon album culte. Je crois que je n'ai rien besoin d'ajouter. Longue vie à
Korpblod.
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