Si la Finlande est parfois appelée le pays des mille lacs, on pourrait tout aussi bien la nommer le pays aux mille groupes de black metal tant elle regorge de hordes démoniaques qui officient dans le metal noir.
Vous l’aurez compris, Sorgetid fait partie de ces innombrables combos qui contribuent à assoir la gloire du black finlandais, même si totalement inconnu au bataillon puisque n’émergeant du néant qu’en 2022 avec un premier album,
Natt Av Tusen Dödsfall, défendu par
Werewolf Productions. Si le groupe semble donc sortir de nulle part, le musicien derrière l’entité n’en est pas à son coup d’essai V-KhaoZ étant actif dans une flopée de groupes dont Vargrav, Grieve ou
Druadan Forest, et ayant déjà officié dans des formations telles qu'
Azaghal, Marras ou
Oath of Cirion pour n’en citer que quelques unes.
Pour le coup, le one man band ne sacrifie pas à la tradition finlandaise, proposant un black metal très mélodique évoluant sur un rythme rapide et tirant sa force de l’excellence de ses riffs : poignants, mélodiques et vibrants d’émotion, les accords de ces six titres (Sorgens Tid est un interlude ambiant tandis qu’Eskapism est une outro très typée dungeon synth entièrement jouée au clavier) nous entraînent dans ces sphères mystiques, déchirées entre éther et abysses, auxquelles seul le black metal peut nous élever.
Les vocaux de V-
Khaoz, sortes de feulements démoniaques stridents et déchirés dans la grande tradition finlandaise, appuient parfaitement l’intensité de la musique, agissant comme un instrument à part entière, et la batterie, simple et majoritairement rapide, impose un rythme entraînant qui galvanise ces fresques majestueuses bien que plutôt courtes (5 minutes en moyenne). La basse, bien audible, renforce de ses secousses profondes la pureté incandescente des guitares qui crachent leurs notes ensorcelantes, invoquant la magie noire des 90’s, et à l’écoute de ces parties exaltées, un feeling épique nous envahit et emplit notre être d’une ardeur guerrière qui vient se mêler à des vagues de mélancolie qui nous submergent (Havet Djupare än
Sorg, l’excellent
Skuggan Av Min Tron).
Les émotions se bousculent et nous assaillent, entre dégoût d’un monde moderne futile et sans valeur, nostalgie torturante d’un passé glorieux (Svarta Stormar av Djurisk
Vrede semble vouloir nous plonger dans les ténèbres de l’époque médiévale) et aspiration à un retour à l’état de pureté originelle où la nature n’avait pas encore été souillée par la main destructrice de l’homme.
Ces 36 petites minutes s’avalent d’une traite, propulsées par des titres véloces et dynamiques aux mélodies accrocheuses, alternant attaques frontales parfois teintées d’influences thrashy et riffs plus traînants propices à l’introspection, l’ensemble se consumant toujours de cette flamme noire et fantastique qui suggère mille ombres, chimères et spectres oubliés dans les limbes du temps.
Sans faire dans l’originalité (
Natt Av Tusen Dödsfall est un pur produit de l’école finlandaise, et il n’y a pas à se forcer pour reconnaître des similitudes avec Marras, Förgjörd ou l’inévitable
Satanic Warmaster), on ne pourra pas nier que Sorgetid a un talent certain pour ressusciter les brumes opaques et les brasiers rougeoyants de cette époque lointaine d’obscurantisme, de sorcellerie et de nécromancie. Les amateurs de ce type de black, à la fois rapide, intense, habité et très mélodique ne s’y tromperont pas et se rueront sur cette petite pépite, toutefois, il convient d’être initié et de rester humble et prudent avant de se délecter de cette offrande démoniaque, sans quoi, vous pourriez bien être la prochaine victime de cette « nuit des mille morts »…
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